INCANDESCENCE

Chapitre 80

ALEC

Drogo me regarde faire les cents pas dans la cuisine pendant qu'il sirote tranquillement sa bière tiède, assit sur sa chaise. 

-Putain !

Il fronce les sourcils et me suit du regard.

-Qu'est-ce qui s'est passé ? 

Je lève les yeux au ciel. La seule personne capable de m'offrir un avenir décent va bientôt disparaître de ma vie et par ma faute. 

-Rien.

 Ses yeux se posent sur mes mains tâchés de sang et me regarde pendant quelques secondes d'un air confus.

-On ne dirait pas.

Je m'arrête de marcher et me tourne vivement vers lui, claquant fermement mes mains sur le plan de travail.

-Je n'ai pas vraiment envie d'avoir une conversation à cœur ouvert avec toi, là, maintenant. 

Je parle sèchement, mais ça n'a pas l'air d'avoir eu l'effet escompté puisqu'il insiste, après avoir prit une autre gorgée de bière. 

-Tu lui a dit pour la Californie, c'est ça ?

Je lui lance un regard noir.

-Elle le savait déjà. C'est juste que...elle ne l'accepte pas, putain. Elle refuse de me quitter, dis-je en passant mes mains sur mon visage d'un air exaspéré.

Je n'arrive pas à m'ôter de ma tête l'image de Sara pleurant toutes les larmes de son corps en hurlant que je l'abandonne. Ses paroles tournent en boucle dans ma tête, comme un putain de CD rayé et j'ai l'impression de perdre la tête. Je sais qu'elle a raison, mais j'aimerais tellement que ça ne soit pas le cas. Je l'abandonne seulement pour qu'elle puisse avoir une vie meilleure. C'est pour elle que je fais ça, bordel de merde.

-Je l'aime pas beaucoup, mais faut avouer qu'elle est accro à toi. 

Je lève les yeux vers Drogo et soupire en m'avachissant sur la chaise en face de lui.

-Et je le suis tout autant d'elle. Elle est ma seule chance d'être véritablement heureux un jour et de ne pas rester seul le restant de ma vie.

Des bribes de souvenirs d'elle me reviennent en tête. Je souris, en pensant qu'à chaque fois qu'elle est près de moi, elle fait tout pour l'être encore plus. Quand elle se colle à moi sous les draps, quand elle frôle sa main contre la mienne parce qu'elle n'ose pas me la prendre, ou juste l'émerveillement à travers ses yeux quand elle me regarde. J'aime quand elle trouve un prétexte pour me toucher, ou la façon dont elle entrelace ses doigts avec les miens pendant qu'on fait l'amour. Parce que c'est ça qu'on fait, l'amour. Je ne l'avais jamais fais avant elle. Je veux dire, avec des sentiments. Et c'est tellement différent que j'en suis devenu accro. Putain, elle m'a rendu dingue d'elle au premier jours, et maintenant j'en paye le prix. Je sais que la renvoyer chez elle ne rendra pas ma vie meilleure et maintenant que je sais à coté de quoi je passe, je m'en veux de ne pas être assez égoïste pour rester avec elle.

Drogo fronce les sourcils.

-Pourquoi tu ne veux pas qu'elle reste ?

Je roule du regard et me frotte le visage de mes mains.

-Regarde le monde dans lequel on vit Drogo. Je ne veux pas de ça pour elle. Putain, je sais pas ce que j'ai fais pour la mériter, je te jure, je sais pas, mais je veux le meilleur pour elle. Et même si elle est le meilleur pour moi, je dois résister à mon envie de la garder auprès de moi.

Il ouvre la bouche, mais se ravise aussitôt et reste silencieux. Je n'ai aucune idée de pourquoi je lui balance toutes ces conneries. Peut-être que quelque part, j'ai envie de savoir ce qu'il ferait à ma place. Il me fixe, l'air complètement perché avec toutes les bières qu'il s'est déjà enfilé et je soupire. Je sais pas pourquoi je lui parle de ma vie, j'ai juste besoin que  quelqu'un me dise que j'ai raison, que je fais le bon choix. Je prend une grande inspiration.