CHAPITRE 59 - Un dernier regard, mes yeux

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Le lundi suivant, je ressentis comme une boule de bowling qui me comprimait la cage thoracique. Je me sentais faible. Après tout, je n'avais pas daigné manger du reste du week-end.

Depuis le samedi précédent, je n'étais plus qu'une ombre. Je me sentais coincée dans le malaise du silence, comme un fil de poussière qui se laissait porter par le vent pour continuer à exister.

L'autodestruction.

C'était ça, mon quotidien depuis quarante-huit heures.

Je voulais me punir de ce que j'avais fait subir à Alejandro. Ce jeune homme que j'affectionnais tellement, pourtant. Ce jeune homme qui était entré si rapidement dans mon cœur et qui, dès à présent, y laissait un trou béant. Ce jeune homme qui, dans une autre vie peut-être, aurait pu vivre à mes côtés sans que je ne me soucie du monde alentour.

Mais c'est pas le cas, Julia.

Je déglutis, puis passai la porte d'entrée du lycée Greyvald. Encore une fois. Le sac de cours sur mon dos me donnait l'impression de s'être transformé en sac de pierres. Cependant, la vie continuait. De toute manière, je n'avais pas eu le choix.

À côté de ça, même Sisyphe doit avoir une vie de rêve.

J'espérais simplement ne pas croiser Alejandro ce jour-là. Je ne l'aurais pas supporté. Je ne voulais pas voir son visage. Je ne voulais pas voir son corps. Je ne voulais pas constater les dégâts que mes paroles avaient certainement eu sur lui. Je ne voulais rien voir.

— Ma chérie !!!

Safiya.

Elle tombe toujours au bon moment, celle-là.

Elle s'approcha rapidement, laissant son balai contre la porte vitrée, et plongea dans mes bras. Elle me serra si fort que ma respiration se coupa.

— Comment tu vas, ma bella ? Me demanda-t-elle.

— Bien, mentis-je.

Depuis quelques temps, je constatais que j'étais devenue maître dans l'art du mensonge. Et ça n'était pas une qualité, loin de là. Mais qualité ou non, je devais mentir pour m'en sortir. Le pire dans cette histoire, c'était que malgré tout l'amour que je ressentais pour Alejandro, toute cette histoire allait devoir rester secrète. Et ça, ça me détruisait.

— Alors, la fin d'année approche, hein... Se plaignit Safiya, elle qui aimait tant venir travailler et être en contact avec la jeunesse.

— Eh oui... Approuvai-je.

Je n'avais aucune envie de rentrer dans une quelconque conversation, mais je me devais de faire bonne figure.

Mon amie enchaîna différents sujets de conversation, auxquels j'acquiesçais simplement, ne cherchant pas à m'étaler dans des débats inutiles. Au fond, j'étais vide et faisais acte de présence.

— Dis-moi... Dit-elle en changeant rapidement de sujet, ce qui piqua ma curiosité.

— Mmh ?

— J'ai quelque chose à te dire !

Tiens donc !

— Balance ? Lui répondis-je tout de même, plus par habitude que par réelle envie de savoir de quoi il en retournait.

La reine des ragots est de retour.

Je n'avais aucune envie d'entendre ce qu'elle avait à me dire. Je n'avais pas le choix : en même temps, si j'avais refusé de savoir ce qui la rendait de si bonne humeur et à m'intéresser aux ragots du lycée, Safiya se serait douté de quelque chose. Et c'était la dernière chose dont j'avais besoin ce jour-là.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant