Rechute

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Je me réveille en sursaut, étouffant le cri qui voulait sortir de ma gorge. Mes mains parcourent mon visage couvert de larmes et de gouttes de transpiration, forçant ma respiration je m'incline vers la bouteille en plastique posée sur le parquet de ma chambre.

Lorsque mon rythme cardiaque est redescendu à une vitesse normale je m'étire et fixe le ciel sombre de la nuit.
Merde quelle heure il est encore ?

L'écran de mon téléphone s'illumine sous le contact de mes doigts :
31 octobre 2007, 1h48

Un simple "ah" sort de mes lèvres. C'était donc ça, la raison de ce cauchemar, le souvenir de mon frère. Il était là face à moi, un bras tendu, recouvert de sang, me hurlant que j'allais échouer dans la mission qu'il m'avait confié. Ses yeux débordaient de larmes comme les miens actuellement, ses paroles étaient chargées de haine, il me détestait, chacun de ses mots semblable à une douche glaciale engourdissant mes os.

Kei n'aurait jamais dit ça, Kei ne m'aurait jamais parlé ainsi. Kei... Kei est mort il y a deux ans et je l'attend encore chaque soir, j'attend d'entendre ses pas remonter les escaliers, j'attend que la porte de ma chambre s'ouvre sur son visage éclairé par la lumière de son téléphone, j'attend le bruit du paquet de M&Ms qu'il secoue avec un sourire malicieux. J'attend sa présence.

Je me laisse tomber lourdement et depuis un an, l'envie de le retrouver se fait plus forte que jamais. Je secoue la tête, non, pas maintenant, pas en laissant le bordel que je crée derrière moi au quotidien comme ça. Pas en laissant Chifuyu seul dans incompréhension, pas sans avoir à cette grande perche idiote d'Hanma que, moi aussi, je l'aimerai toute ma vie.

Je sors par la fenêtre de ma chambre, une bourrasque fait claquer violemment ma longue veste blanche, je frisonne et rabat la capuche de mon sweat noir sur mes cheveux. La clé de ma moto sonne doucement dans la poche de mon indémodable cargo tandis que je m'agrippe à la gouttière.

Bientôt le moteur ronronne sous mes fesses, j'inspire profondément. Cette nuit sera celle où je commémorerai seule la disparition de ma moitié. Je pousse la poignée d'accélération dans ses derniers retranchements et relâche celle de frein d'un coup, démarrant en trombe dans la ruelle silencieuse.

Je fuse à travers la nuit, aux milieux des champs vides à perte de vue en cette période de l'année. Je fuse sans réfléchir, vidant mon esprit de toutes les pensées parasites qui pourraient me déconcentrer de ma conduite irresponsable.
Il n'y a plus qu'en frôlant la mort que je me sens vivante.

Une lumière apparaît au loin, un phare unique, une moto. Je décélère afin que l'on se croise prudemment. La silhouette sur la moto me semble voûtée dans la lumière de mon feu avant, pliée en deux, une main sur le torse, elle roule vite, bien plus vite que moi.
Je fais quelques appels de phare qui semble réveiller le conducteur tandis que je pose pied à terre tout en suivant les ordres que me dicte une petite voix intérieure tandis que la prudence me hurle de remonter sur mon bolide.

L'autre ralenti avant de se stationner sur le bas côté parallèle au mien.

"Merde alors..."

Cette voix.

"Baji me dit pas que c'est toi."

Hanma.

Il se laisse tomber au sol, une main toujours sur l'abdomen.

"Dis tu pourrais arrêter de me contempler et venir m'aider ?"

Sans un mot j'approche de lui. Je distingue la maigreur de ses traits, les cernes de ses yeux, la tâche de sang qui colore son t-shirt blanc, la marque laissée par le coup de lame qui a déchiré sa veste du Kanto.

Volonté - Tokyo revengers x OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant