Chapitre 21 : Double surprise

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- Sofia ? Attends, mais c'est bien toi ?

- Oui, Thomas, c'est moi. Je suis si contente de te voir !

La jeune femme de dix-huit ans se rua sur moi et m'enlaça de toutes ses forces.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Enfin, je veux dire... Je ne m'attendais pas à te revoir ici, maintenant.

Elle desserra l'étreinte et me regarda avec peine dans le blanc des yeux.

- Ce n'est pas le bon moment, c'est ça ? Je ne t'en voudrais pas si tu...

- Rien à voir, So'. C'est juste...étonnant. Ce n'est pas toi, la...surprise de mes parents ?

Sofia ne cacha pas son étonnement face à ma question soudaine.

- Une surprise ? Ah non, pas du tout !

Un silence bref s'installa entre nous. Ni l'un ni l'autre ne savait quoi dire pour le rompre... Mais Sofia prit les devants.

- Dis moi... Je suis de passage ici, et je voulais prendre tes nouvelles de toi et de ta famille. Depuis...l'accident.

La dernière fois où j'ai vu mon amie, c'était il y a six ans, la veille du décès de mon frère, à ma fête d'anniversaire.
À l'époque, Lucas, elle et moi, formions un véritable trio inséparable sur les bancs de l'école. Nous étions jeunes, innocents, mais cela n'empêcha pas le fait qu'un duo se dessinait : mon frère et mon amie avaient toujours été amoureux l'une de l'autre, depuis qu'ils se connaissent. Mais ils n'avaient jamais tenté de rapprochement, se disant...qu'ils avaient le temps.

Le décès de mon frère a très vite ramené Sofia à la réalité. La réalité qui fait mal, la réalité qui fait souffrir, la réalité que nous n'avons pas le courage d'affronter parfois, la réalité que plein de gens fuient. Sofia a fait partie de ces gens. Dès qu'elle a appris ce qu'il s'était passé à propos de mon frère, elle a déménagé dans la capitale avec ses parents et a rompu tout contact avec tous ses amis d'ici.

Elle est partie sans demander son reste et je l'ai longtemps considérée comme une lâche. Mais avec le temps, j'ai appris à lui pardonner. Je savais à quel point elle aimait mon frère, à quel point elle rêvait d'être un jour avec lui. Alors elle a souffert autant que moi, mais jamais de la même manière. Parce que je n'avais plus mon soutien quotidien, la personne qui me permettait d'avancer. Parce qu'elle n'avait plus près d'elle la personne avec qui elle voulait vivre, du haut de ses douze ans à l'époque.

- Je sais que je suis partie comme une voleuse, il y a de ça six ans. Mais il n'y a pas un seul jour depuis l'accident où je ne pense pas à ton frère et à toi. J'ai décidé de revenir sur un coup de tête. Tu as dû m'en vouloir d'être partie comme je l'ai fait, mais sache que je l'ai fait sans réfléchir. Je m'en veux, moi aussi. En ce moment, je vis une période extrêmement difficile et j'avais besoin de renouer avec mon passé, bien qu'il soit douloureux. Et tu vas peut-être refuser de me parler car je suis revenue comme une fleur aujourd'hui. J'ai toujours rêvé de ce moment où j'allais revenir ici, mais je n'en ai jamais eu le courage. Je me contentais de ressasser nos bons moments tous les trois, mais j'ai réalisé que ce n'était pas suffisant. Je suis désolée si je t'ai fait encore plus de mal que tu n'en avais déjà. Je regrette énormément, tu peux me croire sur parole, Thomas.

Je ne lui en voulais pas vraiment, désormais. J'avais réussi à passer au dessus des évènements, sans tout de même les négliger. Car s'il y a une chose qui ne peut-être qu'inoubliable, c'est bien la mort de quelqu'un que l'on aime.

- Je comprends, Sofia. Tu comptes rester longtemps ici ?

Elle plongea son regard mordoré dans le mien avant de déclarer.

Il a suffi d'un pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant