Je suis dans ma chambre, réveillé. Je n'ai pas envie de descendre pourtant mon ventre crie de plus en plus fort sa faim. Je reste en boule dans mes draps, recroquevillé. Le froid extérieur m'assaille et ne m'incite pas à bouger d'ici.
Le bruit au rez-de-chaussée est tel qu'il arrive jusqu'à mes oreilles. Il m'enserre le coeur un peu plus chaque minute qui passe. Le personnel de la famille Cortesi, madame Rosa en premier, prépare la grande salle de réception pour le mariage qui aura lieu cet après-midi. À l'extérieur, une serre transparente est installée pour la cérémonie qui aura lieu face à la mer. Très peu d'invités sont prévus à la cérémonie et normalement, les adversaires ne devraient jamais pouvoir toucher au banquet après le mariage.
Le mariage. J'ai envie de déchirer mes draps, mes rideaux, de casser mon miroir, de balancer mes habits, d'éclater mes flacons de parfum. Imaginer Reina en robe de Mariee, tenant la main de Béné ne peut s'éviter mais ça me fait mal à la tête. Je décide finalement de me lever pour me changer les idées et faire face.Les escaliers sont décorés de roses noires, les grands lustres en cristal sont allumés, une grande table couverte d'une nappe crème est poussée contre un mur pour y installer un bouquet massif de fleurs noires et des chandeliers. Le personnel s'active pour déplacer les chaises dans la serre qui est dehors, la maison ressemble à une fourmilière. Je regarde autour de moi, j'ai l'impression d'être dans un cauchemar. Soudain, les cris étouffés et les sanglots de Giulia parviennent à mes oreilles. Je me retourne donc pour me diriger vers elle.
Giulia: Perque ?! Pourquoi ma fille se marie avec un homme comme lui ?
Moi: Giulia, ne pleurez pas.
Giulia: Je t'en supplie Cristiano sauves-la ! Sors la de là !Un éclair dans mon esprit m'interpelle : Et si elle ne savait pas ? Je l'attire dans un coin plus discret et plus à l'écart, toujours en posant mes mains sur ses coudes pour la soutenir.
Moi: Vous savez bien pourquoi Reina se marie avec Béné ?
Giulia: Ah pas ce nom ! Bien sûr que je le sais... mais c'est si dangereux. Et si c'était elle qui mourrait ?Ces questions sont celles d'une mère qui voit sa fille face à un destin meurtrier et sans issue. Giulia est la sicilienne par excellence, belle, mûre de par sa cinquantaine à peine avancée, accès sur sa famille et soucieuse pour sa fille. Je le prends amicalement dans mes bras pour atténuer ses pleurs. Moi aussi, j'ai peur de cette journée. Voir Béné en face de moi tenir la femme que je convoite et que je dois protéger, signer avec elle, voir leur combat à tous avec Reina au milieu.
Je m'éloigne de Giulia. Elle essuie son nez avec un mouchoir blanc. Elle me regarde à présent de la tête aux pieds.Giulia: Va te préparer maintenant, ils ne vont pas tarder. Et trouves la s'il te plaît, elle n'est pas encore habillée.
J'acquiesce d'un signe de tête et repars à l'étage. J'enfile doucement un costume bleu très foncé, me parfume et me coiffe. Une fois prêt, je sors de ma chambre avec une démarche ralentie. Les mains dans le poches, je pars à la recherche de Reina.
*******
Après avoir fouiller toutes les pièces, je l'ai enfin trouvée. Où ça ? Dans la salle du Conseil, assise sur le grand siège au bout de la large table en bois vernis où elle était assise il y'a quelque temps lorsque le conseil s'était réuni ici. Un pistolet dans la main droite, elle regarde dans le vague. Je pousse la porte et avance de quelques pas.
Moi: Ta mère te cherche.
Reina: Je sais.Je m'approche encore. Sa voix est calme, sans émotions mais je sens un certain étranglement. La voir tenir son arme me fait penser que ça fait quelques semaines à peine qu'elle m'a menacée avec pour la dernière fois.
Reina: Beretta 92 FS. Mon père me l'a offert le jour où j'ai prêté serment. Il en a vu des ennemis celui-là : c'était le sien avant. Aujourd'hui, il est à moi et je dois lui faire confiance.
Moi: Tu sais, on sera tous autour si tu as un problème...
Reina: Oui mais vous avez chacun une cible spécifique. Je serais seule face à Béné. Et je sais qu'il me sera fidèle.Dit-elle en montrant l'arme brillante du menton. Je m'approche encore plus et m'assois sur le siège à sa gauche puis pose ma main sur la sienne. Elle me regarde maintenant. Ses yeux m'effraient : ils sont noirs comme deux balles de pistolet qui volent jusqu'à leur cible. On voit dans son regard une détermination certaine, une colère spéciale et aucune autre émotion décelable.
Reina: Cristiano ?
Moi: Oui, je suis là.
Reina: Je ne veux pas que tu t'interposes entre lui et moi, quoi qu'il arrive. Tu as bien compris ?Je suis surpris par ses paroles, je ne m'attendais pas à ça et le fait qu'elle me mette à l'écart me déplaît.
Reina: Si tu désobéis, nous pourrions tous avoir de graves problèmes. Promets-moi.
Je soupire et resserre mes doigts autour des siens qui se laissent entourer sans bouger. Je réfléchis, est-ce que je suis capable de tenir cette promesse ? Est ce que mon tempérament ne me forcera pas à briser cela ?
Moi: Je te le promets.
Elle sourit froidement et serre le bout de mes doigts de sa petite main. Nos regards se perdent l'un dans l'autre. Le sien me transperce la mémoire.
Elle s'approche et dépose ses lèvres sur ma joue tendrement. Son bisou est différent d'un baiser mais tout aussi affriolant, même dans un moment pareil. Je prends son visage de la main droite pour le maintenir quelques secondes de plus contre ma peau.
Elle s'éloigne de mon visage et se relève doucement. Elle s'avance vers la sortie après avoir laisser sa main gauche glisser sur mes épaules.Reina: Tu viens ?
Je me relève et la rejoins. Nous nous dirigeons vers sa chambre, elle me permet d'entrer et enfile sa robe par dessus un ensemble de plaques rigides qu'elle a ficelées sur son corps. Son pistolet entre les seins et des lames dans ses cheveux, je me rassure un instant de la voir si bien équipée. Mais je repenses à Béné et doutes à nouveau. Elle passe maintenant sa robe et je l'aide à remonter la fermeture éclair.
La robe est blanche à manches longues, simple, sans brillants, sans fioritures, sans volants, sans dentelle. Puis le voile et le bouquet. La voir comme ça me rend encore plus en colère. Je l'attire vers moi et tiens sa tête avec une main appuyée derrière sa nuque. Son front contre le mien, je laisse sortir tout ce que j'ai envie de lui dire, sans retenue.Moi: Je rêve de ton corps la nuit et te voir dans cette tenue pour un autre que moi me rend fou. Je ne sais pas si je pourrais tenir ma promesse. Alors t'as intérêt à me revenir. Vivante.
Ma voix rauque témoigne de mon tempérament brut qui s'exprime, de la difficulté que j'ai à me contenir face à elle. Son regard se plante dans le mien un instant et elle se détache de ma prise ensuite. Elle sort de sa chambre après s'être retournée sur moi. Elle n'a rien dit et ses yeux ont parlé pour elle. Pas choquée, pas surprise mais incroyablement concentrée.

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Trono
Teen FictionRégner sur le monde, voilà ce que désire la moitié de la planète. Seulement quelques êtres sont capables d'accéder au trône. J'en fais parti, je suis née et j'ai été élevée pour ça. Je compte bien atteindre mon objectif malgré que ce soit dangereux...