Part.IV - 3.3 : Le cadet des Lyaren

1 0 0
                                        

Debout devant la grande baie vitrée des appartements privés de l'empereur, Dante scrutait les cadavres frigorifiés des ambassadeurs, dressés sur leurs jambes blessées, tenues couvertes de sang, avec le plus grand dégoût. Depuis six jours, ils demeuraient immobiles face aux bourrasques glaciales du domaine, soutenus par la magie nécromancienne d'un Greeph en pleine possession de ses moyens.

— Vous semblez pensif, lâcha Yuki d'une voix calme.

— Hum, se contenta de gémir le chambellan.

— Des regrets ? demanda Nephyl, assis à côté de la divinatrice.

— A quel propos ? répondit l'assassin.

— La Colline. Aegidius.

Les suggestions de l'empereur plongèrent Dante dans une profonde réflexion. Ces six derniers jours avaient été des plus chargés, mais un événement, bien plus que les autres, demeurerait dans l'Histoire.

Le jeudi 23 septembre, Rosae Luminarii s'était rendu au Mausolée de sa famille grâce à son Don. De là, elle avait tué de nombreux membres de la garde royale afin de se frayer un chemin dans la salle où s'étaient réunis Aegidius, le Conseil, les forces spéciales et les jeunes représentants de l'Académie Royale. C'est dans cette pièce qu'elle assassina son propre frère, Aegidius.

Dante se remémorait ainsi les moments passés avec cet homme qui l'avait accueilli, non sans arrières pensées certes, tout comme ceux qu'il avait connus sur le promontoire. Après une longue inspiration, il répondit :

— Aegidius Luminarii n'a jamais été mon roi, comme la Colline n'a jamais été mon foyer. Vous le savez, monseigneur.

— Alors pourquoi cette mine si lugubre ? demanda Nephyl. Quelque chose te préoccupe ?

— Hum... Deux, à vrai dire. M'autorisez-vous à parler librement ?

— Vas-y.

— Les soldats que le Conseil a envoyés, ils ne méritent pas ça, expliqua-t-il en ne quittant pas des yeux les marionnettes à l'extérieur. La manipulation des morts, j'ai bien conscience des avantages que nous allons en retirer, mais tout de même. Nohaï Lyaren... Si jeune... Bref... Ce qui me rend si songeur, c'est que l'éventualité de voir débarquer Sylvanus Santora et ses protecteurs, quoi que l'on puisse dire, ça ne m'enchante pas.

— Cessez de vous tourmenter, chambellan. Pardon, ancien chambellan, rectifia Yuki. Santora compte bel et bien venir avec une escorte à faire cauchemarder les Démons, mais l'heure du combat n'est pas encore venue.

— Qu'est-ce qui peut encore nous retenir ? demanda Dante. Les adjuteurs Neroja, Tsuga, Lyaren, Moder et Derkam sont morts, ou pire, tout comme les chefs Sorelias et Nortas. Santora représente notre ultime menace, le dernier rempart qui peut se dresser sur notre chemin.

— La Colline n'est qu'une étape, vous le savez, dit la divinatrice. Le premier pas sur une longue route semée d'embûches. Certes, une fois ce point réglé, nous aurons bien avancé, mais c'est loin d'être le seul problème à régler.

— C'est à dire ? demanda l'assassin.

— Yuki s'inquiète de l'avancée de plusieurs troupes d'asuras en direction de la Citadelle, répondit Nephyl.

— Depuis combien de temps cela dure ?

— Plusieurs semaines, dit la vieille femme.

— Pourquoi n'ai-je pas été averti ? s'étonna Dante.

— Vous étiez trop occupé avec Aegidius et la Colline voyons.

— Et c'est surtout le cadet de mes soucis, ajouta l'empereur.

La Colline - Le Mythe des Deux SorciersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant