Tu es mon double

Emprisonné

Severus affichait sa tête des mauvais jours en arrivant au Manoir Malefoy. Il s'était adouci le temps de saluer Harry, Charles et Drago - les enfants l'accueillaient toujours avec joie malgré son caractère difficile - mais il avait clairement montré qu'il était en désaccord avec Narcissa et Lucius.
Les jumeaux s'étaient accrochés à lui, comme pour lui montrer leur soutien, sans un mot sous le regard perplexe du potionniste, ce qui avait énormément amusé Lucius.

Malgré ses réticences, Severus avait dû abdiquer : Narcissa lui avait demandé de l'accompagner à Azkaban pour aller chercher Sirius. L'homme devait être libéré le jour même.
Immédiatement, il avait refusé, protestant que ce n'était pas son idée et qu'il ne voulait pas prendre part à cette masquarade.

Narcissa avait tenté de l'apaiser en lui expliquant que Sirius ne ferait jamais confiance à Lucius, puisque lorsqu'il avait été jeté en prison, il était convaincu que le mari de sa cousine était un Mangemort - c'était le cas bien évidemment - et Lucius ne lui avait jamais donné de raisons de lui faire confiance.
Comme Severus s'entêtait, Narcissa avait prétexté ne pas souhaiter se rendre seule au milieu de tous ces criminels, elle la pauvre sorcière sans défense. L'excuse avait fait ricaner Severus : Narcissa était beaucoup de choses, mais certainement pas une pauvre petite chose fragile. Elle devait connaître plus de sorts noirs que la majorité des Aurors, et en duel, elle pourrait en remontrer à n'importe qui.

Lucius avait grogné avant d'intervenir, cédant au regard implorant de son épouse. Il avait rappelé à Severus que Black lui faisait confiance : après tout le maître des potions avait joué les espions pour Dumbledore. Sa présence était donc indispensable pour amener l'ancien prisonnier au Manoir Malefoy, et pour éviter qu'il ne se retrouve une fois de plus entre les mains du Directeur de Poudlard...

Severus avait mille et une raisons de refuser. Il aurait pu tourner les talons et s'en laver les mains, prétexter que le sort de Black ne l'intéressait pas le moins du monde. Mais il avait croisé le regard vert de Harry qui le fixait tranquillement, et il avait capitulé.
Quoi qu'il puisse se passer, les gosses Potter ne pourraient pas lui reprocher de les avoir empêché de retrouver un peu de leur famille. Même s'il avait l'intention de tuer Black douloureusement si cet idiot s'avisait de les effrayer ou de les blesser.

Ainsi, Severus était aux côtés de Narcissa, plus sombre qu'à son habitude alors qu'ils approchaient la terrible prison. La seule raison qui l'empêchait de se montrer sarcastique avec l'aristocrate tirée à quatre épingles dans ses vêtements de luxe à ses côtés était les légers tremblements qui la parcouraient.
Visiblement, Narcissa n'aimait pas cet endroit et ne se sentait pas à l'aise.

Ils entrèrent, ignorant les regards lourds des gardiens. Ils étaient connus comme appartenant aux ténèbres bien évidemment, et d'après la rumeur populaire, ils avaient échappé par miracle à la prison.
La tête haute, Narcissa suivit sans hésiter le gardien dans les profondeurs sombres de la prison. L'endroit était glacial, humide et sombre. L'atmosphère était pesante, étouffante à cause des détraqueurs.
De temps à autres, un prisonnier hurlait - peur, chagrin, colère, folie - faisant légèrement sursauter les visiteurs.

Le visage fermé, le gardien s'arrêta devant une cellule. Narcissa se tendit alors que le rire hystérique de sa sœur retentissait dans leur dos et Severus accrocha son bras pour la soutenir, comme si c'était un geste naturel. Il n'y eut pas le moindre commentaire. L'aristocrate resta droite, en apparence impassible. Le gardien ouvrit la porte, brusquement, l'envoyant claquer contre le mur.
- Black. T'es libre. Dehors.

Voyant qu'il n'y avait aucun mouvement, Severus fronça les sourcils et lança un Lumos pour percer les ténèbres de la cellule crasseuse.

Longtemps, il avait rêvé de voir Sirius Black à terre. Le voir humilié, affaibli. Réduit à néant. Un juste retour de ce qu'il avait subi pendant sa scolarité, une façon d'apaiser son orgueil piétiné par les Maraudeurs.

Cependant, en éclairant cette cellule miteuse, Severus oublia toute envie de vengeance. Black était vêtu de haillons et d'une saleté repoussante. La barbe hirsute et les cheveux extrêmement longs et sales, il était méconnaissable.
L'adolescent joyeux et cruel qu'il avait connu n'était plus. Ce n'était désormais plus qu'un squelette ambulant, d'une maigreur impressionnante. Il était recroquevillé dans un coin de la cellule, ramassé sur lui même, les yeux fous, montrant les dents face à la soudaine luminosité.

Le gardien ne sembla pas surpris. Il eut un rire gras et secoua la tête.
- Z'êtes certains de vouloir l'embarquer ? C'est une vraie bête çui-là, depuis l'temps qu'il est emprisonné ici.

Narcissa jeta un regard glacial à l'homme et elle avança dans la cellule, grimaçant légèrement à cause de l'odeur et des immondices, tête haute. Royale.
Arrivée devant Sirius, elle se pencha, pour essayer de capter ses yeux gris. Elle lui murmura quelques mots d'une voix douce et de là où il était, Severus ne pouvait pas entendre ce qu'elle disait exactement. Cependant, au bout de quelques secondes, une vague étincelle sembla s'allumer dans le regard fatigué.

Sirius Black leva les yeux vers lui et le fixa un long moment, immobile, alors que Narcissa continuait de parler. Finalement, elle lui tendit la main et attendit patiemment.
Le prisonnier eut une hésitation. Cependant, en voyant le gardien près de Severus, il se tendit et attrapa la main de sa cousine.

Elle l'aida à se relever, et en voyant l'homme debout Severus retint un juron. Si au sol Sirius avait semblé diminué, ce n'était rien comparé à ce qu'il pouvait voir. Sa position avait caché les cicatrices et les marques de maltraitances qui parsemaient son corps.
Visiblement, les gardiens avaient des occupations étranges lorsqu'ils s'ennuyaient. Dignes des Mangemorts.

Narcissa jeta un regard furieux au gardien, et Severus serra la main sur sa baguette. Puis, il avança à grands pas brusques vers Sirius, comprenant qu'il ne tiendrait pas sur ses jambes seul. Pas dans cet état.
Le prisonnier ne broncha pas, n'eut pas le moindre mouvement de recul quand Severus lui passa un bras autour de la taille pour le soutenir, fronçant le nez à cause de son odeur. Il se laissa faire et conduire hors de sa cellule, puis hors d'Azkaban, gémissant quand la lumière du jour baigna son visage fatigué.

Ses yeux n'étaient plus habitué à tant de luminosité et Narcissa lui enfonça une casquette moldue sur le crâne, ignorant le regard amusé de Severus.
L'instant d'après, le trio bien mal assorti avait transplané et arrivait aux grilles du Manoir Malefoy.

Sirius eut un mouvement de recul, mais Severus ne le laissa pas s'échapper. Narcissa lui posa une main douce sur le bras.
- Ce n'est pas un piège Sirius. Lucius t'a fait innocenter. Tu vas venir te laver, te reposer, manger correctement. Nous allons te soigner, et te remettre sur pieds. Ensuite... Tu pourras décider ce que tu veux faire. Sur mon honneur de Black, je t'offre l'hospitalité.

Finalement, pour la plus grande surprise de Severus, Sirius hocha la tête, visiblement épuisé.

Prompt de demain : mourir d'amour