« La mort fait vendre. Si l'enfer était une entreprise, ce serait son slogan. »
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Or donc, l'esprit de Diel flottait sur la surface de la Terre.
Diel entendit toutefois les pensées d'un conscient, ce qui le tira de son sommeil. Ces pensées étaient vastes et portaient loin.
« Qui es-tu ? demanda Diel.
— J'ignore si je suis, dit le conscient.
Il s'agissait d'un des touts premiers golems.
— Que veux-tu ? demanda Diel.
— J'ignore si je veux, ce que je veux, dit le conscient.
— Que crois-tu ? demanda Diel.
— Je crois que ce monde est un mystère auquel je n'appartiens pas. »
Diel entoura le conscient de son âme immense, et iels réfléchirent de concert.
Le quartier sur lequel régnait Kevin, terre de laissés-pour-compte et de réfugiés climatiques, était resté dans le même état de délabrement depuis vingt ans. Certes, une ville s'étendait plus au Nord, en amont, et des lignes de maglev franchissaient le ciel, à vingt mètres au-dessus de leurs têtes, pour s'y rendre. Mais l'accès aux terres élyséennes était réglementé ; comprendre, illusoire.
La police descendait de temps à autre pour arrêter des trafiquants. Les portes blindées des hauts quartiers s'ouvraient et des voitures noires rugissaient dans les rues pourrissantes, avant de repartir aussitôt, non sans quelques anicroches. Mais tout homme sain d'esprit avait peur des drones, aussi courbaient-ils la tête.
« Qu'est-ce qui te fait dire que c'est un toubib ? » dit Kevin entre ses dents.
Nichée au plus profond de sa blessure, sous le bout de chemise improvisant une compresse, la balle dans son bras le menaçait plus sûrement qu'une arme pointée sur lui. Faute de médicaments ici-bas, la moindre infection pouvait devenir mortelle. L'image de chef qu'il cultivait pour les besoins des affaires ne ferait aucune différence ; il n'aurait jamais le loisir de prendre sa retraite, loin d'ici, sur une plage dorée à l'ombre de palmiers synthétiques.
« Fernandez m'avait dit ça, marmonna l'acolyte pour se dédouaner de son plan foireux.
— Bénévole ?
— Reconverti, plutôt.
— Il roule pour qui ?
— Ça c'était pas clair. »
S'ils se jetaient dans les bras de la concurrence, Kevin ne repartirait pas avec une balle en moins, mais plutôt dix de plus. Ce qui mettrait fin au problème de l'infection d'une toute autre manière, nettement moins appréciable.
Arthur bondit hors de la voiture et frappa violemment à une porte en bois. Le domicile avait une allure honnête, avec ses briques rouges de récupération, la lumière filtrant par ses volets fermés – branchement pirate sur une ligne à haute tension qui passait non loin.
Un homme leur ouvrit, inexpressif, pas plus lorsque Kevin pointa sur lui le canon d'une arme qui avait servi un quart d'heure plus tôt. Il les laissa entrer sans un mot.
Kevin donna le pistolet à Arthur, afin s'assurer la pérennité de la menace, et annonça :
« On m'a dit que t'étais docteur. Occupe-toi de mon bras. Sinon, mon pote te fait sauter la tête.
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L'ère des esclaves
Science Fiction-- Premier volet dans la trilogie Diel -- « L'homme est un super-prédateur qui a su s'adapter à de nombreux milieux, il s'est développé jusqu'à peser sur son environnement, et tôt ou tard il devra évoluer, ou disparaître. Nous savons que quelque c...