Tu es mon double

Amour sans espoir

Contre toute attente, les mots de Severus avaient créé un électrochoc suffisant pour ramener Sirius à la vie. L'animagus était sorti de son état catatonique, retrouvant l'envie de vivre.

Il y avait toujours une ombre dans son regard gris, mais il souriait de nouveau et il faisait en sorte d'aller mieux. Il reprenait rapidement du poids et il acceptait toutes les potions que Severus lui apportait, sans jamais rechigner. La seule chose qui ne variait pas était ses cauchemars.

La première fois qu'il rencontra les enfants, Sirius resta figé à les dévisager intensément. Il examina en premier lieu Charles, cherchant un air de famille, une vague ressemblance qui pourraient lui indiquer qui était cet enfant mystère.
Il nota les cheveux noirs, comme ceux de James, mais légèrement ondulés, comme ceux de Lily. Il nota les yeux sombres et le teint pâle. Mais en dehors de ces quelques coïncidences, il n'y avait rien.

Sirius adressa à l'enfant un léger sourire, un peu hésitant.

Lorsqu'il se tourna vers Harry, il eut cependant un hoquet étranglé et il vacilla, choqué. Il avait face à lui James Potter. Hormis les yeux verts incroyables de Lily, c'était le visage de James. Les cheveux de James. Les expressions de James.

Harry était sans conteste l'enfant des Potter, son filleul, celui qu'il avait tenu dans ses bras lorsqu'il était né. Il lui adressa un large sourire, plein de joie.

Près de lui, Severus nota sa réaction et quelque chose de désagréable remua au fond de lui. D'un coup, il retrouvait le Sirius de son adolescence. Le Sirius qui l'avait humilié tant de fois, celui qui était toujours collé à James et Lily. C'était le rappel amer de sa scolarité chaotique, à subir les brimades des Maraudeurs, le rappel de l'amour sans espoir qu'il éprouvait pour sa jolie rouquine de voisine.

Il croisa le regard de Charles et de Harry, qui semblaient inquiets. Comme s'ils avaient peur qu'il parte maintenant que leur parrain était de retour. Il leur adressa un léger signe de tête, décidant que tant qu'ils voudraient de lui, il resterait dans les parages.
Severus aimait particulièrement les moments où il apprenait à ces gosses l'art des potions, et même s'il prétendait le contraire, il s'était attaché et n'était pas prêt à renoncer de lui-même.

Si Sirius vit l'échange muet, il n'eut aucune réaction.

Plus tard, une fois que les jumeaux furent partis jouer avec Drago, Sirius avait retenu Severus.
- J'ignore qui est ce gosse, mais il n'est pas le frère de Harry.

Sur le moment, Severus pensa que Sirius voulait rejeter Charles, et une flambée de haine l'envahit. Il leva un sourcil et le dévisagea d'un air méprisant, attendant la suite.
L'animagus ne réagit pas, les sourcils froncés alors qu'il semblait plongé dans ses pensées. D'un ton absent, Sirius poursuivit.
- Charles, c'est son vrai prénom ou il a été nommé ainsi ?
Le Maître des potions haussa les épaules.
- C'est Dumbledore qui a décidé. Ils étaient trop jeunes pour... pour parler. Il a pensé que c'était un rappel de Charlus Potter.

Sirius laissa échapper un ricanement et secoua la tête.
- Ce n'est pas un Potter.

Severus serra les poings et grogna sourdement.
- Alors quoi ? Tu vas le renvoyer chez les moldus ? Te débarrasser de lui ?
Sirius sursauta et cligna des yeux l'air perdu.
- Quoi ?
- Allons Black. Tu répètes qu'il n'est pas un Potter. Qu'est-ce que tu cherches à dire ?

L'animagus secoua la tête, visiblement choqué que Severus puisse imaginer qu'il irait abandonner un enfant comme ça.
- Non. C'est juste... je parlais de ses origines. Je ne compte pas le séparer de Harry ! Ça à l'air d'un gentil gosse...
- C'est un gentil gosse. Ils le sont tous les deux.
- Voilà ! C'est juste... étrange.
- Étrange ?
- Harry et lui, ils sont... si proches. Comme liés. Mais...

Severus ricana, désabusé.
- Après ce qu'ils ont vécu... Black, ces gosses se sont raccrochés à la moindre miette de bonheur qu'ils ont pu trouver. Et c'était l'autre qui était là. S'ils ont survécu sans trop de dommages à la mort de leurs parents puis à ces ignobles moldus... c'est parce qu'ils n'étaient pas seuls dans ces épreuves.
- Je ne comprends pas.
- Lorsque nous les avons trouvés, Harry avait le visage tuméfié. Il s'était interposé entre son oncle et Charles et avait pris un coup à sa place. Et je suppose que l'inverse s'était déjà produit.

Sirius ferma les yeux et se passa la main dans les cheveux, blêmissant.
- Chaque fois que tu parles de ce qu'ils ont vécu... j'en suis malade. Et moi j'étais enfermé comme un animal, je les ai...
- Abandonnés ? C'est le cas Black. Mais si tu veux mon avis, quoi que tu aies fait ce jour là, le résultat était le même. Dumbledore avait déjà tout prévu avant même que tu sois enfermé.

Il y eut un silence entre les deux hommes. Severus savait que Sirius Black n'était pas prêt à entendre la vérité sur Dumbledore et ses petits tours, mais il pouvait toujours le lui répéter encore et encore jusqu'à ce que l'homme ne commence à se poser les bonnes questions.

Sirius prit une grande inspiration et reprit la conversation initiale comme s'il n'y avait jamais eu de mention à Albus Dumbledore ou aux années passées à Azkaban.
- Je ne sais pas qui est ce gosse, James et Lily n'avaient pas d'amis ayant un enfant de cet âge. Il n'est pas leur fils, c'est une certitude. Mais... Mais lui et Harry sont aussi proches que peuvent l'être des jumeaux, et ils méritent tous les deux d'être heureux. C'est ce que j'allais dire, Snivellus.

Severus eut un vague rictus agacé au vieux surnom humiliant, mais il ne se vexa pas. Il avait passé l'âge de se battre avec cet idiot après tout. Au lieu de répliquer et de ranimer les vieilles querelles, il se pencha légèrement vers Sirius, ses yeux sombres brillants de détermination.
- Tant mieux si tu ne comptes pas les séparer Black. Parce que la personne qui se mettra entre eux risque d'être rayée de leurs vies.
- C'est une menace ?

Severus afficha un sourire en coin.
- Appelle ça comme tu veux. Mais je peux t'assurer que ces gosses sont puissants et qu'ils sont tellement liés que seul un fou pourrait avoir l'idée de s'immiscer entre eux. Si tu veux que ton filleul t'aime, assure toi de ne jamais rejeter Charles sous prétexte qu'il n'a pas la bonne ascendance.

Prompt de demain : cage vide