Mensonges coupables

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Alors que les quatre premières années des jumeaux Potter avaient été plutôt calmes, puisque Dumbledore n'avait pas semblé prêt à attaquer de front, la cinquième année s'annonçait visiblement différente. En ce qui concernait Harry, tout du moins, puisque Charles semblait être laissé de côté, comme s'il n'avait pas la moindre importance.

Ce constat amusait beaucoup les deux garçons, et les rassurait sur un point : Dumbledore était loin de se douter qui était réellement Charles.

Outre la présence de Lupin entre les murs de l'école, en tant que Professeur, Harry était visiblement surveillé de près. Quand ce n'était pas Dumbledore ou Lupin, c'était Hagrid qui le suivait du regard en permanence.
Il passait donc la majeure partie de son temps libre dans la salle commune des Serpentard, entre son frère et Drago.

Le professeur Lupin tenta à plusieurs autres reprises de lui parler à la fin de son cours, mais Harry esquivait à chaque fois, prétextant un autre cours ou ses amis l'attendant. Charles prenait garde à rester avec lui systématiquement également, et lorsqu'il fixait Remus Lupin de son regard sombre, celui-ci frissonnait et détournait les yeux.

Rogue veillait sur eux, encore et toujours. Il restait dans l'ombre, mais les deux garçons savaient qu'il était présent, et qu'il était attentif. Ils avaient totalement confiance en lui, et ils étaient prêts à remettre leurs vies entre ses mains.

*

Plus tard, Harry ne pourrait même pas prétendre qu'il avait relâché son attention. Ou qu'il s'était montré imprudent. Mais cette réflexion ne le soulageait pas alors qu'il suivait Dumbledore à contrecœur.

Le Directeur avait surgi de nulle part, avec un sourire paternaliste et ses fichus yeux bleus brillants comme des saphirs. Harry sortait tout juste de métamorphose, et Drago était parti devant avec Théo pour aller en runes. Ce n'était pas une matière que Harry suivait, alors il était resté devant la porte de la salle pour attendre Charles.
Évidemment, c'était un piège. Hagrid était après tout un fidèle de la première heure de Dumbledore, et il avait appelé à l'écart le frère de Harry Potter, le Survivant, l'Élu d'Albus Dumbledore précisément ce jour-là en sachant qu'il isolerait Harry, comme le souhaitait le Directeur.

Dumbledore était donc arrivé, face à un Harry morose adossé au mur dans le hall de Poudlard. L'adolescent s'était laissé surprendre, parce qu'il se pensait en sécurité. Et techniquement, il était en sécurité : il ne pensait pas que son intégrité physique soit menacée. Cependant... il craignait de ce que le vieux fou irait inventer pour le rallier à lui.

Face à l'ordre direct de l'homme, Harry ne put que le suivre. Il s'était mordu la langue quand le sorcier avait parlé d'un "entretien dans son bureau". C'était juste un fichu piège, rien de moins. Et comme il était seul, il ne pouvait appeler personne au secours, pas même son frère.

En entrant dans le bureau directorial, Harry regarda autour de lui avec curiosité. C'était la première fois qu'il venait ici seul - la première fois il avait été trop inquiet qu'il n'avait pas quitté son frère des yeux - et il avait imaginé un bureau comme celui de Lucius peut être, sobre et élégant.
Sauf que le bureau de Dumbledore n'était absolument pas sobre. Et encore moins professionnel. C'était un amoncellement d'objets hétéroclites, tenant plus du bazar de charlatan que d'autre chose. Il y avait certaines choses qui semblaient fragiles, d'autre choses qui lui donnaient une impression désagréable. Les murs étaient couverts d'étagères emplies de livres et son bureau était noyé sous une masse de parchemins en désordre.
Au milieu de tout ce fatras, il y avait un perchoir sur lequel se pavanait un Phénix de toute beauté. En le voyant, l'oiseau pencha la tête, et lança une trille de bienvenue, joyeuse. Malgré lui, Harry sourit.

- Ah. Je vois que tu as rencontré Fumseck. C'est un vieil ami...
Harry sursauta, ayant presque oublié la présence du directeur et il se reprit rapidement. L'adolescent se redressa, et fixa un point derrière le vieil homme pour ne pas avoir à croiser son regard.
- Vous vouliez me parler Monsieur ?
Dumbledore resta un long moment silencieux à le dévisager, avant de soupirer et de se pencher légèrement en avant.
- Je suppose jeune homme que tu es au courant de... ta réputation dans le monde magique ? De ce que tu représentes ?

Harry n'eut aucune réaction visible et il nota la légère déception de l'homme. À croire que Dumbledore avait espéré qu'il se lamente ou hurle...
- Et bien j'ai une assez bonne idée de la situation Monsieur. Je sais de quoi sont morts mes parents après tout.
Le Directeur sembla légèrement déstabilisé de la franchise brutale de Harry. Il continua cependant.
- Je suppose donc que tu es d'accord avec le fait que le meurtrier de tes parents doit être arrêté avant qu'il ne mette le monde magique à feu et à sang... Avant que d'autres personnes ne soient tuées.

Le regard vert se voila un instant - si Dumbledore pensa qu'il s'agissait de peine pour deux inconnus disparus, Harry savait lui qu'il était enragé, presque au point de perdre toute sa maîtrise de lui même - puis le jeune homme hocha la tête avec raideur.
- Et bien je suis encore un enfant Monsieur. Je ne pense pas avoir la capacité d'être utile hormis pour le rôle de cible quand les adultes les plus puissants ont échoué.
- Tu te sous-estime Harry. J'ai parlé avec tes professeurs et tu es un excellent élève. Sans compter tes exploits dans ton... enfance. Je dirige l'ordre du Phénix chargé de se battre contre Voldemort, et je pense sincèrement que tu devrais nous y rejoindre.
- Ma place n'est pas vraiment sur un champ de bataille Monsieur.

Dumbledore pouvait être aussi insistant qu'il le voulait, Harry pouvait se montrer totalement buté quand il s'y mettait. Severus lui avait parlé de l'ordre du Phénix après les révélations de Hermione, bien évidemment, et il ne comptait pas se mettre sous les ordres du vieux fou.
- Harry. Je suis désolé de t'annoncer ça de cette façon, mais... Il existe une prophétie. Une prophétie qui te concerne et qui explique pourquoi tes parents ont été tués. Tu serais le seul sorcier capable de vaincre Voldemort.
L'adolescent se mordit la lèvre fortement, pour ne pas répondre que c'était ses mensonges coupables qui avaient conduit à la situation actuelle. Si Dumbledore n'avait pas caché des informations pour manipuler à sa guise, beaucoup de sorciers n'auraient pas été tués. Et il continuait en cherchant à l'attirer à lui, alors même que quelques semaines plus tôt, il suppliait le Ministre de l'arrêter pour l'interroger sous Veritaserum...

Son regard se durcit, et il prit le risque de fixer le vieil homme dans les yeux pour la première fois.
- Dans ce cas... Nous verrons lorsqu'il y aura un signe du retour de Voldemort. Pour l'instant il me semble que tout est calme non ?
Il salua poliment le vieil homme statufié par la surprise d'une telle réponse, et quitta le bureau, le cœur battant, s'attendant presque à recevoir un sort dans le dos.

Prompt de demain : Oiseaux

Tu es mon doubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant