Samedi 2 Mai 1998 :
La douleur était telle que je ne sentis pas les dégâts que ma lourde chute occasionna sur mon corps. J'entendis pourtant nettement un os se briser lorsque mes membres amortir maladroitement le choc avec le sol, mais l'élancement dans mon bras gauche n'était rien comparé à la sourde tyrannie qui faisait brûler la moindre parcelle de mon corps. Un Doloris n'aurait pas eu cet effet - telle fut l'unique pensée lucide qui se forma dans mon esprit avant que ce dernier, incapable de supporter un aussi grand flux de souffrance contractant mes muscles, se mît à errer hasardeusement dans les tréfonds de mon subconscient. Dès lors, la douleur s'atténua, mes sens se brouillèrent et je perdis la raison.
Une tempête d'images envahit mon cerveau qui, hagard, ne prit pas même la peine de les analyser. Tout était flou, un mélange de couleurs, de mouvements, informes, sans contours précis. C'était comme si une rafale de polaroïds moldus passait devant mes paupières sans jamais s'arrêter. Je distinguais des formes, peut-être était-ce des silhouettes humaines ? Du vert, de l'orange, tout se succédait, sans lien logique.
Et la douleur au loin qui continuait de m'assommer, de me couper du monde réel et qui obligeait mon esprit de se réfugier au tréfond de mon âme, loin de la réalité. Souffrance sans fin.
Mon corps avait disparu, j'étais seule avec mon esprit en peine. J'étais au bord d'un gouffre, du gouffre de la folie. Et il n'y avait personne pour retenir ma chute qui était inévitable. Solitude sans fin.
Puis...
-Professeur ? Professeur Lynch ?
Une voix, au loin, répétait toujours le même son. Un nom... mon nom. Mais elle était si loin et j'avais si mal. Avais-je la force de m'accrocher à cette voix ?
-Professeur Lynch !
L'appel était écorché de trémolos de panique, il me paraissait s'approcher... à moins que ce ne fut mon imagination qui me jouait des tours. Je n'en savais plus rien. Pourtant, cette idée que je n'étais pas seule, que, quelque part autour de moi, il y avait quelqu'un, un soutien, s'ancra dans mon esprit et déstabilisa mon subconscient qui, jusque-là, se laissait porter par la vague d'hébétement dans laquelle mon cerveau s'était réfugié.
De l'aide, il y avait de l'aide.
Soudain, je sentis mon corps bouger, l'on me secouait, des mains pressaient ma cage thoracique. Peu à peu, mes sens reprirent vie : de l'air rentra dans mes poumons qui acceuillirent difficilement cette effluve, ayant été un certain temps auparavant follement malmenés. Mes muscles, qui avaient cessé de tressauter à cause de la douleur, hurlèrent à mon cerveau de reprendre le contrôle et, à mesure que cela se fit, je sentis une douleur vive irradier mes membres, ainsi que ma poitrine - comme d'horribles courbatures qui paralysaient partiellement mes mouvements. Néanmoins, à côté de la souffrance à laquelle je fus confrontée il y avait peu, mon corps encaissa le coup sans broncher. Mon cerveau se battait sur tous les fronts pour me reconduire jusqu'au monde réel, via un chemin sinueux qui m'éloignait peu à peu de mon subconscient, peu à peu de cette folie, de ce gouffre aux pierres acérées...
-Nom d'un Murlap, elle est en vie ! Les gars, elle est en vie ! Professeur Lynch ! Professeur Lynch, vous m'entendez ?
Je clignai des yeux, plusieurs fois.
-Ne... ville ?
Ma voix n'était qu'un murmure rauque et le simple fait de prononcer un mot causa un élancement désagréable le long de mes cordes vocales.
Se passa alors une chose vraiment surprenante : la douleur sembla tout à coup se dissiper de mon corps, comme un gaz laissé dans un flacon ouvert qui s'évaporerait nonchalamment pour ensuite laisser le récipient vide, sans trace de sa présence.
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The Dove & The Crow [Harry Potter]
Fanfiction"On m'a dit de vous prévenir que le seul moyen de vaincre sera d'unir le corbeau et la colombe." ••• Deux sorciers talentueux, à la fois si semblables et opposés. Deux destins liés, pour le meilleur comme pour le pire. Deux magies entremêlées, dont...