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Chapitre 2 : Histoire et rencontres

*1er mai 845*

La moitié des recrues s'étaient attroupée autour d'Eren pour l'assaillir de questions sur les Titans responsables de la chute du Mur Maria. Cara, Mikasa et Armin avaient dû s'asseoir ailleurs pour leur laisser de la place et manger tranquillement. Et moi, je me retrouvai quasiment à l'autre bout. Seule.

Je n'enviais pas du tout Eren de raconter les événements du 8 mai 845. Les Districts et les villages au sein du Mur Rose et du Mur Sina avaient entendu toutes sortes de rumeurs suivant les annonces officielles de l'attaque, alors ils ne savaient pas qui croire, et si c'était vrai ou faux. Leur curiosité pouvait se comprendre, mais ça restait tout de même lourdingue pour les survivants de Shiganshina. Les recrues faisaient répéter plusieurs fois l'histoire sans avoir conscience de la douleur traversée.

C'est pour cette raison que je ne parlais quasiment jamais de cette sombre journée. Ca ne semblait pas être la meilleure idée du siècle de garder au fond de soi sa souffrance et tous ces sentiments négatifs, mais ça ne pouvait pas être pire que de les raconter à voix haute aux autres.

Non ! Ne pense pas à tout ça ! Tu risques de sombrer encore plus ! Déjà que les nuits ne sont pas super...

- Eh ! Est-ce que tout va bien ?

Trop absorbée par mes pensées sombres, je n'avais pas entendu que l'on s'approchait de ma table. Une fille aux longs cheveux blancs et aux yeux roses — ça existait vraiment, cette couleur de yeux et de cheveux ? — s'était aperçue de mon mal-être, et elle avait dû deviner que je faisais partie des survivants de Shiganshina. Alors, elle était venue me voir pour s'assurer que je me portais bien.

Sa gentillesse me frappa en premier. A part elle, personne autour de nous n'avait vu la tronche que je tirais, tellement ils étaient obnubilés par le récit d'Eren. L'armée n'était pourtant pas synonyme de douceur, surtout quand on voit ce qui arrivait lors des expéditions du Bataillon. Il fallut un instant avant de me ressaisir complètement et de répondre à la question.

- Oui, tout va bien. Désolée, j'étais perdue dans mes pensées et...

- Oh, tu n'as pas à t'excuser, ne t'en fais pas ! s'exclama la fille aux cheveux blancs en riant. J'ai juste été assez surprise d'une telle maturité sur ton visage, ce n'est pas tous les jours que l'on voit ça chez quelqu'un. Je m'appelle Aénor Casanova, et toi ?

- Julia Rosenberg. Je me souviens de toi, tu étais passée après la face de cheval qui s'est écroulée et Marco Bott. Tu étais aux côtés de ton frère, il me semble, non ?

- Mon frère jumeau. Privel. Ma famille est originaire du District de Perse. Nous avions dû abandonner notre maison à l'arrivée des Titans.

D'un coup, je me sentais beaucoup moins seule. Le déracinement des personnes ayant toujours vécu au sein du Mur Maria en brisait plus d'un psychologiquement... mais avec l'invasion des Titans et les morts qui s'étaient accumulées, ça n'arrangeait pas à la reconstruction.

Nous discutâmes un moment, et je découvris en Aénor une jeune fille emplie de sagesse, pacifique et attentionnée, mais également déterminée et capable de se débrouiller dans des situations difficiles. Selon elle, la vraie justice était capable de repousser toutes les corruptions et les discriminations de ce bas monde. Il s'avérait que nous avions beaucoup de points communs dans la façon de penser et d'agir. Qui aurait cru cela, venant de deux personnalités où quelques traits divergeaient ? Son frère, quant à lui, adorait s'amuser et possédait un bon sens de l'humour, au grand désespoir d'Aénor. Privel avait le don pour foncer tête la première dans les ennuis.