L'homme derrière le microphone se mit à rire à gorge déployée. Un ricanement sadique et pervers volait à travers les couloirs de la base. Jules vit Stan enseveli par une multitude de Noah. Ils tiraient sur ses jambes, ses bras, ses cheveux, certains tentaient de planter leurs ongles dans la chair du doyen. Ce-dernier se débattait comme il pouvait, mais il demeurait presque incapable de se battre contre son ami. Stan était sous le choc. April ne réfléchit pas : elle ferma les portes pour limiter le flux et fonça aider son ami. Jules secoua la tête pour chasser ses pensées et commença l'assaut également. Il prit par le col un Noah et lui envoya son poing, de toutes ses forces, dans son visage. Jules sentit ses os se broyer, mais serra les dents. Il jeta la créature, si l'on peut appeler cela ainsi, et fracassa sa figure avec la crosse de son arme. Le cœur du jeune homme envoyait de la haine à tous ses organes. Du sang giclait à tout va. Jules fut surpris lorsqu'il remarqua que le sang des clones était d'un noir plus noir que l'ébène et dégageait une odeur plus fétide que la mort. Aaron avait créé à partir du Bien le Mal.Mais sa stupéfaction ne dura guère longtemps. Un Noah se jeta sur lui et le propulsa au sol. Des mains glacées s'agrippèrent autour du cou de Jules. Il sentit l'air disparaître petit à petit. Jules tendit les bras pour envoyer valser le belligérant mais ils s'étaient transformés en coton. Il remua son corps dans tous les sens mais ce Noah ne jouait pas dans la même catégorie que lui. Jules chercha de l'air, il poussa quelques râles de désespoir. Les clones clamaient tous le nom de leur créateur, Aaron. Mais leurs hurlements devenaient lointains, sourds. La vision du jeune se troubla. Malgré tout, il vit en face de lui la parfaite copie de Noah. La créature était tout aussi grande que lui. Elle portait l'équipement de Revival : en plus d'avoir créé des clones, Aaron avait créé des soldats. Non, des mercenaires. Derrière cette tenue, Jules devina un corps aux muscles saillants. Ce Noah avait les mêmes cheveux roux tombant jusqu'au cou, les mêmes yeux bruns aux nuances d'or. Mais ce regard était vide. Il ne cachait aucune âme quelconque. Seul le résultat des manipulations génétiques baignait dans ces deux lacs dorés. Cette créature ne possédait ni liberté, ni conscience, ni vie. Elle poussait quelques grognements et plantait ses ongles dans la peau de son ennemi. Jules voulait hurler, mais seul le son du silence et de l'agonie s'évada du futur tombeau.
Jules résista tant bien que mal, mais son corps avait ses limites. Il ne put évacuer le dioxyde de carbone qui l'anéantissait. La faux de la Mort bloquait la sortie de la trachée. La Mort avait également apporté du lierre qui grimpa et étouffa le cœur de Jules. Les paupières du jeune homme tombèrent peu à peu. Ses cils obstruèrent sa vision. Il ne vit que des formes déambuler devant lui. Tout à coup, Jules crut percevoir April donner un coup de crosse dans la tête de Noah et du sang noir couler à flot. Les mains du Mal lâchèrent prise. Jules captura une énorme bouffée d'air. La réalité revint peu à peu. Le vacarme fut de retour. Son cerveau prit sa palette et repeignit le monde. Le jeune homme vit April se dresser devant lui : elle venait d'exploser le crâne de son bourreau. Il se demanda si sa bonne étoile ne portait finalement pas le nom d'April.
Jules raviva ses esprits et se leva. Il était bien décidé à ne plus revivre une telle atrocité. Il se propulsa contre un Noah, le prit par les cheveux et l'assomma contre la porte. Celui-ci n'offra plus aucune résistance.Le jeune homme était animé par la soif de vaincre. Il poussait des grognements tel un loup affamé. Il s'était transformé. Jules prit son arme et envoya une flopée de coups. Les deux hurlèrent. Les deux monstres hurlèrent. Jules commençait à comprendre : ici, c'était le plus fort qui survivait. Après l'avoir battu, il fit une moue de vainqueur. Des ailes poussa sur son dos : Jules goûta enfin aux fruits nommés Détermination et Victoire.
Il fonça maintenant sur le tas affalé sur le doyen. Le jeune homme vit Stan montrer les dents. Jules donna un coup de pied sur un Noah et le fracassa. Petit à petit, Stan réussit à s'extirper de la meute et copia les deux adolescents. Le nombre de créatures diminua et les épuisements augmentèrent. Jules avait maintenant trop d'air qui rentrait en lui. Chez Revival, rien n'était stable. Aucune justice. Aucune équité.
La petite troupe tua tous les Noah sortis de la pièce. Ils étaient tous morts, sauf le silence. Les autres Noah tambourinaient contre la porte. Revelum ne put décrocher un mot, bâillonnée par son halètement. Ils étaient indemnes. April n'avait que quelques écorchures et Stan sorti avec une légère balafre à l'arcade sourcilière. La jeune femme indiqua à Jules que des marques bleutées arpentaient le long de son cou. Il s'en moqua et fonça sur elle. Il l'enlaça, passa sa main dans les cheveux de sa belle, huma son effluve naturelle - mais grimaça lorsqu'il sentit l'odeur putride du sang noir. Il la regarda dans ses yeux enjôleurs et ne dit guère mot. Ses lèvres parlèrent à sa place.
Du coin de l'œil, il vit Stan assit en boule, contre la porte. Une goutte noire quitta ses cheveux et amerrit sur sa joue droite, inondée de larmes. La goutte épousa les autres. Stan pleura une cascade à l'encre de chine s'arrêtant à la commissure de ses lèvres. Jules l'entendit renifler et le vit remuer ses épaules. Le doyen leva les yeux, pour constater les dégâts et à la vue de tous ces cadavres, il poussa une plainte se transformant vite en terribles sanglots. Les deux adolescents abandonnèrent leur union et se rapprochèrent de Stan. Jules tendit son pouce et essuya cette marée noire.
- Noah. Tu es mort maintenant. Mort ! Il était mon petit cygne. Adorable comme détestable. Il savait être méprisant comme attentionné. Je n'ai jamais su l'apprivoiser entièrement. Il avait toujours ce côté sauvage qui le démangeait.
Stan les regarda dans le blanc des yeux. Il ouvrit la bouche mais seule sa détresse sortit. Les sanglots triplèrent de volume. Jules avait le cœur serré, les mains moites. Il sentait des larmes se préparer à éclater.
- Mais il était comme vous deux. Mon enfant.
Stan explosa. Jules ne put se retenir devant une telle scène. Il voulait lui dire que Noah était peut-être en vie, mais il ne voulait le faire espérer pour rien. Il se souvint très bien des propos des filles à la cabane, sur Azzula. Ils étaient gravés dans sa mémoire. Pour nous cloner, il y avait un détail que nous ne connaissions pas. Notre mort. Des larmes dégringolèrent le long de ses joues brûlantes. April se jeta sur Stan et lui murmura à l'oreille tous ses sentiments. Le doyen tendit les bras vers Jules pour qu'ils forment une seule et unique boule, pour surmonter cette épreuve ensemble, pour sceller leur union à tout jamais.
Et tous pleurèrent la disparition tragique de Noah ainsi que la cruauté d'Aaron.
Bonjour à tous ! Honnêtement, ce chapitre ne devait pas s'arrêter ici ! Je voulais le continuer mais j'ai préféré m'arrêter ici, pour ne pas vous faire lire un chapitre de 3000 mots, voire plus ! Promis, la fin arrivera. On s'en approche. En tout cas, j'espère que vous allez apprécier ce chapitre que j'aime beaucoup. Surtout le passage de Stan. Dites-moi tout !
À bientôt.
Baptiste. ❤️
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REVELUM [EN REECRITURE]
AdventureAvez-vous déjà voulu être seul au monde ? C'est ce que Jules va découvrir. Non. Subir. Émergeant d'un sommeil profond, le jeune homme se trouve au beau milieu d'un bateau, accompagné de deux autres passagers, les dernières braises de l'humanité. Mai...