CHAPITRE 60 - Absence

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Nous étions le 20 juin.

J'avais cours avec Julia ce jour-là. Et rien qu'à l'idée de la voir sans pouvoir lui parler ni l'approcher, mon corps en était malade.

Elle était là.

Devant moi.

À seulement un mètre.

Elle donnait ses explications pour l'exercice que nous devions effectuer.

Je t'aime tellement, ma Julia.

Et en même temps, je te hais.

Je te hais pour ce malheur que tu provoques en moi.

Mais je t'aime pour le bonheur que tu m'apportes lorsque mes yeux se posent sur toi.

De temps à autres, notamment lorsque je baissais les yeux pour écrire dans mon cahier, elle me lançait un regard haineux. Comme si j'étais le dernier des parias.

Finalement, je l'étais peut-être.

Je faisais tout pour la rendre jalouse, pour l'énerver, pour lui faire regretter son choix. Elle avait osé m'abandonner, elle.

L'amour de ma vie.

Julia...

Comment t'as osé me faire ça ?!

Elle s'était débrouillée pour annuler tous nos cours particuliers, prétextant que je n'en avais plus besoin. Du moins, c'était ce que qui ressortait du mail du proviseur.

Cela me détruisait de l'intérieur. Déjà que nous n'en avions pas beaucoup, j'allais décidément avoir du mal à progresser encore.

Bon. Après tout, je m'en fichais éperdument. Je ne pensais qu'à la douleur que je ressentais. J'avais l'impression d'avoir perdu une partie de moi, d'être à moitié vide.

J'avais maintes fois eu l'occasion de toucher à la drogue. Lorsque les substances prenaient jadis possession de mon corps, j'étais en transe. Mais ça, je ne connaissais pas.

Je me souvenais d'un cours de français durant lequel Julia nous avait fait lire un extrait du Banquet de Platon.

Dans ce récit, elle nous avait expliqué qu'un des personnages, Aristophane, pensait qu'il existait un temps où les hommes étaient doubles. Ils possédaient ainsi deux visages et deux corps emboîtés l'un dans l'autre. Un jour, les hommes se sentirent si puissants qu'ils attaquèrent Zeus. Celui-ci décida alors de réduire leur pouvoir en les scindant en deux. Ainsi, les hommes, désemparés, furent condamnés à chercher leur moitié, leur partie manquante.

Tu es ma partie manquante, ma Julia.

Lorsqu'elle était loin de moi, je n'étais plus capable de ressentir aucune émotion positive. Ni l'amour, ni la joie. Ni la paix, ni la sérénité. Je ne me sentais même plus libre, emprisonné dans mes propres songes.

Dès à présent, je n'avais plus qu'un seul but. Je voulais qu'elle souffre autant qu'elle m'avait fait souffrir.

***

Le soir-même, je passai les quarante-cinq minutes de trajet quotidien pour rejoindre notre appartement à ruminer. Je dirigeai mes yeux vers le paysage défilant, mais je ne voyais rien. Je ne connaissais plus que la douleur. Jamais je n'avais eu aussi mal au cœur.

Loin d'elle, je n'étais rien. Julia avait fait de ma vie un malaise. Elle tirait tous les fils de ma destinée, et m'avait laissé tomber comme ça, du jour au lendemain, en laissant saigner mon cœur de l'avoir un jour rencontrée. De toutes les femmes que j'avais un jour connues, celle-ci était gravée dans mon cœur à l'encre indélébile.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant