Rina, 13 ans se replonge dans ses souvenirs de famille via les cartes postales qu'elle écrivait enfant avec son frère de quelques années plus âgé.
Elle redécouvre leur complicité, les moments marquants de leur histoire mais également des parties de...
Je m'étire douloureusement après avoir passé deux bonnes heures à nettoyer parfaitement la moto de Keisuke. Le soleil est à son zénith, je questionne mon estomac pour savoir s'il a faim. La réponse est négative et je décide donc de m'allonger à nouveau pour prendre une nouvelle carte postale. Mon cœur loupe un battement en voyant la date écrite en haut : 16 août 2001. Ma gorge se serre lorsque je me remémore ce jour-ci et celui qui l'a suivi : le passage de l'innocence enfantine à la gestion d'un deuil d'adulte.
Je secoue la tête et me concentre sur la carte, qui est une photographie que mon frère a collée sur un morceau de carton.
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Je lis l'écriture de mon frère qui précède la mienne :
" Avec les gars on a décidé de faire une soirée entre bonhommes. Pachin doit même ramener de l'alcool. On a dit que ce serait la dernière soirée de notre enfance et qu'après ça on deviendra des adultes !"
Puis vient mon paragraphe :
"Keisuke dit qu'il va devenir grand ce soir, mais j'en ai pas envie, j'ai envie qu'il me fasse rencontrer ses copains mais j'ai pas le droit, je veux y aller avec lui mais il m'a raconté qu'ils allaient...boire de l'alcool. Alors que c'est interdit parce qu'on est des enfants ! Je vais rien dire à papa et maman parce qu'on a fait une promesse et qu'ils sont fatigués."
Je soupire, un rire jaune s'échappe de ma gorge : il voulait devenir un adulte après cette soirée, ça n'a pas loupé...
Durant la même nuit, Keisuke c'est fait arrêté pour homicide involontaire mais c'est le garçon en sa compagnie qui a été accusé. Durant la même nuit, notre père est mort.
Souvenir
Je suis allongée, seule dans mon lit. Pas de Kei pour me lire une histoire, pas de maman pour me faire un bisou, pas de papa pour me border correctement. Je regarde le plafond en silence, me sentant un peu vide. Les sirènes de police résonnent dans le quartier et je pense à mon frère et ses amis qui font des choses interdites, j'espère qu'ils ne se feront pas coincer. Je m'endors doucement bercée par mes pensées.
Au milieu de la nuit je suis réveillée par des cris et des pleurs, je sors de ma chambre en courant et trouve ma mère assise dans les escaliers au téléphone avec quelqu'un, elle pleure beaucoup et raccroche après quelques minutes. Je m'approche d'elle doucement et pose mes mains sur ses épaules et la serre contre moi. Elle enlève mes mains de ses épaules d'un geste presque brusque :
"Va dans ta chambre Rina. Je viendrais te chercher, habille toi.
- Mais maman c'est la nuit, on va aller où ?
- Je ne sais pas ma chérie, vas-y, s'il te plait."
Face au visage en pleurs de ma mère je retourne dans ma chambre pour m'habiller chaudement. Je glisse dans ma poche des biscuits et serre la chaîne autour de mon cou en espérant qu'il ne soit rien arrivé à mon frère.
