Insensible

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Dès le retour de Poudlard, la routine reprit pour tout le monde. Severus donnait ses cours, toujours aussi strict et exigent - prenant même plaisir à ôter des points aux Gryffondor. Harry, Charles et Drago assistaient aux cours, attentifs, veillant à travailler suffisamment pour maintenir d'excellentes notes.

Remus Lupin faisait de fréquentes visites - quel qu'en soit le motif - et essayait de discuter avec les frères Potter. Mais l'un comme l'autre faisaient en sorte de l'éviter soigneusement. Severus observait de loin leur petit manège, prêt à intervenir si Lupin se montrait plus insistant, tout en se délectant des échecs répétés du loup-garou.

Les jours passaient, peu à peu, sans qu'il n'y ait de grands changements. Le tournoi était toujours présent dans les esprits, mais tous attendaient désormais la troisième tâche qui n'aurait lieu que vers la fin de l'année.
L'intérêt porté aux champions s'était amenuisé, et Harry pouvait circuler librement dans l'école sans sentir des regards lourds de sens se poser sur lui.

Lucius avait profité de ses contacts pour museler Rita Skeeter, afin que son protégé ne fasse pas la une de la Gazette chaque jour. Avec l'aide de Severus, il avait fait en sorte de glisser dans l'oreille de Barnabas Cuffe - le rédacteur en chef de la Gazette - que la coupe de feu aurait dû être protégée et qu'il semblerait que n'importe qui ait pu glisser le nom de Harry Potter à l'intérieur.
Ainsi, un article au vitriol s'était interrogé sur les compétences de Dumbledore, et pendant quelques jours, le Directeur de l'école avait reçu plusieurs beuglantes de parents inquiets ou de sorciers se sentant soudain concernés par le bien être du célèbre Sauveur.

Le vieux sorcier avait affiché un air affable, comme si les reproches de parents furieux ne le touchaient pas, et il écartait les questions d'un sourire amical, haussant les épaules en marmonnant que les critiques étaient la rançon de la gloire.

Bien qu'il ait assuré à tout le monde qu'il allait bien, Harry n'était pas au mieux de sa forme.

Ses nuits étaient emplies de cauchemars, et il terminait régulièrement dans le lit de son jumeau, collé contre lui, le serrant pour se convaincre que Charles allait bien, et qu'il n'avait pas une fois de plus disparu.
Harry avait pris conscience qu'il pouvait faire face à beaucoup de choses sans broncher - après tout, il avait fait face à des dragons sans sourciller, et il n'avait jamais eu le moindre mauvais rêve à ce sujet - cependant, sa faiblesse principale était Charles.
Il était terrorisé à l'idée que son frère disparaisse. Qu'il ne soit plus près de lui.

D'aussi loin qu'il se souvienne, Charles avait été là, à ses côtés. Ils avaient fait face aux épreuves ensembles, et ils s'étaient mutuellement soutenus.
Aux côtés de son frère, Harry avait l'impression d'être invincible, intouchable.

Mais sa plus grande peur était d'être séparé de son jumeau. Il pourrait se sacrifier sans hésiter un seul instant pour permettre à Charles de s'en sortir.


Il n'en parlait pas évidemment. Il essayait juste de faire avec ses peurs les plus profondes, se répétant que Charles allait bien. Cependant ses cernes se creusaient sous ses yeux, et il devenait nerveux à cause de la fatigue.


Si Harry avait l'impression de maîtriser les choses et de cacher son mal-être, il était évident pour qui savait observer que l'adolescent n'allait pas bien.
Charles et Drago avaient été les premiers à s'en rendre compte. Ils avaient gardé le silence, parce qu'ils connaissaient Harry, et Charles tentait de rassurer son frère au mieux, l'entourant de son affection, lui montrant sa présence à chaque instant. La nuit, il le prenait dans ses bras, sans faire le moindre commentaire, attendant juste que Harry finisse par lui parler. Ça pourrait prendre du temps, mais Harry finissait toujours par lui dire ce qui n'allait pas.

Severus ensuite, avait noté l'air épuisé du Serpentard aux yeux verts, et sa baisse de concentration. Rien de bien flagrant, Harry restait un bon élève - après tout, il était bien entouré, et ses amis le poussaient à travailler régulièrement. Cependant, il n'était pas dupe et il s'en inquiétait.

Et puis Dumbledore. Aussi fou et manipulateur soit-il, il gardait un œil acéré sur les élèves et il avait vu les cernes de Harry. Pour sa part il était resté insensible au mal être du jeune homme. Il voulait pouvoir récupérer le garçon-qui-avait-survécu, pour en faire sa petite marionnette. Il savait que Voldemort finirait par revenir et il voulait être prêt, avec le héros du monde sorcier docile et attendant ses ordres.
Voir le gamin affaibli était une bonne chose pour lui : il attendrait encore un peu, puis il profiterait de ses faiblesses pour se poser en protecteur paternaliste. Il en profiterait pour planter les graines du doute au sujet de Sirius Black - ce fichu maraudeur n'était pas revenu pleurer dans ses robes - et tenterait de garder un maximum d'emprise sur Harry Potter.
Le second frère ne lui serait d'aucune utilité malgré sa puissance et il voulait bien le laisser à qui le voudrait.

Près de Harry, Drago ne perdait pas une miette de l'attention que suscitait son meilleur ami. Son père était un politicien, et il avait été habitué dès son plus jeune âge à comprendre les jeux de pouvoir. Il reconnaissait le regard calculateur de Dumbledore posé sur Harry, pour l'avoir souvent vu sur son père quand il convoitait quelque chose.
En parfait héritier Sang-pur, Drago affichait toujours un visage neutre face à Dumbledore, ne lui laissant pas voir à quel point il le haïssait - pas parce qu'il était le leader de la lumière, mais juste pour ses tentatives de blesser Harry. Cependant, l'adolescent ne comptait pas laisser la moindre occasion au Directeur de l'école de s'approcher trop près de Harry. Ainsi, il faisait en sorte de toujours être proche de lui, sur ses gardes.
Parfois Drago surprenait un regard plein de gratitude de Charles, et les deux amis échangeaient un sourire. Ils n'étaient peut être que des enfants encore, inexpérimentés, mais ils tenaient les uns aux autres, et rien ne pourrait jamais les séparer.

Ils étaient après tout des Serpentard, et même s'ils ne le montraient pas, ils se soutenaient les uns les autres au sein de leur maison. L'amitié entre les trois adolescents, fusionnelle, ne pourrait pas être brisée si facilement. Et c'était probablement le détail le plus important que Dumbledore négligeait de prendre en compte.


Prompt de demain : idées creuses

Tu es mon doubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant