EPILOGUE - 8 ans plus tard

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Je referme lentement mon ordinateur, et clos les paupières quelques instants. J'expire le plus d'air possible, vidant mes poumons de toute l'adrénaline ingurgitée depuis des mois. Je viens enfin de terminer le projet de ma vie. Mon roman. Celui que j'ai mis des mois à écrire.

— Enfin... Soupiré-je encore, en tenant mon visage entre mes mains.

Ma respiration se calme petit à petit. Mon corps reprend vie. Je ressens la lumière gagner mes iris, et la fraîcheur du mois de décembre envahir mon être.

Malgré l'obscurité de l'extérieur, je me sens comme irradiée par une lumière solennelle à l'intérieur de mon cœur. Comme si je venais de refermer une page de mon histoire. Le livre de ma vie. Emmitouflée dans mon plaid, je tiens enfin mon projet abouti entre mes mains.

J'en aurais mis du temps...

J'ai toujours voulu écrire un roman, mais je n'avais jamais trouvé l'inspiration. Le sujet principal m'était apparu quelques mois auparavant, sans que je ne m'y attende réellement. Une histoire d'amour. Une histoire d'amour impossible entre une professeure de français et son élève. Deux cœurs brisés pour toujours et qui ne s'oublieront jamais.

Quelle belle histoire, quand on y pense...

Je lève les yeux vers ma fenêtre et admire la beauté du ciel parsemé d'étoiles. J'ai l'impression qu'elles réfléchissent encore plus la lumière que d'ordinaire. Elles semblent animées par quelque chose de beaucoup plus puissant, et de beaucoup plus profond.

Soudain, des craquellements sur le parquet m'arrachent à mes pensées. Je sursaute légèrement.

— Maman ? Fait alors une petite voix.

Dans l'encadrement de la porte du salon, j'aperçois cette petite fille. La petite reine de ma vie. Celle pour qui je donnerais tout. Celle qui me ramène instantanément à la réalité.

Elle porte son pyjama rose sur lequel sont brodés de petits dauphins, et des chaussons ornés d'un nœud papillon. Elle tient sa peluche préférée à la main, celle qu'elle appelle Jacob. Son visage doux me réchauffe le cœur.

— Oui, mon cœur ? Lui réponds-je calmement.

— J'arrive pas à dormir... Se plaint-elle.

Je lui lance un sourire doucereux et lui fait signe d'avancer vers moi. La petite s'approche en titubant, puis monte sur mes genoux. Je la soulève, et son petit corps s'étend sur mes jambes.

De là, je pose mon ordinateur portable à côté de moi, sur le canapé. Je tourne la tête vers la grande horloge de la cuisine - à laquelle j'ai visuellement accès - puis constate qu'elle est censée dormir depuis longtemps.

Il est deux heures du matin.

— Il est tard, chérie.

— Oui...

— Tu devrais aller te recoucher.

Elle se contente de serrer sa peluche fort contre sa poitrine en me lançant un sourire coquin.

Un long silence s'installe, durant lequel nous entendons seulement les aiguilles de l'horloge, le vent frapper contre les murs de notre demeure, et quelques gazouillis provenant de l'extérieur.

— Tu faisais quoi, Maman ? Me demande alors la petite fille, rompant le silence, en constatant que l'ordinateur se trouve juste à côté de nous.

— Oh, rien... J'écrivais.

— Ton roman ?

— C'est ça.

Je n'ai de secret pour personne. Et même si elle est indéniablement trop jeune pour entendre parler de cette histoire, je lui ai expliqué que parfois, maman ressent le besoin de s'isoler et d'écrire. Encore et encore.

— Il parle de quoi, ton roman ? Ose-t-elle demander, sa petite main cachant à moitié sa bouche, signe de sa timidité que je lui ai transmise.

— D'une histoire d'amour, mon cœur.

La petite ne répond rien.

Elle se contente de coller sa joue contre mon épaule et de m'entourer de ses petits bras. Je baisse les yeux vers elle. Une sensation d'apaisement me traverse : ses grands yeux noirs me fixent avec une tendresse et une bienveillance absolues.

— Dors, mon ange...

L'enfant ferme les yeux et enfouit son visage contre moi. Je reste de longues minutes comme ça, à l'observer dormir, la main délicatement posée dans ses cheveux. J'enroule mes doigts autour de ses boucles soyeuses pour l'apaiser.

Puis, faisant face aux étoiles illuminant le ciel, je me laisse engouffrer dans cette immensité obscure. Je cherche du regard un signe, quelque chose auquel me rattacher, et tombe sur une étoile.

Cette étoile.

Une minuscule boule de feu qui git au milieu des autres, sans se laisser approcher. Et pour la première fois depuis longtemps, je m'adresse à l'horizon :

— Tu vois... Je ne t'ai jamais oublié. 

OJOS OSCUROS Noir DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant