62- La colère

239 16 0
                                    

Après m'être un peu calmée, je me retrouvais comme une idiote, assise en tailleur, entrain d'arracher de l'herbe. Soudainement, des flashbacks de la soirée passée à chercher Hakim me revenaient subitement en mémoire. Plus précisément la discussion que j'avais eu avec Simon, avant qu'il ne commette son horrible acte. La discussion où l'on parlait d'arracher l'herbe. Et que je trouvais cela profondément injuste, parce qu'au fond, on avait tous tendance à passer nos nerfs égoïstement sur ces petites brindilles ; les arrachants unes à unes. Et elles ne le méritaient pas.

— Ça va comme tu veux ? Souffla une voix qui m'arrachait à ma contemplation.

En tournant la tête, j'apercevais Simon. Les mains dans les poches, le regard océan rivé sur moi. Cependant, il restait à distance, et je le remerciais d'un faible geste de la tête, à peine perceptible. Mais je savais qu'il avait comprit.

— Je n'ai entendu qu'une infime partie de votre dispute, lança-t-il sans bouger. Je ne te demande pas de m'en parler, je veux juste m'assurer dans quel état d'esprit tu te trouves.

Je relevais timidement mes yeux dans sa direction. Avant d'hausser calmement les épaules.
Comment je me sens ? pensais-je.
Je ne sais pas, pas vide en tout cas. Un tout pleins de mélange d'émotions bouillonnaient au fond de moi.

— Je crois que je suis entrain de craquer, finissais-je par reconnaître après avoir tenté de tout garder pour moi.

Simon ne bougeait toujours pas. Les mains dans les poches de sa veste en jean, il se contentait de me scruter.

— Alors vas-y craque, surtout ne te gêne pas. Balance tout ce que tu as sur le coeur ! Quitte à me frapper, défoule-toi ! Mais ne fait pas comme moi, ne tombe pas dans le piège de "je fais la personne forte alors je garde tout en moi". Pas avec moi. Ça ne fonctionne guère.

Il s'approchait doucement, et je ne le quittais pas du regard. J'étais dangereuse, et pourtant, il se plantait devant moi. J'en avais gros sur le coeur.

— Je veux t'aider, Charlie, souffla-t-il.

— Pourquoi ? Répliquais-je agressivement. Tu as toutes les raisons pour te barrer loin d'ici ! Pars !

— Je refuse que tu vives ce que moi j'ai pu vivre.

Délicatement, il me tendait sa main. Après quelques minutes de réflexion, je me décidais enfin de la lui saisir. Il me lâchait alors la main avant de reculer de trois pas. Là, il écartait ses bras avant de m'annoncer que je pouvais me défouler.

— J'ai peur de l'abandon, m'exclamais-je. Mais en même temps ma solitude me réconforte quand la déception est là ! Et elle occupe une grande partie de ma vie ! Tu sais pourquoi ? Parce que de toute façon je suis toujours déçu par les gens que j'aime le plus !

Après m'être assuré à plusieurs reprises qu'il était certain de ne pas le regretter, je me jetais enfin à l'eau ; maladroitement et violemment, j'écumais toute la rage en hurlant tout ce que je ressentais à haute voix. Et, alors que je lui faisais part de mes pires souffrances, en pleurant ; je balançais maladroitement mes poings contre son corps mince. Évidemment, je ne visais pas son ventre, où des hématomes le faisaient encore souffrir.
Je visais plus haut, jusqu'à ce je me sente tout à coup emprisonnée. Mes larmes rendant ma vue complètement floue, ce n'est qu'après plusieurs minutes où je tentais de me débattre, que je comprenais qu'il me coinçait dans ses bras. Je pleurais. J'hurlais ma rage. Je me confiais à lui sur mes doutes et angoisses, qui me rongeaient au plus profond de mon âme.

— Ça va aller, murmura-t-il entre mes sanglots.

Je secouais négativement la tête. Non, rien n'allait. Et demain ne sera sûrement pas meilleur.

〉𝑭𝒆́𝒍𝒊𝒏𝒔 𝒑𝒐𝒖𝒓 𝒍'𝒂𝒖𝒕𝒓𝒆 [𝑻𝒆𝒓𝒎𝒊𝒏𝒆́]〈Où les histoires vivent. Découvrez maintenant