L'enfant restait silencieux. Sa grand mère le tenait par la main, parlant à la maîtresse, il avait voulu écouter la conversation, mais dès qu'il avait entendu le nom de ses parents, son esprit s'était fermé sur lui même par automatisme. Évidemment, elle racontait l'histoire, Sasori n'avait pas été à l'école pendant une semaine, il fallait expliquer. Il finit par revenir à la réalité.
- Êtes vous sûre de vouloir le remettre dès maintenant en classe ? demandait l'enseignante en le regardant avec inquiétude.
- Oui, à la maison il ne fait plus rien, il reste assis, le regard vide, j'ai peur que ce ne soit pas bon pour lui de ressasser sa douleur en silence. J'aimerais qu'il soit avec les enfants de son âge, qu'il s'occupe.
- Oui, bien sûr. Allez, viens Sasori.
Elle prit la main du petit garçon, qui se laissa faire sans rien dire. Un pantin manipulé. Voilà ce qu'il était depuis cette nuit là. Tournant la tête pour voir son aïeule partir, le laissant là, il n'eut aucune réaction. Il n'avait pas pleuré quand il avait appris, ni les jours suivants. Il n'en avait pas envie, il n'avait envie de rien. Autour de lui, ses camarades jouaient dans la salle de classe, dans le coin poupées, ou bien avec les puzzles, ou encore dans la petite maison avec les animaux en bois. La maîtresse s'accroupit pour se mettre à son niveau.
- Tu as envie de faire quelque chose ?
Sasori vrilla ses iris dans ceux de l'enseignante, et celle ci fut happée par son nouveau regard. Auparavant, ses yeux ambrés pétillaient de vie et de joie, et son sourire illuminait son visage. Ils étaient à présent bien plus intenses, comme s'ils voyaient à travers elle avec précision. Mais ils n'exprimaient rien de particulier. Ni tristesse, ni peur, ni colère.
- Non.
Sa voix aussi avait changé. Elle était froide, dénuée d'expressions. La jeune femme frissonna, pauvre enfant.
- Que dirais tu de dessiner quelque chose ? Je sais que tu n'as jamais trop été tenté par cette activité, mais ça te permettrait de t'exprimer un peu ?
- D'accord.
Elle le fit asseoir sur une table et lui donna feuilles blanches et crayons. Le petit garçon saisit le premier bâtonnet et il commença à tâcher le papier. La maîtresse prit quelques minutes pour s'occuper du reste de la classe, séparant deux fillettes qui se bagarraient pour une voiture, et mouchant le nez du petit Arthur qui avait éternué. Elle demanda ensuite aux enfants de ranger les jouets pour s'installer sur les chaises autour des tables et se retourna pour voir où en était Sasori. Le petit garçon aux cheveux rouges avait dessiné un scorpion écarlate. L'enseignante écarquilla les yeux de surprise, non seulement il avait choisi un animal particulier, peu connu et encore moins apprécié, notamment des plus jeunes, mais en plus il l'avait dessiné avec talent, ce qui était surprenant pour son âge.
- C'est joli, dit-elle en souriant. Où as tu appris à faire ça ?
Sasori plongea encore une fois ses iris d'or dans ceux de l'adulte.
- Nulle part. Mais c'est mon animal préféré.
- Ah oui ? Pourquoi ?
- Il me ressemble.
L'enseignante sourit, elle avait oublié que le nom de son jeune élève signifiait scorpion en japonais. La mère du petit garçon venait du pays du soleil levant si elle se souvenait bien.
- Et puis le poison aussi, lâcha-t-il ensuite. C'est la mort et la douleur, ça aussi ça me ressemble.
La maîtresse perdit son sourire.
**********
La récréation débuta dans un grand bruit de cris enfantins. Les élèves de l'école maternelle se retrouvaient dans cette immense cour plusieurs fois par jour. Sasori était allé près du grillage, regardant la rue en silence. Un mouvement attira son attention derrière lui et il se retourna. Plusieurs élèves de sa classe ou d'autres groupes étaient près de lui, le fixant avec curiosité.
- Pourquoi t'étais pas là ? demanda une fillette.
- Pourquoi c'est une vieille dame qui t'a amené aujourd'hui ? questionna un autre garçon.
- Et pourquoi la maîtresse elle s'occupe plus de toi aujourd'hui ? dit un troisième élève.
Un enfant, d'une classe de grande section, rigola.
- Vous êtes bêtes, vous savez rien. Moi j'ai entendu les grands parler.
Tout le monde se tourna vers lui, et il se pencha en avant, prenant une voix moqueuse.
- C'est parce que ses parents ils sont morts !
Sasori tourna la tête pour le regarder. Il était content de lui, souriant avec fierté, comme pour lui dire que lui avait encore les siens. Le petit garçon ne ressentit pas de colère. Mais il avait compris que l'autre le prenait de haut, et il n'aimait pas ça. Il cessa d'être un pantin, du moins de l'extérieur, il retrouva la maîtrise de son corps, et la certitude qu'il ne resterait pas sans agir. Il bondit sur son aîné, et commença à le frapper avec toute la force que son corps contenait. Les autres enfants partirent en courant et en criant. Quand la maîtresse arriva enfin, quelques minutes après, l'élève de grande section avait le visage abîmé, il saignait à divers endroits et pleurait à chaudes larmes pendant que Sasori continuait de le marteler de ses poings, le regard inexpressif.
**********
Sasori s'en souvenait maintenant, c'était à ce moment là que son esprit avait basculé. Mais cela faisait tellement longtemps qu'il avait l'impression d'avoir toujours été ainsi. Personne ne lui avait plus manqué de respect après cet instant, les autres le fuyaient, et il avait pu se laisser plonger dans la solitude. Il ne s'en était jamais plaint, il aimait être seul, mais inconsciemment, le vide en lui s'était propagé, jusqu'à lui faire perdre ce qui lui restait d'émotions et de sentiments. Le petit garçon aimant envers sa famille s'était brusquement refroidi. Il n'avait plus essayé de se rapprocher de sa grand mère, et cette dernière ne l'avait jamais obligé à lui montrer de l'affection. Ils s'étaient simplement côtoyés, vivant au même endroit, l'adulte éduquant l'enfant et s'occupant de lui sans s'immiscer dans son développement psychologique. Peut être aurait-elle du. Le garçon était resté seul ainsi longtemps, jusqu'à l'entrée au CP, où il avait rencontré un enfant plein de fougue et d'énergie, un petit blond du nom de Deidara.
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Fanfiction Naruto - Akatsuki
FanfictionDe simples étudiants. Vraiment ? Réunis dans la vie réelle par leurs études et leurs vies sociales. Réunis ailleurs par leur désir d'amener la paix par la domination totale. Et si le monde faisait face à de jeunes adultes emplis de rêves et d'ambiti...