Chapitre Quarante-sept

71 9 0
                                    


— Vous me cherchiez  ?

Madame Kalisse sursaute. Une fois de plus, Lemnis, entré par on ne sait où, la surprend à l'improviste.

— Mon cristal... Je me sens faible... Que m'arrive-t-il  ?!

Assis sur un meuble, le chat la regarde en penchant la tête. Il prend le temps avant de répondre  :

— Il est vrai que vous semblez fatiguée. N'avez-vous pas vieilli  ?

— Arrêtez de tourner autour de pot et dites-moi ce qui se passe  !

— Oh, rien d'extraordinaire, rassurez-vous. C'est tout à fait normal. Simplement  : le cristal est en train de se vider de son énergie.

— Se vider  ? Mais... Comment se fait-il  ?...

— Le cristal n'est qu'une batterie, ne vous l'avais-je pas expliqué  ? Il accumule l'énergie produite par la souffrance des princesses. Mais si la source est tarie, il est logique qu'il finisse par s'épuiser.

— Les princesses... Pourquoi m'avez alors conseillé de les laisser partir  ?!

— Vous ai-je conseillé cela  ? Non, je ne crois pas. J'ai seulement remarqué que le comte serait en grande difficulté si celles-ci parvenaient à s'enfuir. C'est tout. Le reste, c'est vous qui l'avez extrapolé. Un peu rapidement sans doute.

— Menteur  ! Vous saviez très bien ce qui allait se passer  !

De fureur, la gouvernante lance une boule de feu en direction du chat. Mais l'animal est vif et parvient à esquiver le coup puis disparaît de sa vue.

— Où êtes-vous  ?! Montrez-vous  ! Lâche  ! Vermine  !

— Je suis là.

Madame Kalisse se retourne et frappe en direction de la voix, mais elle ne parvient qu'à mettre le feu à une tenture. Elle frappe encore et encore mais chaque fois elle manque son but.

— Un conseil  : vous devriez éviter de gaspiller ainsi vos dernières forces.

Pleurant de rage, la femme recule en serrant le cristal contre son coeur. Autour d'elle, les meubles commencent à brûler.

— Maudit monstre  ! Vous m'avez trahi  ! Vous avez profité de moi  ! Mais vous ne l'aurez pas  ! Vous ne l'aurez jamais  ! C'est mon cristal  ! Et je préférerais mourir avec lui plutôt que de vous le laisser  !

— Allons, vous ne devriez pas vous mettre dans un état pareil. Après tout, rien n'est perdu pour vous. Je suis sûr que le comte, à son retour, vous conservera toute sa confiance. Enfin... Si du moins vous n'êtes pas morte de vieillesse avant cela. Car au fait, j'avais sans doute oublié de vous le dire, mais tout ce que le cristal donne, il le reprend un jour ou l'autre. Avec quelque intérêt.

— Qu'est-ce que cela veut dire  ?

— Simplement que dans très peu de temps, j'en ai bien peur, vous serez vieille. Très vieille...

Madame Kalisse porte une main à son visage pour essuyer ses larmes. Sa peau, elle le sent bien, n'est plus si douce que la veille. Et lorsqu'elle regarde sa main, elle a l'impression qu'il s'agit de celle d'une autre personne. Une personne qui aurait au moins dix ans de plus qu'elle.

Autour d'elle, le feu se propage.

MornglassOù les histoires vivent. Découvrez maintenant