CHAPITRE 11 - Le présent

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— Bon. Résumons la situation : chaque année, je suis contrainte d'aller passer le jour de Noël chez mes parents, entourée de la quasi-totalité de ma famille de dépravés, pour citer Oli'.

Chaque année, je me tapais les mêmes discours incohérents sur mon avenir. Affligeant.

Je parlais à mon miroir de salle de bain, comme la méchante reine dans Blanche-Neige. À la seule différence qu'aucun démon ne me faisait la conversation.

— Oh Miroir, Miroir magique au mur, qui a beauté parfaite et pure ? Ris-je. Ah... Si seulement un tel miroir existait pour éradiquer ces ânes bâtés.

Décidément, j'étais aussi déséquilibrée que le reste de ma famille. Et ce qui allait me rendre encore plus folle à lier allait se produire dans trois, deux, un...

DRING

DRING

DRING

Je décrochai.

— Allô ?

— Ma chérie !

La voix féminine retentit si distinctement dans le combiné que je crus devenir sourde. Une douleur dans le tympan me fit faire la grimace. Un an que je n'avais pas entendu ce son strident, et déjà, je sentais mon souffle de vie abandonner mon être.

— Salut, Maman... Soufflai-je.

La voix de fausset de ma mère était mielleuse. Je ne l'avais pas eue au téléphone depuis si longtemps que mes oreilles durent se réhabituer rapidement à entendre ce son criard et ce ton condescendant. Voilà un an que je redoutais ce moment - moment durant lequel, à chaque seconde qui passait, mes oreilles m'imploraient d'atténuer leur douleur.

— Comment vas-tu, mon petit sucre d'orge ? Me demanda-t-elle avec un timbre trahissant sa sournoiserie.

— Je t'ai déjà dit de pas m'appeler comme ça, 'Man... Lui envoyai-je, en restant calme. Je vais bien. J'espère que papa et toi aussi...

— Tout va bien, ma fille ! Ton travail se passe bien ?

Ça y est, l'instant "hypocrisie 2.0".

— Super ! Mentis-je. Les collègues sont sympathiques, les élèves adorables.

— Tu m'en vois ravie, ironisa-t-elle, ce qui ne m'étonna pas. Pas trop difficile de préparer les cours, corriger les copies...?

— Non, tout va bien. J'aime ça.

— Parfait.

— Exactement.

Un silence pesant s'installa dans le combiné. Comme à chaque fois que j'étais en contact avec ma mère, le mutisme faisait son apparition lorsqu'elle n'était pas satisfaite de mes réponses. Et à ce moment précis, c'était le cas. Toutefois, celui-ci laissa bien vite place au moment tant redouté de tout appel téléphonique avec ma génitrice.

— Alors, dis-moi ma fille...

Et voilà, le moment tant attendu.

— Tu viens au repas du jour de Noël, j'espère ? Me demanda-t-elle après un suspens TELLEMENT insoutenable que je crus m'en évanouir.

— Oui, avec plaisir, lui répondis-je avec le ton le plus ironique qu'il m'ait été donné d'utiliser.

— Je suis ravie, mon sucre d'orge.

— Man... Protestai-je dans le vide.

C'est comme pisser dans un violon...

— Papa et moi avons hâte de te voir !

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant