« À partir de maintenant, quoi que disent le centre des opérations, les différentes cellules du BIS, l'officier en charge, les gars de BD, le directeur avait décidé... »
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« Nous sommes deux cent à être armés, mais nous sommes cinq mille à avoir les mêmes aspirations.
Nous tenons sous notre contrôle deux cent employés de Biodynamics. Pour ne rien vous cacher, dix d'entre eux ont réussi à se barricader dans un local et ne pourront pas en sortir puisque nous avons bloqué la porte de l'extérieur.
Bien sûr, personne n'est mort ni n'a été blessé, sans quoi vous ne pourriez pas croire que nous ne comptons faire de mal à personne. »
L'autonome, celui-là même qui avait abattu les drones au lance-fusées, était assis de façon nonchalante sur la vidéo 3D. Une cicatrice épaisse lui barrait le front.
« On essaie de tracer lequel c'est, chuchota un des experts de BD, mais c'est difficile.
— Vous n'avez pas une reco faciale sur base de données mondiale ?
— Eh bien... euh... il n'y a pas de base de données faciale des autonomes. Uniquement une correspondance parcours – matricule – puce ID.
— Vous avez lu sa puce ID ?
— Il y a un lecteur à l'entrée du complexe. Mais la puce de celui-ci a été grillée.
— Vous ne vous en êtes rendu compte que maintenant ?
— Personne ne vérifie à la main le lecteur. Le système permet d'assurer que les entrées et les sorties coïncident. »
Carlsson soupira.
« Voici ces revendications.
Nous ne voulons aucun mal à aucun être humain sur cette Terre, simplement vous amener à réfléchir. Nous voulons qu'un débat mondial remette sur la table la question du statut des autonomes. Nous voulons que le plus grand nombre des humains prenne conscience que nous sommes victimes de l'une des plus grande injustices de tous les temps.
Cette injustice est sous votre nez depuis cinquante ans. Biodynamics en a fait un business. Il s'agit de la production, du commerce et de la vente des autonomes.
Nous sommes dans une situation intenable, dans laquelle une population de sept cent cinquante millions d'êtres vivants, qui sont finalement humains à 99 %, sont exploités par neuf milliards d'êtres humains. Vous devez prendre conscience que cette exploitation est illégitime et injuste.
De mon expérience, l'un des arguments avancés le plus souvent par ceux qui cherchent à justifier, c'est que nous sommes naturellement inférieurs aux humains. Incapables de comprendre vos grandes aspirations, incapables de comprendre ce qu'est la liberté ni même de combattre pour elle. Eh bien nous avons choisi de prendre les armes pour vous montrer que nous en étions capables. Venez discuter d'égal à égal et ce sera la première étape d'un chemin périlleux vers la justice. Un petit pas sur ce chemin, mais un bond de géant pour l'humanité. »
Prendre les armes pacifiquement, songea Carlsson. Ce mec ne pense même pas à la cohérence de ce qu'il dit. En fait, il se fiche de nous.
« Toutes les époques ont connu des situations qui paraissaient impensables se réaliser en quelques années, et invariablement, ceux qui s'accrochaient au passé qui s'effondrait l'ont rejoint dans les oubliettes de l'Histoire.
— Est-ce que c'est sorti sur le Net ? grommela l'agent du BIS.
— On a coupé les réseaux fibrés avant qu'ils aient pu le transmettre.
— Donc personne n'est au courant ?
— Officiellement, le centre est victime d'une attaque que l'on attribue aux Élus.
L'autopsychologue était un petit homme grassouillet qui transpirait beaucoup.
— Pourquoi vouliez-vous me voir ? demanda Carlsson.
— Dans la situation actuelle, les spécialistes de BD estiment que le mieux à faire est de négocier. Les autonomes ont un esprit rationnel. Ils ne sont pas exigeants. Ils pourraient rendre les armes si nous leur donnons ce qu'ils veulent – c'est-à-dire un peu d'attention.
— Vous savez fort bien que BD ne va pas accéder à leur demande. Ils ne gagneront pas de droits.
— Bien sûr. BD cherche pour le moment à ce que cette situation ne se sache pas. »
Un écran de VA s'alluma sur le mur d'en face et la figure souriante d'Abi Pommel apparut.
Surpris, Carlsson eut un mouvement de recul, puis il esquissa un salut militaire. Il n'avait jamais vu le directeur général ailleurs que dans des discours enregistrés.
« Agent Carlsson, j'ai demandé à ce que vous soyez le référent pour l'opération en cours.
— Mais pourquoi moi ?
— Les experts de BD vont vous l'expliquer. Je vais quant à moi être très clair sur les objectifs du BIS : ce qui se passe dans ce centre, pour tous, restera comme une attaque des Élus. En particulier, c'est ce que nous dirons à la presse. Il est donc très important que vous le gardiez à l'esprit.
— On applique le protocole ?
— Oui. Si vous voyez un drone de la presse, abattez-le au titre du droit du BIS de sécuriser ses opérations contre les fuites d'information. Vous serez couvert et on dira que le tir provient des autonomes.
— Monsieur le directeur, cela veut-il dire qu'aucun autonome insurgé ne sortira vivant de ce centre ?
Abi Pommel eut un rictus mal contrôlé.
— Cela veut dire qu'aucun autonome insurgé ne sortira de ce centre sans avoir rendu les armes et accepté d'oublier ce qui s'était passé. »
Carlsson avait sa réponse.
À partir de maintenant, quoi qu'ils disent – le centre des opérations, les différentes cellules du BIS, l'officier en charge, les gars de BD, le directeur avait décidé qu'aucun autonome n'irait propager ses idées ailleurs. Le BIS allait attaquer et lui, l'agent Carlsson, était chargé par Pommel de vérifier que les insurgés étaient bien tous abattus.
L'écran se coupa.
« Pourquoi moi ? beugla-t-il, faisant sursauter l'autopsychologue.
— C'est moi qui l'ai proposé, dit ce dernier. Voyez-vous, il va falloir négocier avec les autonomes. Ne fût-ce que pour réussir à entrer dans le bâtiment. C'est là que vous intervenez. Il nous faut au premier rang des négociateurs quelqu'un qu'ils ont déjà vu, dont ils peuvent se souvenir. Les autonomes ont un problème avec l'altérité. Ils n'ont pas beaucoup de temps pour connaître les humains. Ils ne leur parlent que très peu.
— Comment voulez-vous que...
— Vous vous souvenez du clip de promotion du BIS de 2095 ?
— Ne me dites pas que vous leur passez ça.
Complètement décomposé devant l'énervement de l'agent, le psy s'était réfugié derrière un air de chien battu.
— Ce n'est pas moi qui compose les programmes.
— Vous avez des conseils pour la négociation ?
— Pas particulièrement. À ce que j'ai compris, le commandement du BIS veut utiliser ça comme une diversion pour attaquer, alors baratinez-les comme des humains, ça devrait faire l'affaire.
— C'est rare d'avoir des experts aussi inutiles que ça.
— Carlsson, dit l'officier dans son communicateur, on termine le briefing.
— J'arrive, commandant. »
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Hum.
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L'ère des esclaves
Science Fiction-- Premier volet dans la trilogie Diel -- « L'homme est un super-prédateur qui a su s'adapter à de nombreux milieux, il s'est développé jusqu'à peser sur son environnement, et tôt ou tard il devra évoluer, ou disparaître. Nous savons que quelque c...