CHAPITRE 35 - La bataille

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Le lendemain matin, je me rendis sur mon lieu de travail avec une envie irrésistible de faire un aller simple dans le cimetière d'en face, de m'enterrer à six mètres de profondeurs pour suffoquer dans le noir, sous les gravats, et de me faire dévorer à petit feu par les vers et autres bestioles visqueuses vivant sous terre.

Ô joie !

Je m'en voulais d'avoir succombé - par dépit ou par excès d'alcool - aux avances d'un machiste intégral comme celui que je m'étais envoyé deux jours plus tôt.

Et d'ailleurs...

Pourquoi les plus machos ont toujours les plus petites bites ?

Vous avez quatre heures.

Note pour plus tard : écrire une thèse sur la corrélation entre la longueur du pénis et le niveau de déficience intellectuelle des hommes.

Je préférais effacer cette soirée qui n'avait aucun sens.

Oublier ma partie de jambes en l'air avec un abruti.

Oublier ma querelle avec ma meilleure amie.

Et surtout, oublier la raison pour laquelle je m'étais foutue dans ce pétrin.

La vue de l'établissement dans lequel je passais mes journées n'arrangeait guère la situation : toujours aussi délabré et insalubre.

Je passai devant la salle des profs : personne.

J'entrai et me servis un café long, histoire de tenir la journée. Puis je repartis aussitôt.

En ressortant dans le couloir, j'entendis des pas - une démarche qui ne m'était pas inconnue.

— Eh ! Julia ! Me héla une voix masculine.

Oh...

Nicolas.

Il ne manquait plus que ça.

— Tu vas bien ? J'ai essayé de t'appeler hier soir, pour prendre des nouvelles...

— Oui je... Je me suis couchée tôt. J'ai... J'ai pas vu ton appel... Heu... Bafouillai-je. Excuse-moi.

Arrête de trembler !

— T'es sûre que tout va bien ? S'inquiéta l'homme parfait avec qui je faisais toujours tout foirer.

Je ne parvenais pas à l'affronter en face. Nicolas semblait toujours si sincère et apaisé, que je ne me sentais pas capable de l'affronter. Quelque chose avait changé.

Alors, salope, on n'assume pas ?

Ma conscience se retournait contre moi. J'avais enfreint une règle essentielle à tout couple qui durait : la confiance. Et je ne pouvais plus retourner en arrière. Après tout, étions-nous réellement un couple ? Peu importait. J'avais été beaucoup trop loin, sans m'en rendre compte sur le coup.

Quelle petite idiote !

— Oui, je... J'dois y aller. Je t'appelle ! Lui promis-je.

Il me lança un regard tendre. Je tournai les talons. Mais tandis que je m'éloignais de quelques pas, je me retournai brusquement.

— Heu... Nico ?

— Oui ?

Allez, sois honnête pour une fois.

— Non... Non, rien.

Je repris ma route, le laissant seul dans le couloir, avec son tas de photocopies. Je faisais bien de me taire.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant