Tu es mon double

Innocence coupable

Depuis la deuxième tache du tournoi, et depuis que Charles avait été utilisé comme otage, Harry avait vu ses cauchemars se multiplier. Il se réveillait la nuit, hurlant et haletant, sans pour autant se rappeler de ce qui l'avait mis dans cet état.
A la seconde nuit, honteux d'avoir réveillé tout le monde, les joues baignées de larmes, il se glissa dans le lit de son frère et laissa Charles l'enlacer et le réconforter.

Qu'importe qu'ils n'aient plus huit ans, qu'ils soient des adolescents maintenant, il avait besoin de sentir que Charles était en sécurité. Dans leur dortoir, personne n'aurait cependant fait la moindre réflexion. Et les Serpentard étaient solidaires entre eux, gardant les secrets de leur maison jalousement.

La seule personne en dehors du dortoir à avoir été informée de la situation était leur tête de maison, et dire que Severus était furieux était en dessous de la réalité. Il lui avait fallu toute sa maîtrise d'occlumens pour ne pas laisser voir à Dumbledore sa rage.
Il s'était montré encore plus renfrogné et cassant qu'à ses habitudes, mais ses collègues avaient mis sa soudaine mauvaise humeur sur le compte d'explosions de chaudron pendant ses classes, et certainement pas sur les cernes qu'affichait le jeune Harry Potter.

Une nuit, dans les bras de Charles, Harry avait raconté ce qu'il avait surpris dans le couloir des cachots. Les mots de Lupin au sujet de leur mère et de leur professeur de potions.
Les deux garçons avaient longuement débattu sur le sujet, essayant de deviner ce que ces mots signifiaient.

Quoi qu'il en soit, ils avaient convenu qu'ils n'avaient pas l'intention de douter de l'homme qui les avait sauvé et qu'ils considéraient comme une figure paternelle. Severus ne leur avait jamais menti, et ils avaient une confiance aveugle en lui. S'il n'avait pas jugé bon de leur parler de leur mère, il devait avoir ses raisons.

Au sujet de Remus Lupin, ils avaient vu la réaction de Sirius et avaient entendu parler de sa trahison. La façon dont il avait laissé son meilleur ami croupir à Azkaban, sans même se demander s'il était coupable ou non. La façon dont il avait laissé les enfants Potter de côté, ne prenant jamais la peine de demander de leurs nouvelles, de s'assurer qu'ils allaient bien.
Lupin était également un proche de Dumbledore, et il était évident qu'il était présent à Poudlard à sa demande. De là à penser qu'il était là pour les enfants de ceux qui avaient été ses amis...

Aussi bien Charles que Harry étaient décidé à ignorer l'homme. D'abord parce que Sirius ne lui faisait plus confiance. Ensuite, à cause de la façon dont il avait parlé à Severus.

****

Remus Lupin était bel et bien présent sur l'invitation de Dumbledore. Le but était celui deviné par les deux adolescents, à savoir les approcher, sous prétexte de leur parler de leurs parents.
L'homme avait observé les deux garçons. Il avait noté l'affolement de Harry en comprenant que son frère était sous l'eau, puis il l'avait vu remonter avec deux otages. Il avait souri, en se disant qu'il était bel et bien le digne fils de Lily : c'était tout à fait ce que la rousse aurait été capable de faire, sans se préoccuper des conséquences.

Il avait noté les retrouvailles entre les frères, notant à quel point ils étaient proches et fusionnels. Ce devait être un comportement habituel, puisque autour d'eux, leurs amis ne semblaient pas étonnés ou choqués de leur proximité et de leur besoin de contact pour se rassurer.
En observant Charles, il avait cependant froncés les sourcils. Si Harry avait le visage de James et les yeux de Lily, Charles n'avait aucun trait des Potter. Certes, il avait les cheveux noirs et les yeux sombres, mais rien de plus.

Son attention avait été attirée par Severus Rogue. Ce bon vieux Rogue, toujours aussi sombre, aussi fermé. Toujours de noir vêtu.
Il s'était longtemps senti coupable de la façon dont ils l'avaient tous traité, leurs mauvaises blagues auraient pu avoir des conséquences tragiques avec le recul. Il s'était dit qu'il irait lui parler, lui tendre la main pour mettre fin à une vieille rancune. Jusqu'à ce qu'il note le regard de l'homme sur les garçons.

Il semblait... totalement absorbé par leurs retrouvailles, et si Remus ne l'avait pas si bien connu, il aurait pu dire qu'il y avait de la tendresse dans son regard. Il aurait probablement pu se réjouir de voir que les enfants de ses amis soient entre de bonnes mains, mais au contraire, il se sentit furieux.
Il se souvenait de la façon dont Severus soupirait encore et encore après Lily Evans, comme s'il pensait qu'elle ignorerait James pour lui... Et lorsque le maître des potions partit pour le château, probablement pour aller se terrer dans ses cachots comme la chauve-souris qu'il était, il le suivit à grands pas pour lui dire sa façon de penser.

***

Après sa confrontation avec Lupin, Severus avait été furieux. Furieux de se rendre compte qu'il avait été si transparent, furieux de voir que Lupin - celui qui avait été le plus modéré des Maraudeurs - soit aujourd'hui le plus agressif de ceux qui restaient...

Il avait compris le petit jeu de Dumbledore, ses efforts pour affaiblir à Harry et séparer les jumeaux. Le pire à ses yeux était que le vieux fou était conscient qu'il risquait de les blesser mais qu'il s'en moquait totalement. Pour lui, tout était acceptable pour son "plus grand bien". Y compris manipuler des enfants, les forcer à vivre dans un foyer abusif.
Y compris tenter de les utiliser à sa guise, sans se préoccuper des conséquences.

Un bref instant, Severus se demanda pourquoi il n'emmenait pas les garçons avec lui, pour les mettre à l'abri loin de toutes ces manigances. Poudlard n'était pas la seule école de Magie au Monde, et il était certain que les Malefoy ne seraient pas contre changer de pays quelques années. La fortune de Lucius pourrait leur assurer une nouvelle vie...
Cependant, ce serait aux garçons de décider, et il comptait bien leur proposer de prendre leur revanche sur Dumbledore. Le vieux fou finirait bien par se trahir, et ses manipulations seraient un jour mises en pleine lumière.
Même si le vieil homme pouvait se retrancher derrière une innocence coupable, un jour il ne pourrait plus prétexter qu'il ne savait pas et qu'il avait voulu faire pour le mieux.

Prompt de demain : partisan des ténèbres