Chapitre 62 : Flashback #7

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-Redresse-toi, clama la voix roque de mon grand-père.

Tout mon corps tremble à cause de ces entrainements interminables se comptant en heures depuis trois jours. Je savais que cela allait être rude, mais je n'imaginais pas que devenir le successeur du célèbre "Sniper de Tokyo" serait aussi éprouvant. J'essaie tant bien que mal de rester droite alors que mes bras et épaules, pourtant habitués à l'effort, me lancent atrocement. Lorsque je lève les yeux vers lui, il me toise de son éternel air insatisfait.

-A quoi penses-tu quand tu tires ? Questionna-t-il soudain.

-J-Je ne sais pas, à la balle ? A ma trajectoire ?

-Tu n'arriveras à rien avec ça. Sais-tu quel est le véritable secret des gens qui excellent dans leur domaine ? La chose qui leur sert de carburant pour repousser leurs limites ?

Je réponds à la négative d'un mouvement de tête devant son regard intimidant.

-Ton cœur dois nourrir une obsession, répondit-il. Une chose qui fera éclater ton niveau d'adrenaline en une simple pensée et qui noircira tous tes doutes pour que tu ne sois contrôlée que par ton instinct.

-Une obsession ? Répétai-je, perplexe.

-Oui. La plupart du temps, cela nait d'une rivalité : d'une envie de vaincre un adversaire ou de dépasser son maitre. Pense à ce que tu ressens lorsque tu arraches un point à l'équipe adverse.

-Je ne ressens rien, affirmai-je.

Ses yeux ambrés me fixèrent avec dédain, et un frisson traversa ma colonne vertébrale.

-Comment ça, "rien" ?

-Et bien, je me sens un peu satisfaite, mais je ne jubile pas non plus.

-Dans ce cas, je peux savoir pourquoi tu m'as tanné pour que je t'entraine ? Tu comptes me faire perdre mon temps ?

-Je veux aider mon amie à devenir la meilleure, et pour cela je dois moi-même exceller.

-Tu n'arriveras à rien si tu n'as aucune rage de vaincre, conclut-il. Rentre à Miyagi.

Désarmée par sa décision, je le regarde s'éloigner avant de réaliser que tout mon plan est sur le point de tomber à l'eau.

-Si je ne le fais pas contre, mais pour quelqu'un, est-ce que ça marche ? Clamai-je assez fort pour qu'il m'entende.

-De quoi parles-tu ?

-La seule chose qui me fait ressentir quelque chose sur le terrain, c'est Sakura. On sait tous les deux que j'étais destiné à suivre les traces de maman, mais j'ai fait ça pour elle. Alors est-ce que la volonté de la rendre heureuse quel qu'en soit le prix est suffisante ?

-Tu veux subir cet entrainement pour elle, et non pour toi. Si jamais votre amitié prend fin après tant d'effort alors que je t'aurais enseigné à ne pas retenir ta rage, cela pourrait devenir dangereux. Il est hors de question que je prenne un tel risque pour ma petite fille.

-Il ne m'arrivera rien. On est meilleures amies et rien ne changera.

-Tu as treize ans Yuna, et une vie entière pour que réaliser que baser tout ces efforts pour autrui est quelque chose d'insensé. Alors, si ta motivation est assez puissante comme tu le prétends, je te propose un accord.

Je reste pendue à ses lèvres, consciente que les défis du vioc' tendent souvent davantage vers l'impossible qu'autre chose.

-Demain, au petit mâtin, si tu arrives à enchainer vingt tires à 0,1%, alors je t'entrainerai pour faire de cette fille ton carburant.

-Quoi ? Mais ça ne fait que trois jours et je peine à arriver à 6% ! C'est-

-Si tu échoues, alors tu devras faire une croix sur mon savoir et retourner à Miyagi sans ronchonner. Ce sera ta seule chance de me montrer ta détermination.

En plantant mon regard livide dans celui de mon grand-père, je pense à ce qui m'a mené ici : l'idée de tenir ma promesse et de faire de ma meilleure amie une joueuse capable de rendre fier son bourru de paternel négligeant, celui-là même qui avait essayé de la faire retirer de l'équipe pour qu'elle ne se concentre que sur ses études. J'ai eut la chance que mon père soit intervenu pour le convaincre, alors je dois saisir l'opportunité de la rendre heureuse, quoi qu'il en coûte.

-Si j'y arrive, me promets-tu qu'aucun adversaire ne sera trop grand pour moi ? Que je serais capable de caler n'importe quel point, dans n'importe quelle configuration, et à n'importe quelle vitesse humainement atteignable ?

-Il n'en tiendra qu'à toi, mais tes chances de devenir une snipeuse resteront nulle sans mes enseignements.

Soudainement comblée de détermination, je me redresse en saisissant une balle au passage.

-Alors à demain, le vioc'.

***

*POV Sakura*

Cela fait trois semaines que Yuna est partie à Tokyo rejoindre son grand-père pour l'entrainement, et je n'ai eut aucune nouvelle pendant ce voyage. Aujourd'hui est enfin venu le jour de son retour, et bien que j'ai proposé de lui envoyer mon chauffeur pour lui éviter les désagréments des transports en communs, elle avait tout de même décliné l'offre. Me voilà donc sur le quai de la gare, l'attendant pour la raccompagner chez son père.

Après de longue minutes d'attente, l'annonce de son train résonne enfin alors que la tête de celui-ci commence à percer le brouillard de cette mâtinée encore assombrie par l'aube. J'observe les wagons ralentir puis s'arrêter, avant que les premiers voyageurs ne vident progressivement les voitures. En perdant mon regard dans la foule, j'aperçois enfin mon amie.

-Yuna ! Saluai-je, lui faisant relever la tête.

Lorsqu'elle posa son regard sur moi, un léger sourire étira la commissure de ses lèvres, et elle s'avança sans un mot avant de poser son sac pour me prendre dans ses bras : nous n'avions jamais été séparées aussi longtemps depuis notre entrée au collège.

-Comment vas-tu ? Glissai-je à son oreille en répondant à son étreinte.

-J'ai hâte de reprendre l'entrainement, se contenta-t-elle de répondre avant de s'éloigner pour me regarder, toujours une main posée sur mon épaule.

Je remarque à ce moment que quelque chose semble avoir changé dans son regard. C'est presque imperceptible, mais j'ai l'impression que ses yeux reflètent une aura de différent, comme si elle se ressentait plus froide.

-Est-ce que ça va ? Questionnai-je en glissant une main sur sa joue. J'espère que ton grand-père n'a pas été trop sévère.

-Tu parles, ce vioc' est un putain de tyran.

-Ton langage, la repris-je en tirant sur sa joue.

-Enfin bref, je lui ai montré que notre duo en valait la peine, et maintenant, poursuivit-elle en saisissant mon visage avec ses deux mains sans me lâcher du regard, nous seront capables de devenir le nouveau duo du pays.

Ses yeux sont animés d'une lueur que je ne lui avais encore jamais connu, me laissant à penser que ces trois semaines signent en réalité bien plus qu'une prise de niveau : un tournant dans la vie de ma meilleure amie.

_____

Sans parler du retard, le suite d'Haikyuu est ENFIN sortie et j'ai vraiment hâte de savourer cette deuxième partie de saison.

Sinon, merci à vous pour votre patience, je vous jure que je fais au mieux mais l'écriture est un peu rude ces temps-ci.

A bientôt pour la suite ! 

King Sniper [Haikyuu!!]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant