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« Dieu sera toujours plus fort que le Diable. Sauf si tu en décides autrement. »
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JEANNE

Le réveil est difficile. Très difficile.
Telle une zombie je sors du lit après que mon père m'ai appelée.

Aucune envie de prendre le petit déjeuner. Aucune envie d'expliquer à mon père mes pleurs de cette nuit.
En bon père qu'il est, il ne dit rien, et je monte dans ma chambre pour me préparer.

Trois semaines se sont écoulées depuis le fameux weekend merdique dans les Alpes. Trois semaines que ma vie est une descente aux enfers. Et j'ai l'impression que la fin est loin. Très loin.

Le seul point positif de ce début de journée est ma tâche noire. Les six traits sont toujours là. Du coup, ma vie ne se limite plus à des jours, mais plutôt à six semaines ou six mois.

Ce qui se passe dans ma tête est un tel champ de bataille que je sors de la maison en embrassant mon père, sans savoir comment je suis habillée, ni quels cours sont dans mon sac.

Dire que Sam me manque est un petit mot. J'ai l'impression que j'ai perdu la moitié de mon coeur.
J'ai eu beau retourner la situation dans tous les sens cette nuit, je comprends toujours pas où il a disparu, ni pourquoi. Je m'inquiète vraiment, mais je peux rien faire à part attendre comme à chaque fois qu'il revienne vers moi.

Mais quand va-t-il revenir ?

J'aperçois le Lycée que j'ai décidé de rejoindre à pied ce matin. J'avais pas envie de croiser cette Cassie dans le bus. Dire que Constantin a voulu me tuer à cause d'elle...

Est-ce qu'ils sont toujours ensemble ? Est-ce qu'il couche toujours avec Mary ?
Comment vont se passer nos retrouvailles ?

Elles seront glaciales, sans aucun doute.

—Ça va bientôt sonner.

La voix d'Alex me fait sursauter. Lentement je me tourne vers lui pour croiser ces yeux bleus qui me dévisagent. Avec inquiétude.

—Ça fait un quart d'heure que tu fixes le Lycée...

Je le regarde en bug total. Quand j'ai quitté le bahut il y a trois semaines, il m'adressait à peine la parole. Il sortait avec Mary.
Et là, le simple fait qu'il soit présent devant moi, me fait halluciner. C'est incroyable comme les choses ont changé en si peu de temps.

—Je peux te prendre la main ?

—Non ! je m'offusque.

—Ok, ok ! fait-il en levant les bras en l'air. Par contre il faut qu'on se magne si on veut pas être collés.

Je jette un rapide coup d'œil sur ses vêtements. Un jean troué aux genoux avec une doudoune bleue par dessus très sexy. Dès que mon regard croise ses yeux, je rougis.

Il esquisse un petit sourire, avant de passer une main nonchalante dans ses cheveux.

—Arrête de faire ça, je marmonne agacée.

—Pourquoi ? sourit-il. T'as peur de craquer ?

—Ne joue pas avec moi, Alex. Je suis déjà prise.

Son visage se referme comme une huître. Il ne sourit plus. Ses sourcils se froncent.

Je détourne la tête, et croise quelques mètres devant nous les regards de Marysa et de Constantin. Ils sont ensembles, côte à côte, et me scrutent avec curiosité.

Mary porte une mini-jupe marron avec une veste bordeaux bien cintrée, et de longues bottes noires. Constantin avec ses éternelles lunettes sur le nez, est vêtu d'un pantalon en velours gris avec une veste de costard à carreaux vert et rouge. Ses mocassins ne sont plus noirs, mais vert kaki, avec une boucle argentée devant.

Je souffle un bon coup en fermant les yeux.
Je suis pas prête, pas prête du tout à les affronter.

Alex passe tout d'un coup son bras autour de mes épaules, et sans que je puisse riposter, il m'entraîne vers le Lycée.

—Ignore-les, me chuchote-t-il à l'oreille.

Mon cœur loupe un battement.
Est-ce qu'Alex le gars super sexy et craquant de tout le bahut marche avec moi avec son bras autour de mes épaules ?

C'est la merde.

Les yeux verts-gris de Mary qui me fixaient avec curiosité, me lancent désormais des fléchettes.
C'est con à dire mais ça me fait sourire. Savoir qu'elle le kiffe toujours et qu'il l'a laissée tomber, me réchauffe un peu le coeur. J'aurais jamais parié qu'Alex deviendrait un ami, et je lui suis sincèrement reconnaissante de pas me laisser seule pour affronter ces deux tarés.

Pourtant quand on passe à leur niveau, je baisse la tête. Leurs regards froids et durs sont trop difficiles à soutenir. Alex raffermit son étreinte en me collant plus contre lui, et je suis sûre d'entendre Marysa ruminer de colère.

Une fois en classe, je réalise encore plus que les choses ne sont plus les mêmes. Alex s'assoit à côté de moi, à la place de Mary. Alors que cette dernière s'est installé trois rangs devant nous avec Constantin.

Le groupe a éclaté.
Plus rien ne sera plus jamais pareil.

La prof d'histoire rentre dans la salle d'un ton joyeux comme toujours. Je suis tellement contente de débuter les cours avec elle. Elle a toujours ce don de me transporter dans un autre monde, une autre époque, avec cette passion dans la voix et ses yeux remplis d'étincelles quand elle nous raconte son cours.

Je la fixe déambuler devant nous avec un beau sourire aux lèvres, quand une main remonte doucement la manche de mon pull noir.

—Arrête de me toucher comme ça, je peste à voix basse.

Je tente de retirer mon bras pour qu'Alex me laisse tranquille, mais sa main m'en empêche. D'un air grave, il dévisage ma marque noire, passe son pouce dessus. Une curieuse chaleur se propage sur mon poignet.

Lentement il relève la tête pour planter son regard dans le mien. Ça m'énerve tellement de ressentir ces frissons à chaque fois que ses doigts rentrent en contact avec ma peau, que ses yeux se posent sur moi. J'ai l'impression de revenir trois semaines en arrière quand j'étais raide dingue de lui, et ça me met hors de moi.

—J'ai envie de t'embrasser, chuchote-t-il en se penchant légèrement vers moi.

—Arrête Alex, je riposte d'une voix troublée. On en a déjà parlé.

Un éclair de défi traverse ses yeux. Une lueur malicieuse qui ne me plaît pas du tout.

Pendant que la prof s'extasie sur les puissances du monde après la première guerre mondiale, je croise mes bras contre ma poitrine pour mitrailler Alex du regard.

—C'est quoi ton but dans l'histoire ? Tu m'aimes et tu veux que je retombe amoureuse de toi. Et après ?

—J'aime personne, réplique-t-il sèchement en remettant son dos bien droit sur la chaise.

Quoi ? C'est la meilleure celle-là.

—Tu veux juste te mettre avec moi pour me jeter après ?

—C'est pas ça, marmonne-t-il comme s'il était embêté.

D'un geste nerveux, il attrape son stylo et se met à griffonner je sais pas quoi sur sa feuille.

Estomaquée par son attitude soudaine si froide et distante, je me penche pour lui gueuler à voix basse :

—C'est toi qui fait pas le poids face à Sam. On s'aime d'un amour profond et sincère, alors que toi...toi...toi tu me considères comme un jouet que tu dois sauver !

Ses poings se serrent sur la table. Son visage se crispe de colère, quand un bout de papier atterrit brusquement sur ma feuille.

Surprise, je tourne la tête pour voir qui m'a envoyé ça. Je tombe sur le regard foudroyant de Mary.

À peine le temps de prendre le bout de papier en main, qu'Alex me l'arrache violemment pour le lire.

Quand il se lève avec fracas pour bondir sur Marysa, j'attrape le bout de papier qui allait tomber par terre, et le lis :

« C'est toi la pute ».

Just Play 2  (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant