Chapitre 37

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Nous quittons la maison de Pimlico aux alentours de treize heures trente à bord de la luxueuse Aston Martin DB11 Coupé de mon Golden Boy. J'ignore comment tous nos bagages sont rentrés dedans mais qu'importe. S'engageant sur l'autoroute, Gareth en profite pour appuyer sur le champignon, et s'il continue comme ça, nous y serons en un temps record. Ah les hommes et les voitures ! Moi, je n'y connais rien, je n'aurais pas été capable de donner le nom de la marque s'il ne me l'avait pas dit.

— Je peux te poser une question ? demandé-je après plus d'une heure de route.

J'ai parlé si doucement que je crains qu'il ne m'ait pas entendue mais il répond, non sans appréhension.

— Bien sûr, Goldie, vas-y.

— Désolée de te demander ça, mais pourquoi tu ne parles jamais de ton père ?

Je vois Gareth se crisper à côté de moi, il serre tellement le volant que ses jointures ont blanchi. Une ombre passe dans ses yeux qui se voilent tout à coup. Je pose ma main sur sa cuisse en un geste réconfortant. Il s'éclaircit la gorge avant de parler :

— Il est mort quand j'étais petit.

— Désolée.

Ça ne suffit pas de dire ça, je le sais bien, mais que dire d'autre ?

Je sens dans la manière qu'ont ses mains de serrer le volant et son visage se durcir qu'il ne s'en est pas remis aussi bien qu'il essaie de le faire paraître.

— Je t'ai demandé ça parce que je ne veux pas faire de boulettes devant ta famille, tu vois...

— Oui, je comprends. J'aurais dû t'en parler.

Il semble si triste que ça me brise le cœur.

— Non, je pense bien que ça doit être difficile d'en parler. Tu as bien vu pour moi, dis-je en faisant référence à tous mes problèmes dus à ma relation avec Pierre, et ce n'est rien comparé à toi.

Il ne dit rien pendant un moment, se contentant de regarder la route, jusqu'à ce qu'il parle, la voix chargée d'émotion.

— C'était le jour de mes six ans. Il m'amenait chez mes grands-parents où était organisée la fête, un chauffeur ivre nous est rentré dedans. Mon père est mort sur le coup, alors que moi, je m'en suis sorti avec un bras cassé. Un putain de bras cassé !

Il finit sa phrase en donnant un coup de poing sur le volant. Désormais, il est en colère et il y a de quoi devant l'injustice du destin face à la mort.

Je repense à ce petit garçon qui a perdu son papa le jour de son anniversaire, mon cœur se serre et mes yeux se remplissent de larmes que je chasse en clignant des paupières. Si innocent et fragile, mais tellement fort car il a surmonté tout ça. Je serre sa main qui est négligemment posée sur le levier de vitesse.

— Arrête-toi, on va faire une pause.

Sans poser de question, Gareth entre dans la première aire d'autoroute. Il se gare devant un bâtiment qui doit renfermer un café et nous sortons de la voiture. Quelques passants nous dévisagent, sûrement à cause de la voiture qu' l'on vient de quitter. Après avoir bu chacun un thé et mangé une pâtisserie, nous remontons en voiture.

— Comment tu te sens ? demandé-je en voyant ses yeux toujours tristes.

— Ça va aller. Ça fait presque trente ans que ça va.

À ces mots, je comprends que le sujet est clos et qu'il ne veut pas être pris en pitié. Ce n'est pas ce que je veux lui offrir, je veux lui donner mon soutien et mon amour.

— Je t'aime Gareth, tu le sais ?

— Je t'aime aussi, répond-il en ignorant ma question.

Il m'embrasse pour souligner que la discussion est terminée avant de démarrer. Je m'installe confortablement dans le siège chauffant en cuir moelleux. L'intérieur de la voiture n'est que cuir et bois ciré mais surtout richesse. Les sièges sont comme des nuages. Je n'ai pas grandi dans l'opulence même si mes parents ont de l'argent, et je n'ai jamais voyagé dans des voitures aussi confortables. Retirant mes chaussures, je me blottis contre la vitre et ferme les yeux.

Sapphire Eyes (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant