- Lundi, 19h 45.
Bouffé, rongé par la peur, je tape mon pied contre la ferraille de la caisse de mon pote. Matt roule, oublie les stops, ralentit simplement aux feux rouges et trace en direction de chez Alice. J'inspire, expire et fixe mon téléphone. Alice ne répond pas. J'ai dû lui envoyer une vingtaine de messages depuis qu'elle a raccroché. Elle m'a lâché quelques mots qui m'ont détruit puis m'a laissé avec un bip sonore ignoble. Je me rappelle sans problème de la tronche du flic qui m'interrogeait. Je me suis cassé sans même m'expliquer, m'excuser. Je suis sorti avec la main de Matt sur l'épaule et j'ai juste dit le prénom de mon petit-ami. Il a compris. Qui n'aurait pas pu ? C'était simple. Et puis, les larmes qui roulent sur mes joues sont une preuve que je ne déconne plus.
J'ai peur, la boule dans mon ventre me rappelant constamment la menace qui plombe. Je ne sais pas ce qu'il se passe, j'ai juste réalisé qu'on arrivait au bout du rouleau. Son oncle. Cet enfoiré qui l'a brisé. Qui a bousillé sa vie avec un coup de pied. Qui a tout fait pété sans même cherché à regarder ce qui l'entourait. Jayce ne m'a jamais parlé de son passé et là, je vais y faire face de plein fouet. Mes dents s'enfoncent dans ma lèvre, et je passe rageusement une main dans mes cheveux. Bryan se tourne vers moi et ordonne à Matt de se bouger le cul. Ce dernier grogne et tourne dans une énième rue. Je la reconnais : on est à un kilomètre de chez l'australienne. A un kilomètre de la vérité.
Mon coeur tambourine dans ma poitrine, mes tripes se retournent et j'ai l'impression de défaillir. Ce sentiment est ignoble. Je n'avais jamais eu autant peur pour quelqu'un, je n'ai jamais autant stressé, paniqué. Mon monde vacille, ma tête tourne et Matt se gare. J'ai envie de vomir. Je n'ai pas envie d'entrer. La voiture de Jayce est là. Il n'est pas parti. Mon ventre se serre. Une autre voiture est garée en travers sur le trottoir. La toiture verte est défoncée, le pare-brise a tellement d'impact que je ne sais pas comment il tient encore. Tout tourne autour de moi, je n'arrive pas à me concentrer. Des portes claquent, les garçons sont sortis de la voiture. Je dois faire pareil. Je dois aider Jayce. Bryan ouvre ma portière et ses doigts m'attrapent pour me forcer à sortir. Heureusement, sinon, je n'aurai pas bougé. Planté sur mes jambes face à son visage grave, je me raidis.
- Bouge toi maintenant, il a besoin de toi. Ne fais pas la même chose qu'avec Aismé.
Aismé. Son nom résonne comme une claque dans ma tête et ma respiration se coupe. Non, je ne perdrai pas Jayce. Je le refuse, je me le refuse. Pas une seconde fois. Pas après tout ça, pas après avoir découvert ce que c'était aimé et être aimé. Non. Je papillonne des yeux, chasse les larmes qui s'y installent. Je ne perdrai personne.
Un coup d'oeil à la voiture verdâtre remonte à bloc ma haine. Il a pourri la vie de Jayce, il l'a blessé comme personne. Il ne pourra jamais être réparé tant que cet enflure n'aurait pas reçu le revers de la médaille. Oh ouais, je vais venger Jayce. Bryan doit se rendre compte de mon changement d'attitude car ses doigts tentent de se refermer sur mon épaule.
Mais j'ai déjà disparu.
Je fonce vers la maison où des bruits de verres brisés, des cris et des injures résonnent. Mon coeur tape fortement dans ma poitrine, chaque cellule de mon être s'embrase et je rejoins vivement le salon où un spectacle affligeant me fait face. Je ne vais pas le supporter. Je ne vais rien supporter du tout. Je ne vais pas pouvoir. Trop dur, trop horrible, mon cerveau a déconné, il a tout laissé en vrac et c'est barré. Je crois qu'il a embarqué mon coeur avec. Ainsi que ma raison. Je vois flou, les larmes roulent sur mes joues. Je tremble, j'ai peur, je souffre et je ne sais plus quoi faire.
Jayce, les mains levées, la lèvre inférieure éclatée et les yeux remplis de rage me fixent. Sauf que ce n'est pas réellement ça qui retient mon attention et qui me foudroie de l'intérieur. Mais l'arme pointé vers lui. Avec au bout, un mec chauve qui lui ressemble vaguement. Son oncle. Je hoquette alors qu'Alice se replie sur elle-même dans un coin de la pièce quand l'homme me hurle de ne pas bouger. Un bruit derrière moi me fait comprendre que les gars m'ont suivi. mais je n'ose pas me tourner vers eux, ils doivent bouillir. Sauf que le seul adulte a une arme, et le doigt pressée sur la détente.
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RomanceL'histoire de Tom n'est pas banale. Celle de Jayce non plus. Alors que Tom est rongé par la colère, sa rencontre avec Jayce lui permet de trouver une échappatoire. Débuts tumultueux, week-end imposé et leur relation prend une toute nouvelle tournure...