Le coeur d'un espion

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Choqué, Severus maintint longuement Charles contre lui, essayant de décider quoi lui dire. De quelle façon également.

Parce que Harry était menacé, l'adolescent en était venu à développer une certaine haine envers Voldemort, sans même se douter qu'il s'en voulait à lui-même pour des actes dont il n'avait plus le moindre souvenir.
- Tu sais qui je suis, n'est-ce-pas ?
Severus soupira, et ferma les yeux. Il avait juré de ne jamais leur mentir, et il ne comptait pas se trahir.
- Oui.


Cependant, Severus ne dit rien de plus. Charles s'écarta légèrement pour dévisager son professeur, la seule figure paternelle qu'il ait connue. Il nota ses traits tirés, les lèvres pincées et son regard fuyant.
L'adolescent avait confiance en l'homme pour ne pas lui mentir, tout en se rendant compte que Severus ne voulait pas avouer ce qu'il savait.

Charles soupira et se passa la main sur les yeux. Il hésita brièvement à insister, mais il choisit plutôt de changer légèrement de sujet.
- Et tu es certain que Harry est en sécurité ?
- Je te le promet Charles.

Le jeune homme sourit, rassuré. C'était le principal que Harry soit sain et sauf après tout. D'ailleurs, Harry lui dirait probablement qu'il se moquait de savoir qui il était, parce qu'à ses yeux, il était son jumeau.
Charles avait le même sentiment, bien évidemment. Peu importait vraiment de savoir s'il avait une autre famille, parce que Harry était l'unique famille qui comptait. Harry, mais aussi Severus, Sirius et les Malefoy.

Il était curieux cependant, et il avait l'étrange impression que cette information avait une certaine importance. C'était un drôle de pressentiment, et c'était la raison pour laquelle il insistait autant auprès de Severus pour en savoir plus, malgré le malaise évident du professeur de potions.


Soudain, il leva les yeux vers l'adulte, et nota son expression inhabituelle. Il semblait... effrayé. Hors Severus n'avait jamais peur. Il avait le cœur d'un espion, froid et logique, ne paniquant jamais.
Ce fut cette expression qui mit Charles sur la voie.

Il écarquilla les yeux, et pâlit brusquement. Charles fit un pas en arrière, et secoua la tête, cherchant à nier ce qu'il venait de comprendre.
Le jeune homme s'obligea à se calmer, en se répétant que c'était impossible. Mais l'expression de Severus - habituellement si maître de lui-même - lui hurlait la vérité qu'il refusait d'entendre.
Il recula d'un autre pas, puis chuchota.
- C'est impossible...
- Charles.
- Non ! Non... C'est pas possible ! Je ne peux pas...


Le Maître des potions avança brusquement vers le jeune homme et l'attira contre lui, le serrant dans ses bras malgré la panique de l'adolescent qui se débattait. Charles capitula finalement, restant immobile, les yeux dans le vague.
- C'est moi qui ait fait tout ça. C'est... j'ai rendu la vie de Harry misérable. J'ai tué nos... ses parents.
Un sanglot l'arrêta et Severus le serra un peu plus contre lui, maladroitement, frottant son dos doucement pour l'apaiser.
- Charles, calme-toi.

Une flambée de rage donna à Charles l'énergie de se dégager de l'étreinte de son professeur. Ses yeux rougeoyaient et sa magie s'agitait autour de lui, puissante et intoxicante. Severus hoqueta, stupéfait et tendit la main vers le garçon, mais celui-ci ne sembla pas le voir.
- Tu aurais du me tuer ! A l'instant où tu l'as découvert il fallait m'éliminer ! Pour la sécurité de Harry, pour...


Si jusqu'à cet instant Severus avait été totalement déstabilisé par les réactions de Charles, son explosion de colère lui permit de se reprendre. Il connaissait sa magie pleine de colère, il l'avait souvent sentie lorsqu'il était mangemort.
Il se redressa alors, sourcils froncés, et sa voix claqua, sèche.
- Ça suffit.

Le ton habituellement réservé à ses pires élèves eut le même effet sur Charles que sur n'importe quel autre gamin : il se figea, et leva les yeux vers son professeur, n'osant plus bouger.
Si la situation n'avait pas été aussi grave, Severus aurait pu en rire. A l'époque où il faisait face à Voldemort - au monstre et non pas à un adolescent perdu - il aurait peut-être pu tenter sa voix glaciale de professeur furieux pour éviter un doloris...
L'homme garda le silence quelques secondes, fixant Charles, essayant d'avoir l'air impitoyable, sans montrer la douleur qu'il ressentait face à la souffrance manifeste du jeune homme qu'il aimait comme un fils. Puis, il soupira et commença à parler, d'une voix calme, sans élever la voix.
- Lorsque je suis arrivé dans la maison des Potter, j'ai trouvé les corps de James et de Lily. Et dans la chambre d'enfant, il y avait deux bébés. Harry et toi. Vous étiez accrochés l'un à l'autre, et il était impossible de vous éloigner l'un de l'autre. Vous étiez déjà si proches...

Charles tituba légèrement avant de se laisser tomber sur une chaise à proximité. Il fixait Severus, attentif.
- Quoi que tu puisses en penser, Charles, quand je vous ai retrouvé tous les deux, j'ai vu à quel point vous étiez attachés l'un à l'autre. Tu as sauvé ton frère, toutes ces années. Tu l'as protégé et tu lui as permis d'être aimé.
- Il va me détester... il devrait me haïr...
- Pour quelle raison ? Harry ne changera pas d'avis sur toi, Charles. Vous avez grandi ensemble. Quoi qu'il se soit passé, cette nuit là, le Seigneur des Ténèbres a disparu.

Les yeux de Charles se teintèrent de rouge une fois de plus, alors qu'il levait brusquement la tête vers Severus.
- Non ! Il n'a pas disparu puisque je suis lui. Je...
- Suffit !
L'ordre claqua sèchement, et Charles baissa la tête. Severus soupira, et continua.
- Charles Potter n'a jamais tué personne. Il n'a jamais fait de magie noire. Il n'a jamais eu envie de dominer le monde...
- Je voulais tuer mon... L'oncle de Harry.
L'adolescent avait chuchoté, misérable. Severus laissa échapper un ricanement amer.
- Moi aussi. Lucius et Narcissa. Sirius. Même Harry le voulait. Ce porc de moldu ne mérite certainement pas de vivre, Charles. J'ignore ce qui s'est passé mais tu as eu droit à une seconde chance. Une seconde vie.
- Mais...
- La magie, les dieux, ou quoi que ce soit a décidé que tu méritais une nouvelle vie. Malgré les erreurs faites avant. Tu n'es pas lui, Charles. Tu es quelqu'un de différent.

Vaincu, Charles baissa la tête.
- Harry va me haïr...
- Je ne pense pas, mon garçon. Il te dira la même chose que moi. Et comme lui, je ne te laisserai pas.


Prompt de demain : la pierre de mort

Tu es mon doubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant