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Chapitre 72 : Maman

//PDV extérieur\\

*15 août 850*

Les nouvelles traversèrent le camp d'entraînement comme une traînée de poudre. L'escouade tactique du caporal-chef Livaï Ackerman et du capitaine Anna Laguerra, et la chef d'escouade Hansi Zoé étaient arrivés dans la matinée pour parler avec le sergent-instructeur Keith Shadis en personne. Ça devait être vachement important pour que ce dernier accepte et qu'il demande aux autres instructeurs de se charger des recrues en son absence. Cette décision eut pour effet de causer une grande surprise chez tout le monde au sein de la nouvelle brigade.

Connaissant le caractère du sergent Shadis à présent, les recrues de la 106ème Brigade d'entraînement n'ignoraient pas son côté bourru, et qu'il valait mieux éviter de se retrouver dans son viseur, involontairement ou non.

Théa Rosenberg était bien placée pour le savoir. Pour s'être fait tirer les oreilles plus d'une fois par Shadis, à cause de son humour noir et le fait qu'elle soit une farceuse impénitente (sans compter Barrett Aaltonen, un de ses amis, parce qu'il mangeait des quantités de nourriture qui dépassaient de loin l'entendement humain), elle avait appris à ne pas dépasser les bornes des limites.

Depuis la visite de ses frère et sœurs le 31 juillet dernier, Théa avait eu besoin de temps pour réfléchir. Le retour de ses souvenirs l'avait pas mal secouée, plus secouée qu'elle ne voulait se l'admettre. Au point de vouloir du temps pour réfléchir à tout ça, et se remettre les idées en place - elle avait demandé à son aînée cette faveur. Ça faisait beaucoup à encaisser. Et savoir que les parents de son amie lui avaient caché des choses concernant les derniers membres de sa famille, soi-disant pour la protéger, la mettait hors d'elle.

Elle qui, d'habitude, savait faire des blagues.

Les mensonges, en revanche, ce n'était pas quelque chose qu'elle acceptait.

Depuis quinze jours, Julia était restée éloignée de sa sœur. Elle comprenait tout à fait son ressenti et elle était prête à lui laisser tout le temps nécessaire, ainsi que de l'espace, afin de se remettre d'aplomb et la laisser décider de ce qui allait suivre. (Pour ça, Théa ne pourra jamais assez la remercier.)

Lui pardonner, et recommencer leur lien de sœurs sur de bonnes bases.

Ou chacune allait continuer sa vie de son côté, avec une pointe de tristesse et le ressentiment vis-à-vis des menteurs ayant fait perdre cinq ans à la fratrie Rosenberg.

Il y avait bien une chose sur laquelle Julia, Théa et leur frère Viktor étaient d'accord : ils n'arrivaient pas à pardonner le docteur Karstedt et son épouse, pour avoir caché la vérité. D'avoir laissé croire tout ce temps que Théa était morte, laissant Julia plongée dans sa culpabilité. Théa avait au départ cru que Mitsuha, son amie la plus chère et aussi la fille de l'ancien collègue de sa mère, avait été mise dans le secret ; mais elle avait bien vu, par la suite, que l'asiatique non plus n'était pas au courant. Une fois mise au courant, Mitsuha avait aussitôt écrit à ses parents pour leur demander comment ils avaient pu cacher une telle chose aussi longtemps. Et Théa, bien sûr, leur avait aussi envoyé une lettre incendiaire, disant qu'elle les haïssait et qu'elle leur en voulait pour leurs cachotteries.

Les parents de Mitsuha se sentaient déjà suffisamment coupables par rapport à leurs choix passés. Viktor et Julia les avaient bien pourris - Julia encore plus -, alors ils avaient beaucoup de mal à regagner leur confiance. Ils avaient répondu à la lettre de leur fille et à celle de Théa pour tenter de s'expliquer, que ce n'était pas leur intention de causer du tort ou de créer des malentendus, et encore moins cacher la vérité à Théa ou à ses sœurs et son frère.