Chapitre 29

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Le matin s'est levé depuis maintenant une heure et quelques. L'air de l'extérieur semble fraîche, quelques végétations sont recouvertes de givre. La nature reste quelque chose d'intéressante à regarder. Le givre fond doucement, lentement, sous les rayons du soleil qui le traversent. Du brouillard s'installe en arrière plan, faisant à moitié disparaître les immeubles plus loin, ainsi que quelques arbres qui décorent les rues. Je regarde ce spectacle, se trouvant devant la fenêtre encore plusieurs minutes, avant de me décider à me redresser. Je pars vers le miroir et me regarde. Je soupire légèrement, mon gilet est fichu, ainsi que mon pull. Ces derniers ayant été impactés par plusieurs attaques. Alors que je regarde l'état de mes vêtements, presque en lambeau, j'entends la fenêtre se faire impacter. Je tourne mon regard vers celle-ci, tout en m'approchant. Mon visage à quelques centimètres du verre, j'aperçois des minuscules gouttes d'eau atterrir contre la matière transparente. Et dire que je voyais le soleil il y a de cela une dizaine de minutes. Néanmoins, la présence de la pluie ne me déplaît pas.

Je me retourne et ferme la porte à clé derrière moi. Parapluie déployé à la main, je pars en direction de la forêt, à pieds, comme toujours. Pendant le trajet, j'évite de mettre les pieds en plein dans les flaques d'eau, ne voulant pas me retrouver les pieds mouillés, même s'ils vont certainement finir comme ça, avec de la boue en plus. Peut-être que la pluie n'était pas une si bonne idée au final. Je continue de marcher, défilant les rues sans vraiment y prêter attention, connaissant presque la route par coeur. Je regarde les quelques passants passer, leur regard perdu.

Alors que mes pensées s'égarent pour tout et n'importe quoi, je quitte bientôt la route pour de l'herbe, totalement mouillées par la pluie soudaine. Mais je n'y prête toujours pas attention.

Le temps semble passer rapidement de mon point de vue. Il me semble encore être dans les rues citadines il y a encore une minute de cela, et me voilà maintenant à l'entrée de la forêt. J'observe les alentours, vérifiant une quelconque silhouette suspecte, puis je m'aventure enfin dans cette forêt qui me faisait de l'oeil depuis déjà longtemps. J'inspecte les arbres. Personne en vue. Je n'entends presque plus la pluie, les feuilles rattrapent les gouttes dans leur tombée. Je ferme donc le parapluie, ne me servant plus à grand chose pour le moment. Après encore quelques instants de marche, je m'arrête, me trouvant dans un périmètre où il y a plus d'espace sans arbres collés entre eux. L'espace est assez grand, me satisfaisant. Je pose mon parapluie au sol, ainsi que mon sac, y contenant des provisions pour la journée. Je me mets droite et j'inspire un grand coup. Je vais enfin pouvoir m'entraîner.

Mes genoux cèdent, tombants à terre, la boue salissant mes vêtements, plus qu'ils ne le sont déjà. J'inspire et expire bruyamment, ayant du mal à me contenir. Les yeux rivés sur le sol boueux. La rage coulant dans mes veines. Pourquoi je n'y arrive pas ! Mes sourcils froncés, les veines gonflantes, les mains enfoncées dans le terre mouillée. Des douleurs apparaissent rapidement tout le long de mes jambes, ainsi que les bras. Mais je ne les sens même pas, la colère m'aveuglant, face à mon incapacité de réussir. Je me relève comme je le peux, ayant beaucoup de difficultés néanmoins. Je me repositionne sur mes deux pieds, totalement engourdis. Je regarde ma cible, quinze mètres devant moi.

J'avance un pas, je glisse sur la boue, mais je me rattrape de justesse, je commence à courir vite, fonçant droit sur la cible. Je ne fixe que ça, les yeux rouges de colère. Je vais y arriver ! Je cours, les courbatures faisant surface après des heures. Mais je ne m'arrête pas pour autant. Je continue malgré moi. Mes pas s'enfoncent toujours un peu plus dans la terre, m'ajoutant quelques difficultés dans ma course, mais je ne perds pas d'endurance. J'arrive vers la cible, se trouvant maintenant à cinq mètres de moi. Sous un coup d'élan, je saute, je pivote légèrement, et je fais apparaître quelques couteaux de couleur sang. Je les envoie dans la cible, les lames se plantant dans le tronc d'arbre. Mais mes yeux sont fixés sur l'arbre, ne prévoyant donc pas le tronc devant moi qui me percute violemment, me faisant gémir de douleur. Je tombe à la ramasse, en plein dans la boue, une nouvelle fois. J'arrive néanmoins à endurer le choc. Mais mes jambes semblent en coton, n'arrivant plus à les bouger pendant quelques instants.

Je tape du poing au sol. Encore la même erreur ! Je crie de frustration, sachant pertinemment qu'il n'y a aucun être humain dans les alentours, pouvant donc me lâcher. Je continue de cracher toute la colère et mon incompétence. Je me calme après plusieurs minutes, puis je me redresse pour m'asseoir. Je souffle, plusieurs fois. Je reprends mon calme, puis je décide de me lever après ma petite crise. J'avance, puis me poste devant le tronc, ce dernier étant jonché de multiples couteaux, n'ayant été épargné. Je lève mon regard au ciel, que je peux apercevoir à travers les feuilles d'arbres. Le ciel s'est assombri depuis mon arrivée. Le ciel étant bleu foncé, signe que la nuit se pointe. La pluie a arrêté de tomber pendant la journée.

Je vais vers mon sac, le prenant. Je me retourne une dernière fois, regardant le tronc, je fais disparaître les couteaux, puis je lui fais dos, commençant à partir de la forêt. Je n'ai croisé absolument personne. Je souris, malgré ma frustration d'il y a peu, mon entraînement est loin d'être terminé, mais je sais d'avance qu'il portera ses fruits un moment ou un autre. Je marche dans le silence, sans parler. Le vent commence à se lever doucement, caressant mes cheveux sales. En rentrant, je vais devoir prendre une bonne et longue douche pour m'enlever toute cette crasse. J'entends au loin les feuilles crisser sous le vent levant.

J'arrive à la ville, marchant entre les bâtiments. Les lampadaires sont allumés, m'éclairant la route. J'observe les alentours, comme d'habitude. Je ne croise qu'une ou deux personnes, ces derniers me jugeant de haut en bas, suite à ma tenue, surtout à toute cette boue que j'ai. Mais je n'y prête pas attention, voulant seulement rentrer et me laver, suite à cette journée bien épuisante.

J'insère la clé dans la serrure, la tourne, et ouvre la porte. Je rentre, et jette mon sac à dos au sol, épuisée. Je me déchausse et ne perds pas plus de temps, filant directement à la salle de bain. Mes vêtements atterrissent dans le lave-linge, avant d'être enclanché. Je prends le temps d'enlever toute cette boue qui me colle depuis des heures d'entraînements. Je me détends sous les gouttes d'eau qui coule le long de mon corps. Je ferme les yeux, pensant soudainement à lundi qui changera toute ma routine. L'école. Cet établissement d'éducation. Cela me semble si loin depuis la fois où j'étais à l'école. Et ça fait réellement longtemps. Je ne sais même pas comment se comporter. Je vais juste essayer de me faire discrète. Serais-je dans la même classe que Séléna ? Peu importe. Je dois juste être présente, je ne vais pas perdre mon temps à étudier, faire mes devoirs et autres.

Je saute au centre du lit, ce dernier m'ayant manqué. Sa douceur, l'odeur propre des draps, ses coussins si moelleux. A peine ai-je plongée dans cette douceur que je m'endors déjà. Je ne perds pas plus de temps, je m'engouffre sous cette épaisse couette, me protégeant du froid qui s'installe au fur et à mesure des jours. Le sommeil se pointe déjà, le laissant m'emporter, volontiers.

Encore cette surface dure. J'ouvre directement les yeux et me redresse, comme habituée à ce genre de rêve. Encore cette forêt en feu. Vais-je revoir la scène de combat ? Ce squelette ? Je ne me pose pas plus de question et marche dans la forêt. Cette dernière et totalement plongée dans l'ambiance apocalyptique. Des cendres volant dans l'air, des flammes embrasant des milliers d'arbres, de la fumée s'insérant dans mes paumons, me faisant légèrement toussoter. Je marche. Je m'arrête. Les yeux grands ouverts, je regarde cette scène d'horreur, sans bouger. Des humains et des monstres. Tous au sol, des flaques de sang les recouvrant, du sang partout. Aucun vivant parmi ce tas. Mes yeux montent et tombent sur une silhouette sombre au loin. Sans savoir pourquoi, je me mets à courir après elle.

La silhouette disparait sous la fumée, je m'arrête. Puis, j'ai l'impression qu'une forme bouge derrière ce mur gris. Alors que je plisse les yeux, un os me fonce droit dessus, m'embrochant directement le coeur. Je tombe en arrière. Je crache du sang. Je veux crier de douleur, mais rien ne sort. Mes paupières deviennent lourdes, tombant devant mes yeux. J'essaye de rester éveillée, mais toute force me quitte. Ma tête tombant sur le sol. La silhouette semble s'approchant de moi. Un squelette. Le même que dans mon précédent rêve. Avant que je ne sombre, j'articule seulement un mot.

- Enfoiré...

[REECRITURE] Ame de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant