Chapitre XXXVI

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Les bruits de chocs métalliques résonnaient dans la forêt. Le chêne saignait, sa sève coulant le long de son écorce abîmée. L'acharnement dont faisait preuve Rhiannon avait laissé des cicatrices sur l'arbre qui subissait jour après jour, depuis une bonne semaine. La princesse n'abandonnait pas. Elle continuait de frapper encore et encore le résinifère. Elle était épuisée mais sa détermination était sans faille. Elle avait perdu la vue mais pas ses convictions. D'une manière ou d'une autre, elle réussirait à devenir une guerrière, prête à se battre pour défendre les royaumes que sa famille avait créé. Depuis 19 après Rhiannon, les Rexaron avait battit Deos et les autres royaumes. Charles Rexaron était le premier roi qui avait unit les neuf royaumes. Plus de deux cents cinquante années étaient passées et les Venom avaient détruit le travail de ses ancêtres. Ce n'était pas la première fois qu'ils avaient tenté de s'interposer et ils avaient réussi bien que les Rexaron avaient fini par reprendre le trône qui leur avait été offert par les dieux. Malheureusement, cela faisait près de onze années que les royaumes étaient plongés dans les ténèbres, la misère et la tristesse. La jeune femme refusait que cela puisse continuer. Elle avait vu, bien trop de fois, quel genre de roi était Tiphon. Ironiquement, sa seule rencontre avec lui avait donné lieu à quelque chose d'inattendu. Il s'était montré avenant et courtois mais elle savait que ce n'était pas réellement l'être qu'il était. Il était mauvais, tout droit venu des enfers de Talia pour maudire le monde dans lequel ils vivaient. Elle savait que ce moment en sa compagnie n'avait rien de révélateur. Il suffisait de voir comment sa famille, son village et la rébellion s'étaient fait massacrés pour savoir qui il était réellement. 

-Encre mieux tes pieds dans le sol... entendit-elle alors qu'elle était tombée.
-Nyala, souffla Rhiannon avant de crier de rage, les larmes aux yeux.

Chaque jour, elle pensait à elle. À chaque coup d'épée qu'elle donnait à cet arbre, son prénom résonnait dans sa tête. Nyala, Nyala, Nyala, ... Elle vengerait sa mort, celle de ses deux familles, de Herard, Tommy, Ezio et tout ceux à qui ce fourbe avait pu faire du mal. Cependant, elle avait beau s'entraîner, elle n'avait pas l'impression de faire de progrès. Elle ne voyait aucune avancée. Elle perdait l'équilibre, elle bougeait encore trop, ratant quelques coups par-ci et par-là. Sans Nyala, ce n'était pas pareil. Elle lui avait toujours donné les meilleurs conseils et Rhiannon avait toujours su les appliquer. Elle essayait de faire de même mais c'était différent. Elle ne voyait rien. Elle continuait de méditer pour apprendre à se concentrer sur son ouïe et son odorat mais elle sentait que ce n'était pas suffisant. Il lui avait fallu des mois pour arriver à se battre à peu près correctement en voyant alors sans la vue... Rhiannon, assise sur les fesses, se laissa tomber en arrière, fixant le ciel sans le voir. 

-Si tu abandonnes, tu n'arriveras à rien...
-Je n'abandonne pas. Je fais une pause, souffla Rhiannon.
-Relève-toi.
-Si seulement tu étais vraiment là, dit-elle tristement, des larmes coulant sur ses tempes. 

Elle n'abandonnait pas. Jamais. Mais cela ne voulait pas dire qu'elle n'était pas découragée. Elle continuerait même si cela devait lui prendre des années, même si elle devait y vouer sa vie entière. Rhiannon était fixée sur son objectif et elle n'arrêterait jamais. Cependant, la solitude la tiraillait. Jenny l'accompagnait et s'en allait à chaque fois mais elle se renfermait sur elle-même, poursuivant sa quête de perfection. Elle se battrait contre ses ennemis. Peu importe le temps nécessaire.

-Relève-toi...

Rhiannon soupira et elle se remit sur les pieds après avoir reprit son épée. Débout, devant son chêne cabossé, elle reprit son entraînement. Elle frappait encore et encore, changeant de main jusqu'à ce qu'un bruit attire son attention. Elle se retourna et frappa dans le vide. Pourtant, elle sentait quelque chose.

-Qui est là ? grogna-t-elle.
-Personne, répondit une voix qui ne lui était pas inconnue.
-Encore vous ? souffla-t-elle. Allez-vous en.
-Pourquoi t'entraînes-tu de la sorte ? demanda la femme.
-Ca ne vous regarde pas, affirma-t-elle en lui tournant le dos, recommençant à frapper.

La femme resta là, observant la princesse exprimer sa haine envers les Venom. Elle lui tourna autour, un sourire se dessinant sur ses lèvres.

-Tu es en colère... Pourquoi ? constata l'inconnue.
-Je viens de vous le dire, grogna Rhiannon.
-Non. Tu m'as dit que cela ne me regardait pas, rétorqua-t-elle.
-Exactement, souffla la princesse, changeant de main.
-Tu t'entraînes à manier l'épée des deux mains. Pourquoi ? continua-t-elle.
-Laissez-moi tranquille ! Vous me déconcentrez, s'impatienta la jeune femme.
-Pour quelle raison une aveugle voudrait manier les armes ? poursuivit l'inconnue.
-Assez ! Partez et allez ennuyer quelqu'un d'autre ! s'énerva Rhiannon qui continuait tout de même son entraînement.
-Réponds à mes questions et je partirais, affirma-t-elle.

Rhiannon l'ignora et continua, agissant comme si elle n'était jamais venue et qu'elle n'était pas là. Cependant, la femme continuait de la regarder, observant chacun de ses gestes, ses expressions faciales et les sons qu'elle émettait. Une grande colère animait la princesse, c'était évident. Elle était disciplinée, indiquant qu'elle avait probablement déjà eu un entraînement rigoureux par le passé. Elle était déterminée, ne laissant pas les échecs s'emparer d'elle. La femme eut un sourire, comprenant qu'une seule chose pouvait la pousser à s'acharner à ce point. Elle l'observait depuis une semaine déjà. Chaque jour, elle venait ici et elle la regardait s'entraîner. Elle avait décidé de l'approcher, voyant bien qu'elle n'abandonnait pas et cela lui plaisait.

-La vengeance te fera tout perdre, lança l'inconnue.
-Je n'ai plus rien à perdre, rétorqua Rhiannon en frappant un grand coup, l'écorce se fissurant davantage.
-Qui es-tu ? demanda-t-elle en souriant.
-Personne. Tout comme vous, affirma-t-elle avant de souffler. Partez, j'ai besoin de méditer, dit-elle ensuite, plantant son épée dans la terre. 

Rhiannon se laissa tomber à côté de la lame, croisant les jambes. Elle prit une grande inspiration, posant ses mains sur ses genoux et elle ferma les yeux. Elle pouvait sentir que la femme était toujours là. Elle se demandait ce qu'elle pouvait bien lui vouloir. Pour quelle raison posait-elle toutes ces questions ? Pour quelle raison venait-elle là ? Pour quelle raison restait-elle ? Rhiannon sentait qu'elle avait du mal à se concentrer. Elle serra les dents, essayant de forcer sa tête à tout balayer. Cependant, après quelques minutes, elle poussa un long soupir.

-Je sens que vous êtes toujours là, grogna-t-elle.
-Je t'ai dit que je partirais lorsque tu auras répondu à mes questions, rétorqua l'inconnue.
-Vous avez deviné, non ? Je veux me venger. Vous avez votre réponse, partez maintenant, soupira la jeune femme.
-Pourquoi ne pas simplement payer quelqu'un pour accomplir ta vengeance ? demanda-t-elle.
-Je ne fais confiance qu'à moi-même, répondit-elle simplement, les yeux toujours fermés.
-Il n'est pas sain de refuser de faire confiance à au moins une personne, affirma la femme.
-Tout ceux en qui j'ai pu avoir confiance sont morts, rétorqua-t-elle.
-Et la personne qui t'as entraîné ? Ne peut-elle pas t'aider ? N'as-tu plus confiance en elle ? l'interrogea l'inconnue.
-Je viens de vous le dire. Elle est morte, grogna Rhiannon, serrant les dents.
-Hm, je vois. Tu es donc seule et sans aucun maître pour t'enseigner, conclut-elle.
-Qu'est-ce que ça peut vous faire ? demanda la jeune femme.
-Il fut un temps où j'étais comme toi. Perdue, seule et aveuglée par la vengeance. Je désirais venger ceux que, jadis, j'ai aimé. Certaines vengeances ont été accomplies, d'autres m'ont été retirées. J'ai trouvé une personne qui m'a offert un enseignement précieux. Tout comme toi, je me suis acharnée et je suis devenue celle que je suis aujourd'hui. J'aimerais t'aider, expliqua-t-elle.
-Je n'ai rien pour vous, soupira Rhiannon.
-Je ne te demande rien. Tu me rappelles juste celle que j'étais lorsque j'étais encore un peu plus jeune que toi. Je t'observe depuis quelques jours et ta détermination me plait. Te battre contre un arbre, c'est bien mais tu ne développes aucunement tes sens. Je me dévoue pour cela, dit-elle en souriant. Lève-toi et montre-moi de quoi tu es capable.

Rhiannon soupira et elle attrapa le pommeau de son épée pour s'appuyer dessus et de relever. Elle prit ensuite la fusée et la sortit du sol. Elle se mit en garde, face à la femme d'après l'endroit d'où venait sa voix. D'un coup, elle se prit un coup à l'arrière du genou et elle tomba sur les rotules, une dague sur sa gorge.

-Qu'est-ce que..? Comment ? Je n'ai rien entendu ! s'exclama-t-elle, surprise.
-Je suis probablement la personne la plus silencieuse que tu rencontreras. C'est pour cela que si tu arrives à déterminer ma position et à me battre, tu verras avec les oreilles, affirma l'inconnue en retirant sa lame. Debout, lui ordonna-t-elle ensuite.

Sans hésiter, elle se remit sur les pieds et elle écouta les sons qui l'entouraient. Elle ne percevait rien si ce n'était les bruits de la nature. Elle essayait de se concentrer davantage mais rien. Aucun son provenant de cette femme. Rhiannon se prit un coup de bâton dans le ventre et elle recula, grognant de douleur. Elle bougeait et pourtant elle n'entendait rien. Rhiannon inspira profondément, restant concentrée. Elle était en position de combat, attendant le bon moment. Elle fendit l'air mais ne toucha rien, se penchant. Elle prit un coup de pied dans le postérieur, tombant sur le ventre. Elle souffla mais elle se releva, se remettant en position, écoutant toujours aussi intensément. Un autre coup lui fut donné, dans le bras. Elle se retourna et écouta. Elle n'entendait toujours que la nature, ses propres bruits de pas, sa respiration mais cette femme était comme un fantôme. Elle se déplaçait comme si elle était aussi légère que le vent. Rhiannon ne comprenait pas comment cela était possible. Il y avait des feuilles et des branches tout autour d'elle. Avec l'homme qui l'avait défiée, elle pouvait l'entendre se déplacer même si il l'avait battu aisément mais là, elle n'entendait absolument rien. C'était frustrant. Elle avait beau se concentrer, c'était le silence absolu et elle se prit un nouveau coup de bâton dans le dos. Malgré les douleurs infligées, elle se remettait en position et elle restait concentrée. Si cette femme pouvait et voulait réellement l'aider, elle devait saisir cette opportunité. Elle y arriverait. Elle les vengerait tous. Elle n'avait besoin que d'en tuer un pour cela. Tiphon. Elle y parviendrait. 

L'inconnue la frappa encore et encore sans que Rhiannon ne puisse prédire où elle se tenait. C'était impossible. Le silence qu'elle provoquait bourdonnait dans les oreilles de la princesse. Un nouveau coup la jeta au sol et elle ne bougea pas. Elle restait front contre terre. Rhiannon avait l'impression qu'elle n'y arriverait jamais. Elle ne percevait rien. La frustration s'emparait d'elle mais pas seulement. Elle se sentait inutile, incapable, mauvaise. Elle avait la sensation que Nyala lui avait donné tout ce temps pour rien. Elle n'était plus apte d'appliquer ses enseignements. Elle avait acquis de la force dans les bras mais c'était futile si elle ne voyait pas son ennemi et ne l'entendait pas. Un léger bruit de feuilles lui parvint et elle attrapa une cheville.

-Enfin, souffla-t-elle doucement, ses lèvres s'étirant légèrement.
-Myla ? Tu es tombée ? souffla une voix.
-Jenny ? Oh... Oui. Un accident stupide, dit-elle, son sourire s'effaçant.
-Laisse-moi t'aider, dit-elle en la relevant. Oh, ton épée, dit-elle ensuite en lui ramassant.

Rhiannon la récupéra et elle la remit dans son fourreau, soupirant doucement. Elle avait sincèrement cru qu'elle avait réussi à attraper cette inconnue mais elle s'était évanouie dans l'air. Tout l'espoir qu'elle avait ressenti en touchant ce pied s'était vu balayé par la douce voix de son amie. Elle y avait cru si fort... Elle se sentait démoralisée. Elle s'était prit coup après coup sans jamais pouvoir ne serait-ce qu'effleurer cette femme. Elle retourna donc dans la cité avec Jenny, le morale au fond de ses bottes. Elle l'amena à la fontaine et Rhiannon s'installa dessus. 

-Tiens, j'ai quelques pommes aujourd'hui, dit-elle en lui donnant.
-Mh, merci, soupira Rhiannon en prenant l'une d'elles.
-Ca ne va pas ? demanda Jenny, inquiète.
-N'as-tu jamais désirer quelque chose si fort que cela vint à te dévorer ? souffla la princesse.
-Mmmh... À ce point, je ne pense pas, non, dit-elle doucement. Cependant, je désire quelque chose plus ardemment chaque jour, avoua-t-elle.
-Quoi donc ? demanda-t-elle en venant croquer un morceau de pomme.
-Hum... Et bien... souffla Jenny.

Rhiannon sentit la respiration chaude de Jenny sur sa peau. Ses lèvres vinrent frôler les siennes avant de les capturer. La jeune femme déglutit, avalant ce qu'elle avait en bouche et elle répondit au baiser avant de l'arrêter, détournant la tête.

-Je... Je suis désolée, soupira Rhiannon. Je ne peux pas...
-Oh, hum, c'est... Ce n'est rien, souffla Jenny. Je, je n'aurai pas dû. Ce n'était pas convenable. Je ne sais pas ce qui m'est passé par la tête. C'était idiot. Je suis déso...
-Arrête, fit doucement Rhiannon en posant sa main sur la sienne. Tu es une femme formidable. J'apprécie chaque moment que l'on passe ensemble mais il y a... Il y avait quelqu'un d'autre. Je n'arrive pas à passer à autre chose. J'aimerai pouvoir te dire que j'ai les mêmes sentiments envers toi mais je ne peux me résoudre à te mentir et à me mentir. Ce ne serait qu'une relation basée sur le mensonge et elle serait bien triste, expliqua-t-elle avant de soupirer tristement.
-Est-ce que tu accepterais de me parler de cette personne ? demanda-t-elle, curieuse de savoir qui avait su s'accaparer son coeur.
-Je... Oui. Par où commencer ? souffla-t-elle avant de sourire. Elle s'appelait Nyala. Notre première rencontre fut atypique. Un soldat de Venom était sur le point de me faire du mal lorsqu'elle m'a sauvé la vie. Elle n'a pas daigné me donner son nom à ce moment et elle est partie sans me laisser l'occasion de la remercier. Lorsque mon village s'est fait attaquer, elle m'a à nouveau sauvée. Je l'ai suivie, n'ayant plus nul part où aller. Elle ne voulait pas que je le fasse mais j'ai refusé d'écouter. Elle m'avait menée à une rébellion dont elle faisait partie. De là, ils m'ont recueillie. Nos premiers échanges n'étaient pas des plus romantiques. Elle aimait se moquer de moi, me taquiner... Mais après quelques jours, elle a fini par accepter de m'entraîner. Cette épée... C'est tout ce qu'il me reste d'elle. Au début, je la trouvais trop franche, trop entêtée, trop rustre, trop indélicate, trop irrévérencieuse, une vraie petite brute qui ne savait pas parler avec tact. Elle ne me ménageait pas. Elle ne me laissait aucun répit. Elle me faisait travailler des heures durant. Pourtant, plus le temps passait et plus j'appréciais ces côtés de sa personnalité. J'ai ensuite pu découvrir un être sensible, doux, gentil, attentionné, avenant, à l'écoute, intelligent, bien que je n'en doutais pas avant, plaisanta-t-elle, déterminé, courageux, loyal, intrépide, ... Une personne exceptionnelle qui m'a fait tomber amoureuse de ses défauts autant que de ses qualités. Elle m'a fait découvrir ce qu'était l'amour sans même le savoir. Avant elle, je n'avais jamais aimé comme cela. Enfin... Il y a eu Thera. Je pense que je l'ai aimée mais j'étais bien trop jeune que pour m'en rendre compte et cela appartient à un passé lointain. Mais Nyala... Elle était tout ce que je désirais et tout ce dont j'avais besoin à la fois, souffla-t-elle doucement.

Elle sentait que les larmes lui montait aux yeux mais cela lui faisait un bien fou que de pouvoir parler d'elle.

-C'est sa loyauté et son courage qui m'ont sauvé à nouveau mais c'est aussi ce qui l'a mené à sa perte. Une nuit, la rébellion s'est faite attaquée. Alors que je désirais me battre à leurs côtés, elle m'a obligée à partir. Elle m'a mise sur un cheval et elle m'a éloignée de la bataille. La dernière vision que j'ai d'elle... Une silhouette entourée par les flammes, des corps et des combats. Il ne me reste donc que cette épée, offerte après maintes entraînements, souffla-t-elle, les larmes roulant sur ses joues tandis qu'elle serrait le pommeau de son épée entre ses fins doigts. Ce qu'elle me manque, dit-elle avant de sourire tristement, frottant ses joues. Elle me dirait probablement d'arrêter de la pleurer, d'aller de l'avant mais je n'y arrive pas. Elle hante mes pensées. Jour après jour. Je n'y arrive pas. Je pense que je n'en serais pas capable, pas tant que je ne me serais pas vengée. Je ne peux tourner la page. Elle a sacrifié sa vie pour que je puisse vivre la mienne et pourtant, j'ai la sensation de n'être que l'ombre de mon ombre. Mes journées ne se résument qu'à ce désir de vengeance qui me dévore de l'intérieur, dit-elle, serrant son épée. Je l'aurai, ce sale chien. Son âme pourra être en paix et mon esprit le sera lorsque sa tête décorera une pique.

Jenny avait tout écouté sans dire un mot et elle restait sans voix. Elle comprenait qu'elle ne pouvait défier un tel amour et un tel désir. Elle savait qu'elle ne pourrait jamais remplacer cela. Elle pensait même que si elle parvenait à la venger, cela ne suffirait pas. Un amour semblable ne pouvait exister qu'avec une seule et même personne. Myla ne pourrait jamais aimer à nouveau avec tant de passion, de conviction, d'ardeur, de dévotion, de ferveur, de tendresse, de véhémence, ... Elle ne pouvait lutter. Elle respectait ce que ressentait Myla. Elle trouvait cela affreusement beau et triste à la fois. Jenny se sentait peinée pour son amie.

-Tu ne m'avais donc pas tout dit sur toi, dit-elle simplement.
-Mh... Je t'ai menti, je l'avoue. J'avais peur que tu me veuilles du mal mais j'ai appris à te faire confiance, affirma-t-elle.
-Je m'en étais douté mais je me suis dit que si tu ne voulais pas me dire la vérité, c'était que tu avais des raisons. J'ai grandi dans la cité et je n'avais jamais entendu parler de toi. Même cachée dans une cave, quelqu'un aurait su pour ton existence et les nouvelles vont vite à la cité, lui expliqua-t-elle en souriant. Tu sais donc à quoi ressemble le vert...
-Excuse-moi... souffla Rhiannon.
-Il n'y a rien à excuser. Ton récit suffit à comprendre tes raisons. Je n'ai aucune rancœur. Je suis seulement triste pour toi. Tu sembles avoir vécu des choses horribles... Mais tu n'es plus seule maintenant. Tu as une amie, affirma Jenny en souriant, posant sa main sur la sienne alors qu'elle tenait toujours fermement son épée.
-C'est du passé. Je me dois d'aller de l'avant même si je ne construis mon avenir que sur ce besoin de venger ceux que j'ai aimé. Ironique n'est-ce pas ? Affirmer que ce n'est que le passé, que je dois avancer et en être pourtant incapable... souffla-t-elle.
-L'avenir ne peut se construire que si le passé existe, rétorqua Jenny. Si je le peux, je t'aiderais à façonner ce futur que tu entrevois. 
-Merci Jenny. Je suis chanceuse que les dieux t'ait mis sur ma route, répondit Rhiannon en souriant.

Jenny eut un sourire et le silence s'installa. Elles restèrent assise là, à contempler l'absence de bruit. Les rues étaient calme en cette douce soirée.

The Lost Kingdom [EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant