28- L'ultime bagarre

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Mel' plissait les yeux avant de faire signe aux garçons de nous rejoindre. Je répétais alors ce qu'il s'était passé en hurlant presque, tant la musique était forte.

— Il est sûrement encore sur le balcon ! indiqua Hakim. Je vais le chercher avec Théo, vous, vous restez avec Ken et Georges, d'accord ?

— D'accord, acquiesça Mélanie.

Mais de mon côté, je n'étais absolument pas d'accord. Et s'il lui arrivait quelque chose de grave ?
Je regardais ma montre, lançant un regard paniqué autour de moi. Cela faisait plus de vingt minutes qu'il s'était absenté, et je n'avais toujours aucune nouvelle de lui.

— Du calme, tenta de me rassurer Mélanie en passant un bras autour de mon épaule. Je suis certaine qu'ils vont vite le retrouver !

Et elle ne croyait pas si bien dire.
Quelques instants plus tard, je reconnaissais aussitôt Hakim passer la baie vitrée en courant. Il captait mon regard, avant de le détourner rapidement, en faisant signe aux garçons de le rejoindre.
Mais prise d'adrénaline, je les devançais, rejoignant en premier Hakim.

— Tu ne devrais pas venir, commenta-t-il.

Qu'importe. Maintenant j'étais là. Je ne comptais pas partir. Pourtant, Hakim essayait de me bloquer dans ses bras, mais je me défendais comme je pouvais, me balançant dans tous les sens possibles et inimaginables. Ken et Georges finissaient par nous rejoindre après quelques minutes ; ils étaient légèrement essoufflé.

— Que se passe-t-il ? Demanda précipitamment Georges en reprenant son souffle.

Je n'attendais pas plus, avant de me précipiter à mon tour sur le balcon, vivement rattrapé par Hakim qui me serrait fortement dans ses bras.
C'est qu'il avait de la force en plus !
Je ne tentais pas de me débattre, bien trop chamboulée par le tableau qui s'offrait à moi.
Idriss était plaqué à même le sol, coincé par Léonard qui le tenait fermement par le col de son sweat gris clair. Je retenais mon souffle. Il était amoché. Du sang recouvrait son sweat au niveau du torse.
Que lui était-il arrivé ?

— Tu n'aurais pas dû venir, souffla Hakim, dépassé par les événements.

Je poussais alors un cri aigüe. Cela avait pour effet d'interrompre la bagarre durant un instant, les deux relevaient leurs têtes, me fixant. Hakim me relâchait en soufflant, tandis que Léonard se relevait brusquement.

— Idriss ! M'exclamais-je en me précipitant vers lui.

Mais je cessais aussitôt de courir, lorsque Léonard le relevait rapidement, toujours saisit par le col de son vêtement, le poussant contre la barrière de sécurité du balcon.
Je déglutissais tandis qu'il prononçait les mots que je redoutais le plus :

— Un pas de plus, et je le pousse. Compris ?

Compris.
Je ne pouvais plus rien faire. Comment un carnage pouvait-il avoir lieu sur la terrasse d'une boîte de nuit ? Alors qu'à l'intérieur tout le monde dansait, buvait et semblait s'amuser sans se rendre compte du drame qui était entrain d'avoir lieu à quelques mètres d'eux seulement ?
Comment une telle chose était-elle possible ?
J'essayais d'établir un contact visuel avec Idriss, mais il préférait garder les yeux clos. Il était abîmé au niveau des lèvres et de son arcade droite.
Je commençais à trouver le temps long, du moins, jusqu'à ce que je n'entende un déclic. Mon intention se reportait immédiatement sur Léonard, qui a présent, possédait une arme.

— Repose cette arme ! S'exclama Théo.

À peine avait-il finit de parler, qu'un agent de sécurité faisait irruption. Je me tournais vers lui, heureuse de voir enfin quelqu'un nous venir en aide.
Un bruit sourd résonnait, puis un cri s'en suivit. Je n'avais pas le temps de faire volte-face, que je me retrouvais bloquée dans les bras musclés et surtout très crispés de Hakim.
Il pressait sa main contre mes cheveux, alors que j'observais le regard de mes autres amis, sans comprendre ce qu'il venait de se passer ; puisqu'on ne m'avait pas laisser le choix d'y jeter un coup d'œil.
En deux temps, trois mouvements, je voyais l'agent de sécurité déguerpir du balcon, poussant plusieurs individus qui lui barraient le chemin. Mon regard se posait ensuite sur Mélanie, qui venait de plaquer ses deux mains sur sa bouche. Comme pour retenir un cri. Je fronçais les sourcils, sans comprendre.
Pourquoi cette réaction ?
Que venait-il de se passer, de l'autre côté pour que je puisse observer de telles réactions ?
Elles me semblaient toutes aussi démesurées les unes que les autres.
Mélanie ne clignait pas des yeux. On aurait dit qu'elle était pétrifiée sur place. Elle ne bougeait plus. La seule chose qui m'indiquait qu'elle était encore en vie, n'était autre que sa poitrine, qui se soulevait brusquement dans un mouvement irrégulier. Son coeur battait la chamade.

À présent, je m'arrêtais sur Théo. Ses yeux brillaient, chose extrêmement rare.
Mon coeur ratait un battement, l'heure était grave. Les traits de son visage étaient tous très tendus. On aurait dit qu'il venait de voir passer un fantôme. Lorsqu'il capait mon regard, il faisait demi-tour en regagnant l'intérieur de la salle.
Alors, désespérément, je tentais de faire le moindre geste. Mais Hakim resserrait son étreinte autour de moi ; ce qui commençait réellement à m'agacer.
Derrière lui, j'entendais Georges et Ken discuter :

— Elle ne doit pas savoir, oh mon dieu ! S'écria Georges sans pouvoir contrôler sa voix.

Je ne l'avais jamais sentit autant paniqué qu'en ce moment même. Je ne parvenais pas à voir son visage avec celui de Ken, puisqu'ils se trouvaient juste derrière l'imposante silhouette de Hakim.

— Elle ne doit pas voir ça ! Répéta Georges.

— Arrêtez putain ! M'écriais-je d'une colère que je ne connaissais pas. Lâche moi Hakim !

— Non ! Rétorqua-t-il fermement. Fais-moi confiance Charlie. Bordel c'est pour ton bien ! Crois-moi tu n'aimerais pas voir ça !

Mais je m'en foutais !
Je n'avais guère besoin que l'on veuille me protéger. Je n'avais besoin que de moi pour cela.
Alors, pas fière de ce que je m'apprêtais à faire, je balançais mon pied dans le genou de Hakim, qui fut contraint de me lâcher en jurant. J'étais vraiment désolée pour lui.

— Je suis navrée, murmurais-je rapidement tandis qu'il se repliait sur lui-même.

Je n'avais pas ménagé ma force et il venait d'en faire les frais. Il fallait que je m'extirpe de là avant qu'il ne me finisse. Je me retournais enfin, je ne voyais ni Léonard ni Idriss.
Je me précipitais aussitôt à l'intérieur de la boîte, tandis que Mel' aidait Hakim à se redresser en douceur. J'espère que ce dernier ne m'en voudrait pas trop. J'aurais quand même pu y aller moins fort.

Je descendais rapidement les marches, entendant la sirène des pompiers sonner. Devant le vestiaire, s'amassait une foule de personnes de tout âge confondu.

— Reculez ! S'exclama précipitamment le vigile.

J'arrivais à me frayer un chemin parmi tous ces gens aux visages floues. J'arrivais en première ligne.
Observant deux corps gisant sur le sol. Une grosse flaque de sang envahissait sur le goudron.

Deux corps.

Léonard et oh non !

Idriss.

Sans réfléchir, je me précipitais vers eux, malgré le fait que le vigile me hurlait de reculer, en attendant la venue des pompiers.
Mais qu'est-ce que j'en avais à foutre de leur venue ?
J'enjambais alors le corps de Léonard, observant son arme à feu à côté. C'était donc ça le bruit que je venais d'étendre quelques minutes avant que le drame n'est lieu. Le sang coulait de son corps. Mais je ne m'éternisais guère sur lui, me hâtant vers le garçon que j'aimais.
Je me penchais aussitôt vers lui, ses yeux mis-clos. Je détournais le regard, fixant le balcon, il avait chuté de six mètres environ, atterrissant le dos le premier à même le sol. Par dessus le balcon, j'observais une foule, et parmi eux, les visages de son frère, Georges et de Mélanie.
Je reportais mon regard vers le garçon que j'aimais, pleurant à chaudes larmes.

— Par pitié, dis moi que tu es vivant, susurrais-je en sanglotant.

〉𝑭𝒆́𝒍𝒊𝒏𝒔 𝒑𝒐𝒖𝒓 𝒍'𝒂𝒖𝒕𝒓𝒆 [𝑻𝒆𝒓𝒎𝒊𝒏𝒆́]〈Où les histoires vivent. Découvrez maintenant