CHAPITRE 65 - Elle court, elle court...

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J'ouvris un œil lentement, puis l'autre.

La lumière me brûla presque la rétine. Je ne voyais que des formes plus ou moins sombres autour de moi. Je clignai des yeux plusieurs fois pour éclaircir ma vue. Puis, au bout de quelques minutes de bataille contre mon propre corps, tout revint à la normale.

La première chose que je vis était la couverture qui gisait sur mon corps. Elle était épaisse, mais pas douce. Elle grattait ma peau comme de la pierre-ponce. J'avais chaud.

Une... Chambre d'hôpital ?

— Ah, Madame Meyer... Julia. C'est bien ça ?

Je tournai la tête vers la gauche et aperçus un vieil homme en blouse blanche, un stylo et un carnet à la main. Il possédait de grosses lunettes rectangulaires aux bordures rouges, et ses cheveux en pétard étaient grisonnants.

Albert Einstein, vous ici ?

— Heu... Oui, oui... C'est moi.

— Très bien.

Il approcha un étrange objet de moi et dirigea une lumière de gauche à droite juste devant mes yeux.

Il veut me rendre aveugle ?!

— Bon. Rien d'anormal.

— Heu...

J'avais du mal à me rappeler. C'était encore flou. La dernière chose dont je me souvenais, c'était d'avoir traversé le lycée en courant, en pleurs.

Oh... Oui...

Tout me revenait, dès à présent : les différents abus verbaux et corporels de Giordano, mes pleurs, le torse d'Alejandro, son envie irrésistible de saigner le gros pervers de proviseur, et...

— Eh bien dites donc, vous nous avez fait peur !

Je ne l'écoutais plus. J'étais encore à moitié endormie.

Je dirigeai mon regard vers la fenêtre de ma chambre, là où j'apercevais les montagnes au loin, parsemées d'arbres de différentes couleurs.

J'entendais tout de même des bribes de ses paroles : ils avaient effectué plusieurs examens afin de déterminer la raison de mon malaise et de mes vomissements.

Évidemment, et comme depuis ma plus tendre enfance, cela s'expliquait par une angoisse anormalement élevée.

Nul besoin d'être médecin pour le savoir...

Et, une fois que le médecin eut terminé ses explications, il ouvrit la porte. J'aperçus deux personnes au loin, dont les visages m'étaient familiers : Safiya et Alejandro.

— Je passerai vous voir dans quelques heures, une fois que j'aurai les résultats de vos examens, Julia. Profitez de vos proches et... Reposez-vous !

— Merci, Docteur.

Mes yeux se posèrent sur Alejandro, auquel je lançai une œillade remplie de tendresse et de gratitude en toute discrétion, puis vers Safiya. Elle était rayonnante, mais son regard affichait une détresse sans nom.

Heu... Suis-je dans la merde jusqu'au cou ?

Est-ce qu'Alejandro lui a tout raconté ?

Et... Qu'est-ce qu'elle fait ici, elle ?

— Heu... Salut... Leur lançai-je alors, déconcertée.

— Coucou, ma bella, me répondit mon amie avec un immense sourire sciant son visage en deux.

Je ne savais pas trop ce qu'elle faisait ici. Et ni comment j'avais pu me retrouver aux urgences. Alejandro n'avait que dix-sept ans, il n'avait pas le permis. Mon cerveau était encore bien embrouillé.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant