Chapitre 68

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Je m'avance vers ce monstre, toujours inactif. Pourquoi est-ce ici ? Que suis-je censée comprendre ? Mes pas sont lents, s'enfonçant dans l'herbe naissante. L'obscurité est toujours présente, mais moins que les précédentes minutes. En m'approchant, je me rends compte à quel point il est grand, et à quel point je ne suis pas de taille si un combat commencerait subitement.

L'âme qu'il détient virevolte dans sa cage thoracique. Tandis que cette chose géante ne bouge pas d'un poil, il reste immobile comme une statue. Il doit faire au moins vingt têtes de plus que moi. c'est limite effrayant.

- Mais qu'est-ce que tu es donc ?

Je ne peux m'empêcher de parler à voix haute. Même si je reste sur mes gardes et que je sois un peu effrayée que cette chose me saute dessus à tout moment, ma curiosité ne peut s'empêcher de faire surface. j'arrive enfin à quelques mètres de lui, les raptissant toujours plus. Il n'a toujours pas bougé d'un pouce. Je continue sur ma lancée jusqu'à finir par m'arrêter, me trouvant à trois mètres de lui. Son âme semble toujours apaisée, bougeant de haut en bas dans ce trou béant que porte ce monstre.

- Vous osez m'appeler "monstre" alors que je vous appartiens?

Je me fige aussitôt. La voix résonne dans ma tête. Qui est-ce ? Je pensais être seule ? Je lève mes yeux vers lui. "M'appeler" ? Est-ce... Lui qui a parlé ? Je regarde autour de moi. Personne à part nous deux.

- C'est légèrement cruel quand même, vous ne pensez pas ?

Encore la voix. Mes yeux retournent de nouveau sur lui. Ses yeux sont ouverts, me scrutant de toute ma hauteur. Puis, il pivote doucement sa tête sur sa droite.

- Dans mes souvenirs, vous étiez plus grande.

Est-ce vraiment lui qui parle ? Pourtant, je m'aperçois qu'il n'est pas muni d'une quelconque bouche pour en faire sortir un son, même un souffle. Puis, il bouge de nouveau, fermant ses yeux, avant de les rouvrir quelques secondes après.

- Je ne peux pas parler, c'est vrai. Mais n'avez-vous pas remarqué la résonnance dans votre esprit ? Je parle par ce moyen de communication. Comme quand vous le faisiez autrefois avec votre soeur, mais en rêve. Ca fonctionne pareil.

Je reste immobile, n'osant bougé. Je suis dans un rêve, du calme. Je ne peux pas mourir dans un rêve. Soudain, je l'observe, ce dernier fermant de nouveau ses yeux, mais cette fois-ci, d'une manière amusée.

- Oh rassurez-vous, je ne compte pas vous tuer. Après tout, ce n'est pas comme si vous pouviez mourir.

Juste après avoir émit cette phrase, son corps se mit à bouger, s'avançant lentement vers moi. Je me mets aussitôt en position de combat, prête à me défendre, mes sourcils se fronçant. Mais, alors que je pensais qu'il allait se jeter sur moi, une tout autre vision se passe. Un genou à terre, l'autre jambe posée de manière à ce que la cuisse soit en angle droit. Je me recule. Sa tête se baisse légèrement vers le sol.

- Je vous suis reconnaissant. Après tout, c'est vous qui m'avez créé.

- Quoi ?

Je ne peux m'empêcher de parler. Je l'ai crée ? C'est du délire ! Il relève ses trois yeux vers moi.

- Vous ne vous en souveniez pas de l'avoir fait ? Je suis déçu. Pourtant, je pensais que vous étiez consciente de m'avoir créé. C'est grâce à toute votre haine que je suis ici.

- De quoi tu parles ? Quelle haine ?

- Celle qui vous ronge l'âme, ainsi que tout votre être. Surtout après ce qu'il s'est passé la vieille.

Hier, au QG ? Je pose aussitôt ma main au niveau où se loge mon âme, puis je fais la manipulation habituelle pour faire apparaître de manière non matérielle mon âme. Cette dernière se forme au-dessus de ma main, apparaissant petit à petit. Puis, je vois ce que cette chose me disait. Mon âme a prit une teinte noire, comme celle qu'il a.

- L'âme qui se loge dans ta cage thoracique, c'est la mienne, n'est-ce-pas ?

- Oui ! C'est pour cela que si jamais vous mourrez, je meurs avec vous. Vous m'avez créé, je suis devenu une partie de vous.

- Mais, comment ? Je n'ai jamais désiré créer une quelconque chose.

La créature se relève et se met dos à moi, marchant un peu, nous séparant de quelques mètres de plus.

- Vous ne le souhaitiez pas spécialement. Une fois que cette haine atteint une certaine limite, quand votre âme ne peut contenir tout ce qu'elle reçoit, elle l'a stocke d'une autre manière, comme créer des choses, dont moi pour votre cas.

Je ne rajoute rien de plus. Cette histoire est irréaliste, je n'arrive pas à croire ce que j'entends. Je frotte ma main contre mon crâne, ce dernier commençant à devenir douloureux. Je deviens folle.

- Vous vous dites folle, mais dans le monde dans lequel vous vivez n'est-il pas tout aussi fou ?

- Peut-être bien.

Je le scrute de haut en bas. Mais une question me trotte dans la tête.

- Mais, tu es réel ?

Il me regarde, m'observant de ses trois yeux.

- Oui.

- Ca veut dire que tu es réel dans le sens, dans le monde réel ?

- Oui. Mais je ne suis pas apparu car vous ne m'aviez pas appelé.

- C'est à moi de faire ça ? Mais comment ?

- Je ne sais pas. C'est à vous de savoir. Après tout, c'est vous ma maîtresse.

Je ne dis rien de plus, le regardant juste. Comment je suis censée faire ça ? Déjà que je n'étais pas au courant pour lui, mais en plus, savoir que je peux l'invoquer, je ne sais absolument pas comment m'y prendre.

- Dis-moi, tu sais si quelqu'un a également eu une... Chose comme toi ?

- Je suis une chose pour vous ? C'est triste d'entendre ça de vous... Mais je ne peux pas savoir, je suis né il n'y a pas si longtemps après tout.

- Ah, oui.

Je me retourne, faisant disparaitre sa silhouette de mon champ de vision, puis je commence à marcher, prête à partir.

- Vous partez déjà ?

- Oui, je suis restée assez longtemps ici, et tu ne m'apportes rien de nouveau.

Il ne dit rien en retour. Je continue ma marche, m'éloignant de lui le plus possible. L'obscurité redevient dense, tandis que je m'enfonce toujours plus. Puis, je sens mes yeux devenir soudainement lourds. Je finis par lentement m'arrêter, me sentant fatiguée. Mon corps devient également lourd, mes jambes ne pouvant le supporter, je finis par m'écrouler au sol, contre l'herbe qui me chatouille le visage. Mes membres deviennent engourdis. Je me laisse sombrer dans l'inconscience sans résister. De toute façon, j'ai déjà assez perdu de temps ici.

[REECRITURE] Ame de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant