Chapitre 12. Roxanne

504 48 1
                                    

— Qu'est-ce qu'elle fabrique ? Bon sang Roxy, tu ne peux pas la laisser partir avec cet inconnu, c'est de l'inconscience. Elle connaît ce type depuis quelques minutes et le suit les yeux fermés. S'insurge ma sœur qui me dévisage comme si j'avais un troisième œil sur le front. Son imprudence lui jouera des tours, tôt ou tard elle tombera sur un psychopathe qui lui fera du mal. Tu ne diras pas que je ne t'avais pas prévenue.

— Stop !!! Crié-je, en portant ma main sur la bouche de Mary afin qu'elle cesse de déblatérer sur le dos de ma meilleure amie. Je retire mes doigts si tu promets de m'écouter sans me couper la parole. Ma sœur hoche la tête pour me signifier qu'elle se résigne à fermer son clapet, alors comme promis je libère sa bouche et reprends mon monologue. Barbara est une grande fille, elle sait ce qu'elle fait ne t'en fais pas. Je sais qu'elle peut te paraître un peu trop téméraire, mais elle ne prendra aucun risque en suivant ce gars. Je la connais assez pour savoir qu'elle a jaugé la situation avant de se jeter dans la gueule du loup. 

— Tu as peut-être raison, n'empêche qu'elle est cinglée ta copine. Enfin, tant qu'elle restera dans les parages, je suppose qu'il ne pourra rien lui arriver.

— Mis à part se faire choper en train de se faire culbuter dans un coin par quelques voyeurs, effectivement je suis de ton avis et pense qu'elle ne risque pas grand-chose. Me moqué-je en sirotant mon cocktail.

— C'est impossible de toute façon qu'elle se fasse surprendre, tu voudrais qu'elle aille où, les lieux sont bondés.

— Euh Mary, tu viens de quelle planète !? Dis-moi, tu ne connaitrais pas à tout hasard un endroit public puant, repoussant et dégoûtant ?

— Ne me dis pas qu'elle serait capable de s'envoyer en l'air dans les toilettes.

— Si, malheureusement. Enfin tu connais Barbara, rien ne l'arrête. Ce n'est pas des odeurs nauséabondes qui l'empêcheront de s'envoyer en l'air.

Les yeux de Mary s'écarquillent tandis que sa bouche s'entrouvre sans émettre le moindre son. La voir choquer par le comportement de mon amie me faire rire, je pourrais en rajouter une couche, cependant je préfère m'abstenir avant qu'elle tape l'arrêt cardiaque.

Mon aînée n'a jamais compris l'attitude que Barbara a vis-à-vis des hommes, et pourtant c'est d'une simplicité, pas besoin de s'appeler Einstein pour comprendre comment elle fonctionne avec la gent masculine. Ma meilleure amie aime les sorties, les beaux mecs, mais surtout le sexe. Elle a pour philosophie qu'il faut goûter plusieurs fois avant de trouver le bon cru. Pour faire simple et pour ne pas rentrer dans les détails concernant ce mode de vie, je dirais simplement qu'elle profite de sa jeunesse et explore sa sexualité sans aucune honte. Parfois, je l'envie. J'aimerai être comme elle, courageuse, fougueuse, insouciante, hélas une partie de moi se le refuse, car je ne conçois pas le sexe sans sentiments. Je n'adhère pas à la pratique du plan-cul, j'ai besoin de plus pour aller plus loin avec un homme. Je devrais pourtant y songer plus sérieusement, puisqu'une araignée s'est amusée à tisser sa toile entre mes cuisses.
Satané bestiole !
Je vais avoir besoin d'un dépoussiérage d'ici peu si je ne veux pas retrouver ma virginité. Je ne sais plus de quand date mon dernier rapport, mais d'aussi loin que je m'en souvienne ça fait un bail.

— Sérieusement Roxanne, c'est dégradant de faire des cochonneries dans un cabinet de toilette. On ne peut pas la laisser faire cette connerie, c'est une fille respectable tout de même. Elle pourrait choper tous un tas de saloperies, j'en suis malade, ça me rend folle. Je vais lui en toucher un mot puisque toi tu t'en moques. M'enguirlande ma frangine qui s'apprête à quitter la table lorsque son téléphone se met à sonner.
Encore ce pauvre Paul qui tente de la joindre. Depuis qu'elle s'est réfugiée à la maison en pleurs en tout début de soirée, il n'a cessé d'essayer de l'appeler. Or, Mary la garce refuse de prendre les communications. Je peux comprendre qu'elle soit attristée par la réaction de son mari, cependant une partie de moi pense qu'il n'a pas tout à fait tort. Les deux bossent énormément, leur fils d'ailleurs ne les voit que très peu et puis ajoutons à cela qu'ils approchent de la quarantaine, ce qui laisse à réfléchir. Enfin, je ne souhaite prendre parti pour personne. C'est à eux de trouver une solution et fissa parce qu'une Mary déprimée, c'est vraiment compliqué à gérer. Ce soir, je joue le rôle de la "grande" sœur même si techniquement je ne le suis pas, mais en tant que cadette je tente par tous les moyens de lui changer les idées en la faisant boire et danser pour qu'elle oublie l'espace d'une soirée tous ses soucis.

— Tu ne veux toujours pas répondre, il doit être inquiet.

— Non ! Qu'il cogite un peu ça lui fera les pieds. J'ai fini mon verre, tu en veux un autre ? Me propose-t-elle pour faire diversion.

— Ouais, ramène-moi un autre cocktail, ce soir on fait la fête.

— Toi, tu vas te taper la gueule de bois pour aller bosser demain matin. Père va te le faire regretter Roxy.

— Tu sais quoi Mary, je m'en fous. Pour une fois, l'entreprise tournera sans moi ! Je prends un jour de congés que ça plaise ou non à notre cher papa !

— Trouve une excuse valable, sinon il va envoyer mère pour qu'elle te débusque du lit.

— Même pas peur, je simulerai un problème de transit, une indigestion tiens ! Je lui dirai que j'ai mangé des sushis et que le poisson ne devait pas être frais.

— Pourvu que ça marche... dit-elle en croisant les doigts.

Nous éclatons de rire, parce que nous savons pertinemment qu'elle ne tombera pas dans le piège. Je vais me faire griller à coup sûr. Elle sait à quoi je ressemble un lendemain de cuite et j'admets que ce n'est pas beau à voir. Premièrement, je traine en pyjama, deuxièmement j'ai mal au crâne et pour finir je lâche la galette à la moindre odeur qui me chatouille les narines.

Je repère Barbara au loin tout sourire qui revient en notre direction avec son bel étalon et un homme qui ne m'est pas inconnu, loin de là puisqu'il hante mes pensées depuis une semaine.

— Merde ! Pesté-je à voix basse.
Qu'est-ce qu'il fiche ici celui-là ?

Pourvu que Barbara tienne sa langue et qu'elle ne balance pas à Mary que Léo n'est pas un ami, mais qu'il s'agit d'un Escort. Elle va me pourrir si elle découvre la vérité, j'en suis certaine !
Le compte à rebours a commencé, mon cœur palpite à toute vitesse, un rodéo se joue dans mes entrailles, je gesticule dans mon fauteuil et tente de faire comme si de rien n'était lorsqu'ils se dressent devant nous.

— Rox, regarde qui j'ai trouvé. Tu ne devineras jamais... il s'avère que Léo est collègue avec West. Le monde est petit, n'est-ce pas !?

— Effectivement, bafouillé-je mal à l'aise.
— Ah quelle bonne surprise ! Se réjouit Mary. Vous prendrez bien un verre avec nous, j'allais commander une autre tournée. Et ne dites pas non...c'est moi qui offre.

West prend place sur un fauteuil et Barbara s'installe sur les genoux comme si cela était normal. J'assiste au spectacle qu'ils nous offrent, un jeu de langue dans toute sa splendeur. Je suis certaine que je me penche un peu plus sur la droite, je verrai leurs amygdales de plus près. Malheureusement ma curiosité me ferait vilain défaut, puisque Léo se trouve à mes côtés et que si dévie ne serait-ce que d'un centimètre, je serai collée au beau mâle qui affole mes sens tant son parfum si masculin me titille le nez.

Mary accoure au comptoir pour commander des boissons, je ne pipe mot, mais je suis bien consciente qu'elle picole beaucoup trop. Cependant je la laisse étancher sa soif puisque cela lui permet d'oublier ces problèmes de couple.

— Ils vont finir par s'étouffer, se moque gentiment Léo.

— Pardon ? Je n'ai pas entendu ce que vous avez dit avec tout ce boucan.

— Je disais que nos amis communs vont finir par être sous assistance respiratoire s'ils continuent de se becqueter les lèvres comme ils le font.

Gênée par l'échange salivaire que Barbara et West s'échangent, j'entame la conversation avec Léo.

— Alors comme ça, le jeune homme qui bouffe la bouche de ma meilleure amie est Escort lui aussi ? Dites-moi, est ce qu'elle sera facturée pour ses prestations ou il lui fera une prestation gratuite ?

— Des gigolos !? S'insurge Mary outrée par mes propos.
Malheureusement je ne l'ai pas vu revenir et mes propos ont sifflés jusqu'à ses oreilles. Il faut dire que j'étais tellement absorbée à reluquer l'apollon qui me tient compagnie que je n'ai pas fait attention au retour de ma sœur.

— Tu veux dire qu'ils se prostituent !? Oh mon Dieu ! Roxanne Harper, explique-moi de suite ce que c'est que ce bordel ! Enrage-t-elle en plantant ses iris noirs dans les miennes.

Je tente de l'amadouer avec ma tête de chien battu, hélas cela ne fonctionne pas.
Je bafouille que je lui expliquerai demain et que toute cette histoire la fera rire.

— Tu peux toujours essayer, mais j'émets de sérieux doutes Roxy. Alors crache de suite le morceau. Profites-en je suis un peu pompette, la pilule sera sûrement plus facile à encaisser.

— Eh bien, tu sais pour le gala...

Sauver par le gong, le téléphone de Mary sonne à nouveau. Décidément Paul ne lâche pas l'affaire et je l'en remercie.

— Réponds-lui qu'il nous fiche la paix ! Grogne Barbara qui s'est enfin détachée de la sangsue. Tu vois pourquoi être casé c'est la merde ! On est continuellement en désaccord, toujours à rendre des comptes, autant rester célibataire. Ça ne sert à rien de s'emmerder avec un mec. Il y en a trop sur terre pour se faire chier avec un seul toute sa vie.

— Tu ne diras plus ça quand tu trouveras le bon. Mais je voudrais savoir ce que cela te procure de baiser chaque soir avec un homme différent sans pouvoir t'endormir dans ses bras.

— Tu devrais le savoir, il me semble que tu n'étais pas une sainte avant que tu rencontres ton mari. Balance sèchement Barbara.

— Oh j'adore cette chanson ! Hurlé-je pour changer de sujet de conversation.

— Va danser dans ce cas et laisse-nous discuter. La conversation risque d'être très intéressante. Ricane ma meilleure amie.

Celle-ci se tourne vers Léo avec un énorme sourire sur le visage, et là je sens le coup foireux arriver à des kilomètres.

— Léo, tu ne voudrais pas faire bouger Roxanne ? Son cul est énorme à force de rester inactif.

— N'importe quoi ! Il est bien mon popotin. Parle pour toi, tu as les fesses aussi gonflées que celles de Kim Kardashian.

— Et tu sais pourquoi ? Dit-elle en haussant ses sourcils.

— Noooon !!! Ne dis rien, la menace Mary avec sa paille, ce qui m'amuse évidemment. Tu parles toujours de sexe, tu n'en as pas marre à la fin !

— Pffff ! Vieille fille. Arrête de faire la prude, tu devrais écouter et en prendre de la graine. Un conseil ma chérie, retire ta culotte, présente ton postérieur à ton homme et tu verras qu'il te le fera ton marmot.

— Barbara ! Arrête, tu vas trop loin. M'emporté-je à mon tour.
— Vous êtes chiantes toutes les deux ! Tu viens West, on va s'amuser ailleurs, ici on s'encroûte.

Ma sœur inspecte son téléphone lorsqu'il résonne de nouveau. Elle se retient de prendre l'appel et pourtant je vois dans son regard qu'elle en meurt d'envie.

— Tu crois que je devrais faire ma délurée avec Paul ? Me questionne-t-elle d'un air tristounet.

— Je n'en sais rien. Tu as deux options Mary. Discute avec lui et fais le grimper au rideau ou mieux, baise avant et parle après.

— Ok, tu as raison. Je vais rentrer avant d'être trop bourrée. Mais avant, je vais aller jeter ma fichue culotte à la poubelle. Tu vas voir si je suis coincée. Léo, je vous confie ma petite sœur. Pas de bêtise et toi Roxy, je ne t'oublie pas, demain on aura une longue discussion.

Je n'ai pas le temps d'ajouter le moindre mot qu'elle disparaît me laissant seule avec le bellâtre qui met mes sens en alerte. Nous restons attablés comme deux imbéciles devant nos verres, je n'ose le regarder et n'arrive plus à ouvrir la bouche.

— Ça vous dirait d'aller sur la piste ? Je suis un excellent danseur comme vous avez déjà pu le remarquer.

Exact, il a un déhanché de dingue qui rendrait folle n'importe quelles filles, mais je vais feindre l'ignorance.

— J'ai oublié, montrez-moi de nouveau... Le provoqué-je en réajustant mon décolleté.
— Cette fois, vous vous en souviendrez... Me chuchote-t-il à l'oreille.

Bordel, sa voix est juste un supplice. Comment vais-je faire pour résister à la tentation ?
Ma main repose sur la sienne, nos doigts s'entremêlent, puis je le laisse me guider sur la piste de danse. Je suis à la fois excitée et apeurée de sentir son corps contre le mien. Ce mec m'hypnotise, pourtant je ne dois pas céder à mes impulsions puisqu'il est Escort. C'est fort dommage que cet individu ne soit pas monsieur tout le monde. Le genre de gars qui bosse dix heures par jour derrière un bureau. Malheureusement, il a fallu que je tombe sur un mec qui vend ses prestations sexuelles. Je ne dois pas m'enticher de lui, je me ferai beaucoup de mal inutilement. Léo me tient fermement par la taille, mes mains s'enroulent autour de son cou, nos yeux se font face, ma respiration se fait difficile. Je détaille ses lèvres que je voudrais tant embrasser. Je dois me reprendre, mais l'effet de l'alcool m'en empêche. Je me sens courageuse ce soir, j'ai envie de partir à l'aventure avec lui quoi qu'il m'en coûte. Ses mains m'effleurent, me caressent, puis dessinent des cercles sur mes reins. Nos corps sont proches, très proches, et je distingue son érection grandissante sur mon ventre. Je ne retiens pas le halètement qui s'échappe de ma bouche. Léo a le regard noir de désir, j'approche mes lippes des siennes, je me sens conquérante, vaillante, sauf qu'il détourne son visage et vient plonger sa bouche dans mon cou. Ses lèvres gourmandes embrassent ma peau, sa langue humide et chaude suçote le lobe de mon oreille, je ferme les yeux et me délecte de ses sensations de plaisir qui réveillent mon bas-ventre. Mes mains lâchent sa nuque, elles parcourent son corps sans gêne. Je passe ma paume sur son sexe extrêmement dressé sous son pantalon, et j'ose à cet instant le caresser sans me soucier des conséquences. Léo continue son ascension dans mon cou, il déplace ses lèvres mouillées sur le renflement de ma poitrine, je halète et rejette la tête en arrière. À ce moment précis, je n'ai qu'une seule envie, quitter les lieux et me faire prendre sans attendre. L'alcool a un effet libérateur sur ma personne, je me lâche, ne me reconnais pas et ne pense plus à rien sauf à mon plaisir. Je me fous du lendemain, des regrets, des remords. Ce que je désire là maintenant, c'est faire l'amour avec lui et pour cela je compte bien lui en faire part.

— Allons ailleurs Léo.

De longues secondes défilent avant qu'il daigne me regarder. Ses billes vertes m'hypnotisent, sa bouche magnifiquement dessinée me captive. Sa chaleur et sa proximité me liquéfient. Je suis à deux doigts de faire une énorme connerie et pourtant à cet instant je m'en contrefiche. Je veux sentir ses mains sur mon corps, ses lèvres sur ma peau, hélas rien ne se passe. Léo ferme les yeux, inspire profondément et à ce moment précis, je comprends que le combat qu'il mène ne me dit rien qui vaille. Ses prunelles noircies par le désir me font croire qu'il y a sûrement une toute petite chance... seulement la sentence tombe, sa réponse est sans appel et me glace le sang. Mon ardeur redescend aussi vite qu'elle était montée, puisque Léo vient tout bonnement de me mettre un sacré vent en me repoussant.

The soul of desireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant