La folie du jeune homme fut de courte durée. Il errait dans un brouillard passager où la folie primait. Mais celui-ci s'était dissipé afin de laisser place à la tempête tant redoutée. Jules avait tant désiré l'affronter, maintenant il voulait l'oublier. Le pilori l'empêchait de s'évader. Il était prisonnier, contraint de vivre avec le fardeau de la terreur. Mais pour combien de temps ? Il ne restait plus qu'un coup à Aaron pour gagner la partie.Le fruit du Mal se trouvait devant lui, à seulement quelques millimètres. Une vague de chaleur l'étouffait. Des flammes harcelantes tambourinaient dans son organisme. Jules était en Enfer. Son seul désir était de tourner la tête afin de ne plus avoir à subir le sadique sourire du chef de Revival. Cependant, Jules ne voulait pas montrer qu'il avait peur. Il le fixa dans ses yeux amers mais Aaron ne laissait transparaître aucune once d'inquiétude. Il avait toutes les cartes en main.
Jules eût l'impression d'être en face d'une statue de cire. Son cœur n'avait jamais battu aussi vite. Ses poils ne s'étaient jamais autant hérissés. Son souffle, aux émanations infectes, suivait le tempo de son cœur. Le jeune homme eût envie de vomir lorsqu'il vit dans les yeux de son ennemi toute sa cruauté défiler. Jules cracha ses tripes lorsqu'il vit April s'écrouler sous les coups des Taureaux. Il serra son poing de toutes ses forces, aboli par la déchirure, et frappa l'air : mais Aaron avait déjà reculé.
- J'ai toujours un coup d'avance.
Un ricanement jouissif s'échappa du gosier de l'individu. Un rire pervers. Sadique. Machiavélique. Jules voulait évacuer sa rage, mais la raison tinta une clochette. Il ne pouvait rien faire. Hormis être broyé par la souffrance.
Jules baissa alors les yeux et vit sa flaque de sang joncher le socle de la structure. Il avait accompli toute cette route pour finir piégé et amoché tel un éclopé. Il avait foncé dans la gueule du loup et le loup l'avait dévoré.
« J'espérais quoi au fond ? Trouver un remède pour retrouver ma mémoire ? Et voilà que je vais la perdre à nouveau. Définitivement. »
Le jeune homme souffla, anéanti. Il était arrivé à ce stade où il se demandait à chaque souffle si cela allait être le dernier. Mais Aaron semblait jubiler de le voir souffrir, d'être le maître de la vie et de la mort.
- Je pourrai demander à un de mes gardes de poser son arme entre tes deux beaux yeux, Jules, dit-il en montrant un sourire éclatant, mais ça serait trop facile. Et puis, je n'ai pas envie de salir un peu plus mon très cher pilori. Tu ne le mérites pas, d'ailleurs. Non, c'est vrai. Le pilori n'était réservé autrefois qu'aux peureux. Il paraît qu'après les avoir humiliés, un bourreau leur coupait la tête avec une hache des plus aiguisées.
Aaron, emporté par sa tirade, mima, avec une grande volonté, le voleur d'âme et l'auteur des lames.
- Tchiiing. Mais je te rassure, mon ami, tu n'auras pas à subir cet horrible acte. De un, parce que je n'ai pas de hache dans mon bureau. De deux, parce que tu n'es pas un peureux.
Aaron avança d'un pas et releva le menton du jeune homme. Il répéta, sur un air presque mielleux :
- Tu n'es pas un peureux, Jules ?
- Je vais te tuer, répondit-il sans réfléchir, sans aucune vergogne, mais avec un regard de chien battu retirant toute crédibilité. Pas aujourd'hui, pas demain. Mais je te tuerai.
Jules se mordit la lèvre, craignant d'avoir empiré les choses. Comme si la situation pouvait s'envenimer encore plus... Il ne croyait en aucun cas ce qu'il venait de dire. Sa bonne étoile avait filé. Ses proches aussi. Le jeune homme ne pouvait que les rejoindre. Il baissa les yeux à nouveau et se soumit au rire d'Aaron. Un liquide chaud dégringola le long de ses jambes tremblantes. Jules ne s'en rendit même pas compte, achevé par la peur. Il titubait entre deux peurs : la peur de quitter ce monde et la peur de souffrir une dernière fois avant de le quitter.
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REVELUM [EN REECRITURE]
AdventureAvez-vous déjà voulu être seul au monde ? C'est ce que Jules va découvrir. Non. Subir. Émergeant d'un sommeil profond, le jeune homme se trouve au beau milieu d'un bateau, accompagné de deux autres passagers, les dernières braises de l'humanité. Mai...