Just Play 2 (Terminé)

68

SAM

Mes yeux sont rivés sur les premiers rayons de soleil qui s'étirent devant nous. Ça fait des heures qu'on roule en direction de Koszalin, et Jeanne est restée recroquevillée dans mes bras pendant tout le trajet.
Sans plus aucune force, plus aucune parole, plus aucune âme, elle s'est tenue à ma veste comme si sa vie en dépendait.

Heureusement Mitch a tenu le branleur à l'écart en le faisant monter dans l'autre voiture.

Ça fait cinq jours qu'elle est marquée par cette tâche noire, et je redoute tellement de découvrir s'il lui reste qu'un seul trait. Son bras gauche étant enroulé derrière mon dos, pas moyen que je la réveille alors qu'elle a enfin trouvé le sommeil.

Il est 8h25 lorsqu'on arrive enfin à destination. Je me gare à l'adresse que Mitch a trouvé sur internet.

Une vieille maison en pierre abandonnée se dresse devant nous.
Merde.
Personne habite ici.

Démoralisé, je sors de la voiture, pendant que mon ange dort encore sur la banquette arrière.
Sonya va directement vers la maison à moitié démolie, quand le 4x4 des autres s'arrêtent derrière le nôtre.

D'un geste nerveux j'allume une clope. Jean vient se poster à côté de moi en silence, et on observe Sonya qui fait le tour de la propriété.

Deux petits bras viennent tout d'un coup encercler mon dos, et sa tête se câle dessus. Le sentiment qui me submerge est indescriptible. De la surprise, du soulagement et une joie intense.
Je tire la dernière latte de ma clope, et pose mes mains sur celles de ma femme qui sont froides.

Jean s'écarte pour nous laisser tranquille, alors que Mitch rapplique d'un pas lourd.

—C'est quoi cette piole ? marmonne-t-il grognon.

—L'adresse que tu nous a donné, je rétorque agacé.

J'esquisse un petit mouvement vers la droite pour glisser mon ange dans mes bras. Sans un regard, elle enfouit immédiatement son visage contre mon épaule, et prend une grande inspiration comme si elle s'imprégnait de mon parfum.

La sentir si près de moi me fait un bien fou. Ma tête appuyée sur la sienne, je lui laisse le temps pour s'ouvrir à moi. Elle est venue me retrouver et j'ai pas envie de tout gâcher.

—Hé merde, râle Mitch en sortant une plaquette de chocolat violette de sa grosse veste.

Il enlève le papier aluminium et croque un bout avec une mine contrariée.

Blaise va rejoindre sa copine qui n'arrête pas de tourner autour de la maison délabrée, et je cherche pas à savoir où est l'autre.

—Bon, déclare Sonya en revenant quelques minutes plus tard vers nous. On va faire deux groupes pour aller interroger le village. Elle a peut-être déménagé.

—J'ai faim, chuchote soudain Jeanne d'une voix endormie.

Je baisse les yeux vers elle et croise enfin son regard chocolat qui m'a tant manqué. Il est entouré d'affreuses cernes, d'une pâleur extrême, ses joues sont rougies par le froid.
Je pose un doux baiser sur son front, avant d'annoncer à la team qu'on va tous les deux se trouver un endroit pour manger.

—Mitch tu vas avec qui ? demande Sonya.

—Avec le sportif. On doit encore parler, dit-il en craquant ses doigts.

Il mitraille du regard le branleur qui est adossé contre la caisse. D'ailleurs ce dernier a une mine froncée, dépitée, pas aussi joyeuse que d'habitude.