36- L'angoisse grandie

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L'air dans cette pièce se faisait très pesant. N'ayant aucune notion du temps, on était tous dérouté.
Un geste en face de moi attirait plus particulièrement mon attention, Théo se réveillait tout juste. Mes yeux se posaient alors sur Hakim, sa poitrine se levait régulièrement, et lentement. Je comprenais alors qu'il dormait.
Et à côté de moi, son frère semblait aussi dormir.
Les chanceux, pensais-je.

— Hey, lança gentiment Théo, d'une petite voix. Tu ne dors pas ?

— J'en suis incapable, annonçais-je en secouant négativement la tête.

Il déviait son regard, n'ayant guère le besoin de parler, je savais qu'il lui était aussi impossible de trouver le sommeil.
Machinalement, je revoyais ma vie en retro prospective, des souvenirs heureux passaient en coup de vent, des souvenirs avec Alisha, ou encore Georges, Théo, Idriss, Hakim et Ken. Mais les souvenirs qui restaient ancré dans ma mémoire n'étaient pas des plus heureux ; je me revoyais à la soirée de Théodore, là où j'avais eu le sentiment de n'être rien qu'une affreuse créature comparé à ma pote, puis l'accident de Idriss et les nuits blanches à l'hôpital, ainsi que toutes les disputes que j'avais eu avec les gens que j'aimais. Sans oublier ce moment présent.
Mais je crois bien que les pires souvenirs restaient ceux de mon enfance, ma dispute avec les géniteurs m'avaient lourdement marqué à jamais.
Le regard perdu dans le vide, j'observais Idriss respirer difficilement à côté de moi. Je me sentais soudainement vide. Vidée de toute émotion.
Peut-être fallait-il passer par de grandes périodes de tristesse avant de goûter au bonheur ? pensais-je. Peut-être. Mais alors, que faire quand la douleur est trop forte, et qu'elle l'emporte sur la raison ?

— J'ai mal Théo, soufflais-je brusquement après de longues minutes de silence glaçant.

Mon interlocuteur tournait rapidement sa tête dans ma direction, même de loin, je voyais ses sourcils se froncer. Je venais de le sortir sans aucun doute de ses pensées, je m'en excusais d'un geste de tête.

— C'est normal, observa-t-il légèrement perplexe, tu viens d'être...

Je levais rapidement la main en l'air, fermant doucement mes yeux. Ne supportant pas l'évocation de ce qu'il venait de se passer, je me pinçais avec haine et honte la lèvre inférieure, je me surprenais à trembler de partout. Théo paraissait se rendre compte de l'impact de ses paroles sur moi, car il reprenait aussitôt la parole, d'une voix plus douce :

— C'pas ce q'je voulais dire, lança-t-il rapidement, suis désolé.

— Je souffre depuis que je suis petite, poursuivais-je en rouvrant péniblement les yeux. J'en ai prit conscience que maintenant.

Théo ne bougeait pas, du moins il n'osait plus. Il attendait patiemment que je poursuivre. Mais la vérité c'est que je n'avais aucune idée de ce que je voulais dire. Alors je gardais le silence, ce qui semblait l'exaspérer mais je n'en tenais pas compte.

— Charlie, j'imagine que ce n'est pas facile ce que tu as vécu, mais pourrais-tu s'il te plaît, m'en dire plus sur sujet ? Demanda-t-il d'une voix entièrement neutre en fixant le mur, droit devant lui. Je ne comprends pas bien où tu veux en venir.

— Tu vas me prendre pour une folle, soupirais-je en jouant avec mes doigts, je crois que je devrais sérieusement envisager de parler avec une psychologue et...

Soudain, il tournait rapidement sa tête vers moi, son regard venait de changer. Je ne comprenais pas pourquoi.

— Ne redis jamais psychologue et folle dans la même phrase, je te prie.

〉𝑭𝒆́𝒍𝒊𝒏𝒔 𝒑𝒐𝒖𝒓 𝒍'𝒂𝒖𝒕𝒓𝒆 [𝑻𝒆𝒓𝒎𝒊𝒏𝒆́]〈Où les histoires vivent. Découvrez maintenant