Chapitre 7. Léo

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L'attente demeurant insoutenable, je ferme le clapet de l'ordinateur avec hargne puis repars une fois de plus dans le salon m'écraser comme une merde sur le canapé. Ma tête repose sur l'accoudoir, mes jambes ballotent à l'autre extrémité alors que mon regard se perd dans le vide abyssal que m'offre la blancheur du plafond. Le silence me pèse et me rend dingue, pas une mouche pour venir bourdonner à mon oreille. J'en viens à marmonner des jurons dans ma barbe et peste contre cette fichue gonzesse qui ne donne plus signe de vie. Trois heures se sont écoulées depuis que je l'ai informée de ma disponibilité, mais elle n'a pas répondu à mon mail. Peut-être a-t-elle trouvé quelqu'un pour l'accompagner à son gala finalement ? Cependant par politesse, elle aurait pu m'avertir qu'elle n'avait plus besoin de mes services. Je ne serai pas là à errer comme un con à travers les pièces de la maison à attendre qu'elle me donne de ses nouvelles. Le week-end va être d'un ennui si je ne trouve rien à faire et tout ceci est de la faute du flageolet. Je grogne en repensant à la pisseuse qui a bousillé mes projets. Je maudis cette femme et la cuvée de pinard qu'elle a ingurgitée puisque tout est partie de là. Adieu week-end détente, place à la morosité pour les deux prochains jours pensais-je dépité. Je vérifie une fois de plus l'heure que m'indique ma montre et souffle d'exaspération en constatant que seulement cinq minutes se sont écoulées depuis la vérification de ma messagerie. Je me redresse d'un bon et me précipite à la cuisine pour récupérer mon téléphone qui braille une sonnerie assourdissante à m'en faire péter les tympans. Je saisis le perturbateur, grimace quand je lis le prénom de mon frère sur l'écran puis le repose sur la table sans daigner répondre à son appel. J'étais déjà bien tendu avant ce coup de fil, mais là, c'est bien pire... J'enrage. J'attrape une canette de soda dans le frigo, la décapsule et l'avale d'un trait avant de repartir dans mon fief. M'accoudant sur le bureau, je relève le clapet de l'ordinateur et le rallume dans l'espoir de découvrir un foutu message. Mon vœu est exaucé, un mail de miss Roxanne clignote. Je suis anxieux à l'idée de lire sa réponse, c'est pathétique de réagir ainsi, jamais auparavant je n'avais eu cette réaction. Je clique de mes doigts tremblants sur le mail et débute ma lecture. Une émotion nouvelle s'immisce en moi, je ressens un immense soulagement lorsqu'elle m'informe qu'elle a toujours besoin de moi. Par contre, je tique un peu en vérifiant l'heure du rendez-vous et le lieu de sa résidence. Il me reste à peine deux heures pour me préparer, aller la récupérer dans sa campagne et l'amener au gala. Je tapote sur les touches et confirme ma présence. Je fanfaronne puisque je vais empocher la modique somme de vingt mille dollars et j'ai enfin un projet pour la soirée. Je ne me voyais pas être au lit à huit heures un samedi soir et encore moins y être seul.

Je sifflote et chantonne gaiement comme un pinçon en me rendant à la salle de bain afin de me doucher. Je n'ai pas de temps à perdre, alors je me savonne efficacement de la tête aux pieds et me rince sans trop m'attarder sous le jet d'eau chaude. Etant parfaitement essuyé, je me rends nu dans mon dressing afin de choisir la tenue exigée par la cliente. Dans son mail, elle m'indiquait qu'un dress-code était imposé, et que je devais porter un costume et un nœud papillon afin de l'accompagner puisque sa mère exigeait cette tenue. J'en rigole et me dis que sa vie ne doit pas être rose tous les jours avec une génitrice pareille. Petite inspection dans le miroir avant de partir, je suis à tomber dans mon costume Armani qui me scille le corps à la perfection. J'arrange mes cheveux avec un peu de gel, parfume ma peau d'une note ambrée et sors du dressing satisfait comme jamais.

Je récupère les clés du coupé sport, mon portefeuille et quitte la maison avec un peu d'avance sur le temps que je m'étais imparti. Comme tout bon gentleman, je passe chez le fleuriste acheter un bouquet afin de l'offrir à ma cliente pour la flatter. En réalité ce n'est pas que pour ça. Silencieusement, je la remercie de me sortir de ma solitude ce soir. J'entre l'adresse dans le GPS, trois quarts d'heures me sont nécessaire pour sortir de la ville afin de rejoindre sa demeure. Comme je ne supporte pas le retard, j'appuie sur le champignon afin d'accélérer ma course. Les chemins de campagne sont déserts je ne croise pas une seule voiture et ne voit aucune habitation dans le coin. Je me demande si elle ne sait pas tromper dans l'adresse qu'elle m'a fournie ou si c'est moi qui ai loupé sa maison faute d'inattention. Je tourne en rond dans ce patelin où seule la verdure prône et repère finalement une vieille baraque en bois au bord de la ruine. Je me stationne devant afin d'aller demander mon chemin puisque le GPS me fait défaut et ne m'est d'aucune utilité dans ce trou perdu. Je sors du véhicule pas vraiment rassuré. On ne sait jamais, peut-être qu'un fermier me recevra en me plombant le cul avec son fusil pour avoir osé fouler ses terres sans son accord. Je cogne à la porte et me recule par sécurité sauf que personne ne vient m'ouvrir. Je réitère les coups et attends quelques instants, je me dis que c'est peut-être une personne âgée qui occupe les lieux et qu'elle a du mal à se déplacer. Mais finalement quand la porte s'ouvre, je reste bouche bée quand j'aperçois cette divinité. Se tient devant moi une créature sublime, brune aux yeux émeraude, une robe rouge incandescente qui épouse ses formes à la perfection. Un décolleté qui me fait loucher et sûrement rougir autant que son fourreau de soie. J'en deviens carrément muet, aucun son ne sort de ma bouche, j'essaie tant bien que mal de reprendre contenance mais je n'y arrive pas, je suis littéralement subjugué. C'est finalement elle qui brise le silence en bredouillant quelques politesses.

The soul of desireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant