Sédah - La fille cachée d'Hadès - T1

Chapitre 29 - Le premier tissage d'illusion - partie 2

Sédah referma la porte derrière leurs trois camarades, heureuse de se retrouver enfin seule avec Maddy et Umbra. Elle ne tarda pas à entendre la voix veloutée et douceâtre d'Umbra murmurer dans sa tête.

— Demande-lui de faire un sort d'illusion afin que personne ne puisse nous entendre, suggéra-t-elle.

— La porte n'est-elle pas suffisante pour assurer notre protection ? réagit Sédah avec une naïveté confondante.

— Quoi ? l'interpella Maddy en fronçant les sourcils. Je ne comprends pas le sens de ta question. Pourquoi me parles-tu de la porte ?

— Elle ne sait pas que je te parle, ne put s'empêcher de s'impatienter Umbra, consternée.

— Désolée Maddy... Saurais-tu créer une illusion pour que personne dans l'école ne puisse nous entendre ?

— Oui, je sais le faire. Le seul hic, c'est que nous n'avons pas le droit de pratiquer la magie dans nos chambres. Nous prenons là un gros risque, réagit-elle.

— Enfin... Si on venait à nous découvrir... Veux-tu quand même que nous nous y hasardions ? ajouta-t-elle avec une pointe d'hésitation dans la voix.

— Oui ! Je crois que nous n'avons pas le choix, sourit-elle.

Cette idée déclencha une folle excitation chez la jeune fille. Les reflets cuivrés de sa chevelure rousse se mirent aussitôt à vibrer. Sédah sourit. Elle avait chaud au cœur de partager cette aventure avec sa nouvelle amie. Maddy se redressa fièrement et commença à livrer ses conseils avec empressement.

— Pour tisser cette illusions, il faut que tu prononces « chambre muette » en latin tacet locus. Tu dois visualiser l'absence de son dans la chambre que nous sommes en train d'occuper. Il est important d'être la plus précise possible dans le choix des mots. Il y a toujours d'autres façons d'énoncer une illusion pour la tisser, mais celle-ci fonctionne bien. Je l'ai déjà testée, fit-elle en pinçant malicieusement le bout de sa langue à la commissure de sa bouche.

— Je ne pensais pas à une illusion aussi simple. Il faudrait quelque chose de plus subtil. Je ne serais pas étonnée qu'il y ait un dispositif visant à débusquer l'exercice de la magie. C'est ce que j'aurais fait si je dirigeais un tel établissement. Il serait préférable de tordre la réalité plutôt que de générer une illusion de silence. Par exemple, serait-elle capable de créer l'illusion que vous êtes en train de faire vos devoirs ?

Sédah s'enquit aussitôt de cette demande auprès de Maddy.

— Malheureusement, je ne suis pas assez avancée pour produire une telle illusion. Sur le principe, je pense que c'est la même chose. Mais je n'ai jamais osé essayer. C'est interdit ! balbutia-t-elle, gênée de décevoir son amie par l'ambivalence de son attitude.

— Le temps presse ! s'irrita-t-elle. Georgios pourrait déjà être sur le point d'en rendre compte à Hénoch. Tu pourrais être découverte ! Et à coup sûr, tu n'es pas du tout prête à faire face aux conséquences que cela pourrait entraîner. Pressez-vous !

— Ne sois pas contrariée Umbra ! Et essayons ensemble plutôt que de continuer à perdre du temps. Tu pourrais peut-être nous guider ? se risqua Sédah en regardant Maddy toute excitée.

— Oh oui ! répliqua celle-ci animée par la même effervescence.

— Mon latin n'est pas trop mauvais et le tien non plus on dirait. On devrait réussir à s'en sortir. Et si l'on n'y réussit pas, on trouvera bien une excuse, fit Sédah en haussant les épaules.

Elles commencèrent à chercher une formulation ensemble. Umbra continuait de souffler mentalement des idées à Sédah. Elle s'était installée dans son cou, sous ses cheveux, la chatouillant parfois avec ses moustaches. Elles finirent par trouver quelque chose qui se tenait à peu près. Elles entreprirent de l'énoncer ensemble. Mais aucun effet ne se produisit. Elles réessayèrent une fois, deux fois, trois fois. Elles essayaient à chaque fois de mieux régler certains détails en s'appuyant sur les conseils avisés d'Umbra. Et soudain, à la quatrième fois, elles virent les deux réalités se superposer. Elles venaient de tisser leur première illusion et en ressentirent une profonde fierté.