CHAPITRE 27 - Raconte-moi

143 11 0
                                    

La semaine suivante, je me rendis au lycée après un week-end entier passé devant Netflix. J'avais poncé tous les genres, en passant par les histoires à l'eau de rose et les documentaires scientifiques auxquels je ne comprenais pas un traître mot. Inutile de préciser que mes soirées étaient également teintées de pleurs et de rires hystériques, signes d'une réelle descente vers la Folie.

Mais peu importait : je tenais le coup. Je devais terminer l'année afin de gagner des points et de pouvoir changer d'établissement.

Peut-être que d'autres élèves, ici ou ailleurs, allaient avoir besoin de moi ?

Peut-être que l'année suivante, je trouverai ma place ?

Pour l'or, je devais me concentrer sur mes Première, qui allaient rappliquer dans ma salle quelques minutes plus tard.

Je regardai ma montre : 8h47.

Plus que huit minutes avant l'explosion.

Tous aux abris.

Je sortis la petite clé de ma poche, et la mis dans - la serrure. Mais impossible de la tourner : quelqu'un était déjà entré. J'ouvris la porte et vis un rayon de soleil.

— Ehhhhh ma bella !!!

Je me retournai d'un bond, manquant de peu d'arrêt cardiaque. Je vis la charmante femme aux cheveux noirs qui me servait de psychologue à ses heures perdues dans ce fichu lycée.

Elle m'avait manqué : j'avais passé une semaine à osciller entre ma salle et ma voiture, sans prendre le temps d'aller la voir. Honte à moi. Safiya était pourtant ma seule amie dans cet enfer qu'était le lycée.

— Oh, Safiya... Tu m'as flanqué une trouille... Bégayai-je, reprenant mon souffle.

À cette heure-ci, elle était censée nettoyer les dernières salles pour les cours commençant à dix heures. Mais elle ne bougeait pas d'un poil. Et elle semblait avoir patienté ici pendant un sacré moment.

— Si je t'attends pas dans ta salle, j'te vois jamais !

— Touché...

Elle afficha une moue compatissante.

— Ça va toi ? Osa-t-elle demander.

— Bien.

J'étais loin d'aller bien. Une semaine à errer dans l'établissement comme un zombie, à attendre patiemment les différentes sonneries, à laisser les élèves se pavaner en classe, bavarder et chahuter sans effectuer le moindre rappel à l'ordre. Les salles de classe me semblaient vides. Et mon existence aussi.

— Oh, attend... Me lança alors mon amie, en sortant son téléphone de sa poche après avoir entendu sa douce mélodie.

Un silence apaisant s'installa. Je piétinais ma salle pendant que Safiya écrivant sûrement un message à sa fille – c'était une mère poule.

Je croisai les bras, puis m'approchai de la fenêtre, en direction de l'entrée du lycée et de la cour de récréation. Inutile de regarder par-delà les murs de l'établissement, si je voulais éviter le regard fuyant des cadavres dans leur tombe.

Vive les cours en face du cimetière...

Je n'y avais jamais vraiment pensé, mais je me rendais dès à présent compte que le fait de devoir enseigner en face d'un tel lieu était véritablement tordu.

Mais soudain, je me perdis en voyant les quelques adolescents qui se promenaient au sein de notre établissement, juste en-dessous.

— Qu'est-ce-que tu fiches, encore ? Me demanda-t-elle, me voyant de dos, en direction de la cour.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant