74. Basil Thompson

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« Demain, la presse serait inondée de l'affaire Carlsson. »

2105


Basil Thompson était homme à garder son sang-froid, pourtant il était à bout.

Le BIS lui apparaissait désormais comme une tour inatteignable, une place-forte trop bien gardée. Il fallait tout faire sauter, ou rien. Rien ne pouvait permettre de décapiter le monstre tout en sauvant le reste du corps ; or sans BIS, la Terre plongerait dans le chaos. Les monstres inavouables contre lesquels l'institution constituait le dernier rempart, des groupes bioterroristes aux malfrats internationaux, ressurgiraient soudain comme des cauchemars de jeunesse.

Basil avait passé plusieurs années à chercher un colis à ficeler et envoyer à la presse comme un communiqué, en incluant des éléments de langage déjà prêts pour faciliter le travail des jacasseurs les plus volubiles, ainsi que des pistes d'approfondissement pour les investigateurs. Une affaire en kit. Or Nov Lattag avait bien démissionné, mais uniquement pour laisser libre cours à ses ambitions politiques au PGM, tandis qu'Abi Pommel se vissait à son siège.

Carlsson était mort.

Il rentra chez lui dépité, après une journée passée à courir après un témoin qui lui affirmait savoir où se trouvait Iruka Hidan. Son home system lui lut les messages tandis qu'il prenait la tasse de thé préparée par la machine et s'asseyait.

« De : Marylin Brand, à neuf heures : salut, Basil, ravie de voir que tu es de retour chez toi, est-ce que ça te dirait de prendre un verre.

— Corbeille.

De : Aldego, Inc. à dix heures : Bonjour, le service de stockage en ligne ferme aujourd'hui. Nous sommes ravis que vous ayez fait partie de nos clients. Pour télécharger vos données avant leur effacement, n'oubliez pas de vous connecter. Ne pas répondre à ce message. »

Les yeux de Basil roulèrent dans leurs orbites, il ordonna l'affichage de l'écran sur le mur de son salon, puis le téléchargement.

De une, Aldego était une société de stockage en ligne très réputée. Des dents allaient grincer.

De deux, il n'avait jamais eu de compte chez Aldego. Son activité en ligne obéissant à des règles très strictes, c'était une certitude.

Il se connecta.

« Dossier : un seul fichier. Vidéo. Titre : UGH004-2104-12-06.

— Ouvre. »

Il eut un mouvement de recul en voyant surgir le teint cireux de Carlsson, assis à une table. Ce n'était même pas de la 3D. L'image était plate.

« Bonjour, agent Carlsson. »

De l'autre côté de la caméra, cette paire de poignets posés sur la même table ne pouvait appartenir qu'à Iruka Hidan. Iel était introuvable, lae voilà dans une vidéo de 2104. Un an à peine.

« Bonjour, monsieur.

— Agent Carlsson, avant de commencer notre discussion, assurons-nous que rien de ce que vous direz ne sera mensonger.

— Je le jure sur ma propre vie, même si elle ne vaut pas grand-chose et que je serai vraisemblablement déjà mort le jour où cette vidéo sera rendue publique – si elle l'est un jour. Je jure que tout ce que je vais dire est vrai. Cependant, les circonstances sont vérifiables. Les témoins sont encore vivants. Les personnes que je nommerai – et je n'hésiterai pas à donner les noms – peuvent encore être interrogées.

L'ère des esclavesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant