CHAPITRE 58 - Brise-moi

167 10 0
                                    

C'était trop pour moi.

Beaucoup trop.

Nous étions rentrés tard.

Trop tard.

J'étais allongée sur mon canapé, nue, la tête posée sur les genoux d'Alejandro, qui dormait encore à poings fermés. Sa respiration lente m'indiquait qu'il était plongé dans un sommeil profond. Sur le dos, je relevai la tête et observai son visage sous les moindres coutures.

Qu'il est jeune...

Son visage était rond. Ses joues colorées lui donnaient certains airs de nourrisson. Il arborait une peau lisse, ferme et rebondie, sans aucun défaut, mis à part un joli grain de beauté sur la joue droite. Son teint était éclatant, même lorsque la pluie faisait rage au dehors, laissant une atmosphère maussade dans tout l'appartement.

C'était un rayon de soleil à lui tout seul.

Tous les traits de son visage étaient arrondis, de ses arcades sourcilières, en passant par ses pommettes veloutées, à ses lèvres charnues bien dessinées. Sauf ses yeux. Même les yeux clos, ils avaient une forme d'amande. Et c'était ça qui faisait tout son charme.

Julia...

Il faut agir...

Je me détournai de son visage un instant, et fixai le plafond blanc de mon appartement, sur lesquelles se trouvaient quelques taches brunes datant de soirées alcoolisées durant lesquelles les bouchons de champagne avaient explosé au-dessus de nos têtes.

Moi aussi, j'explose.

J'explose de l'intérieur.

Je subissais des crampes insoutenables dans le bas-ventre. La veille, Alejandro avait mis mon corps à rude épreuve. Je devais prendre le temps de m'en remettre pleinement.

Le jeune homme avait pénétré tous mes orifices. C'était une bête de sexe. Et même si j'aimais ça, je ne pouvais plus le supporter.

La passion.

Ça n'était en rien de l'amour. Pour moi, l'amour se définissait en ces mots : la douceur, le respect, l'attention. Notre relation n'avait rien à voir avec de l'amour.

L'engouement.

La dépendance.

Depuis qu'Alejandro était entré dans ma salle de classe quelques mois plus tôt, j'avais tout de suite ressenti cette pression au creux de l'estomac, ces papillons qui voltigeaient dans mon ventre, cette flamme qui s'allumait dans mon cœur et plongeait mon cerveau dans le silence.

Oui.

La passion.

Celle qui me menait à l'innommable. Celle qui me poussait à faire de mon corps quelque chose qu'il n'était pas : une machine.

À ses côtés, je n'étais plus que de la chair bourrée d'hormones et de sensations qui hurlaient en moi. La douleur faisait également partie de mon quotidien.

Et pourtant... Je sentais qu'au fond, dans les coins les plus reculés de mon être, je l'aimais.

Oui, je l'aimais. À un point que je n'aurais jamais cru possible. Avec lui, je sentais que des ailes me poussaient dans le dos. Mais à trop vouloir l'aimer, je sentais que j'y laissais peu à peu des plumes.

J'aurais donné ma vie pour ce garçon, et c'était déjà trop.

***

Il était paisible. Tous les muscles de son visage étaient relâchés. Et si je n'avais pas vécu ce que j'avais vécu la veille, j'aurais pu dire que c'était un ange.

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant