Les jours passent sans que nous n'ayons parlé de l'incident avec sa famille. Je vois bien qu'il en souffre mais je ne peux le forcer à s'ouvrir à moi s'il ne le veut pas ou si c'est trop dur. J'ai aussi des problèmes sur la conscience dont il ne connaît pas vraiment l'existence, mais il comprend trop bien ce que je ressens pour ne pas m'en parler. Je sais que lorsque je me sentirai capable, je lui dirai tout.
Je m'interroge quand même sur le père de Gareth. Il est évident que s'il est en vie, il a divorcé puisque sa mère s'est remariée à un certain Smith. Gareth n'a pas apprécié la manière dont il m'a regardé, et moi encore moins. Quand je lui ai demandé ce qu'il allait faire par rapport à ça, il m'a simplement dit qu'il allait s'en occuper et de ne pas m'en inquiéter. Je lui ai fait promettre de ne pas utiliser la violence car je n'ai pas envie que quelqu'un soit blessé par ma faute, même si ce quelqu'un en question est un homme suffisamment vieux pour être mon père qui louche sur mon décolleté.
Je ne sais pas si c'était ma présence, mais j'ai trouvé que aussi bien les grands-parents que la mère et le beau-père n'ont pas l'air d'apprécier Gareth qui est pourtant un ange à mes yeux. S'il se comportait comme au travail, arrogant, supérieur, froid, avec eux, je comprendrais. Pourtant, après le peu de temps passé en leur compagnie, je n'ai pas trouvé que Gareth se comportait ainsi, il avait plutôt l'air d'essayer de contenir sa colère et tenter d'être aimable.
Je mets mes questions de côté et me reconcentre sur mon boulot. Je n'arrête pas de penser à mon Apollon toute la journée, alors je travaille vraiment plus lentement. Mais, heureusement pour moi, personne ne semble s'en être aperçu. Mon téléphone de bureau sonne, je cours pour répondre et arrive juste à temps.
— Goldie.
Sa belle voix qui me donne des papillons dans l'estomac m'empêche de débiter la phrase que je dis lorsque je réponds au téléphone.
— Oui ?
Je m'assois à mon bureau puisque j'ai envie de rester au téléphone un moment tant j'aime l'écouter parler. C'est si agréable qu'il pourrait me parler de la météo pendant des heures et je serais captivée.
— Je suis désolé mais il faut que j'annule pour ce week-end.
Ne pas passer le week-end avec lui me rend triste, même si ce ne sera sûrement pas le dernier.
— C'est pas grave, on pourra se voir la semaine prochaine. (Je marque une pause durant laquelle je commence à réfléchir à ce que je vais pouvoir faire ces deux jours.) Rien de grave, j'espère ?
— Non, rien de grave. Ça te dit d'aller boire un verre après le boulot ?
J'acquiesce. Il me propose un bar près du bureau que je ne connais pas et qui, selon lui, sert les meilleurs cocktails de Londres.
— À ce soir, beau gosse, dis-je avant de raccrocher.
Je me demande bien ce qui a causé cette annulation, pourvu que ce ne soit qu'une histoire de bureau. Il te cache quelque chose, me dit une voix dans ma tête, il voit quelqu'un d'autre, c'est certain. Je la fais taire et retourne aux essayages en vue du prochain défilé, l'esprit occupé.
Même en me concentrant sur les modèles, mon esprit n'arrête pas de revenir à cette même question : pourquoi a-t-il annulé ? La raison est sûrement anodine, j'essaie de m'en convaincre mais en vain car ma nature pessimiste reprend toujours le dessus, m'assurant qu'il va voir ailleurs ce week-end. J'aimerais tant lui demander ce qui l'empêche de me voir samedi et dimanche, mais je suis parfaitement consciente que c'est un peu indiscret.
Étant donné que nous ne nous sommes jamais jurés de n'avoir aucun secret l'un pour l'autre, je ne peux exiger des confessions de sa part que ce soit au sujet de cette fameuse annulation ou de sa mésentente avec sa famille.
VOUS LISEZ
Sapphire Eyes (Terminé)
Roman d'amourIl est mon patron. Je suis son employée. Il m'attire. Je le repousse. Il revient. Mes démons aussi. Ma raison me crie de fuir. Mon corps ne veut que lui. Que faire ? Je le sais très bien.