Chapitre 4

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  Zeik se frotta le visage.

Il regrettait ses cours au Japon. Les français parlaient trop vite pour lui. Habituellement les mathématiques et l'histoire étaient ses matières favorites. Là, il allait devoir rattraper le retard, s'habituer à cette langue et, surtout, faire en sorte d'ignorer tous les regards posés sur lui.

Il avait l'impression d'être un animal de cirque. Une activité intéressante et distrayante.

La mondialisation du professeur était très loin de lui.

- Tout va bien Zeik ?

Il sursauta. C'était Sâme. Est-ce que cela pouvait être quelqu'un d'autre ?

- Tu es tout pâle, cela va nuire à ta beauté naturelle.

Le garçon ne put s'empêcher d'avoir un sourire amusé.

- Ces deux premières heures de cours étaient... trop difficiles pour toi ?

- Non c'est que...

Il chercha ses mots. Ils lui venaient tout naturellement dans sa langue natale, pas en français.

- J'ai beau avoir appris, je ne suis pas encore habitué à parler constamment le français. Les cours ne sont pas tellement différents de ce que j'avais. Vos professeurs parlent juste un peu trop rapidement pour moi.

Zeik se pencha en arrière et s'étira. Contre le dossier de sa chaise, il entendit les os de son dos craquer.

- Il me faut juste du temps pour m'habituer.

- C'est vrai. Tu n'es là que depuis deux heures. Ce qui me fait penser que je dois te faire visiter. Tu viens ?

Le lycée était immense. Enfin, c'est l'impression qu'en avait l'adolescent. Il était plus grand que ce qu'il avait pu s'imaginer. Bien qu'en y repensant, il n'avait rien essayé de s'imaginer du tout, préférant ignorer au maximum le nouveau lycée qui l'attendait.

Deux étages en plus du rez-de-chaussée. Plus de salles qu'il n'en fallait, une grande bibliothèque, qu'ici ils appelaient « CDI ». Une salle vidéo, deux salles informatiques, une à chaque étage, trois salles qui servaient au club d'art, au rez-de-chaussée, dont une qui méritait plus le nom de débarra que de salle d'art. Des casiers sur tous les murs libres de ce même étage. Un terrain de sport à l'extérieur, et deux gymnases. Un petit et un grand, chacun accompagnés de leur propre locale sportif. Tout pour être bien équipé. Face à tout cela, Zeik se demandait pourquoi faire si grand ? Était-ce vraiment nécessaire ? Des questions qu'il garda pour lui...

- Il y a environ sept-cents élèves ici. Alors que le lycée en lui-même pourrait en accueillir plus de mille je pense. Neuf classes en secondes, sept en première, le même nombre en terminal. Et il y a aussi une classe spéciale.

- Cela fait... pas mal de monde.

Sâme haussa les épaules.

- On s'y habitue vite.

Sans prévenir, quelqu'un enlaça la jeune fille et posa un bisou rapide sur sa joue. Sâme se libera de l'emprise de son copain pour mieux le voir. Elle l'embrassa, comme tous les adolescents amoureux le faisaient. Les deux adolescents ne se lâchaient plus. Zeik détourna le regard. Cette situation le mettait vraiment mal à l'aise.

- Vous ne m'avez pas attendu ?

- J'étais pressé de montrer notre magnifique lycée à Zeik.

Mike leva enfin les yeux vers lui.

- Alors comment le trouves-tu ?

- Grand, très grand, peut-être même trop grand. Mon collège était plus petit et mon lycée d'un mois aussi.

- Bienvenue dans le lycée le plus américain de France !

Zeik haussa un sourcil, sans comprendre.

- Le plus américain ?

- Tu as déjà regardé des films ou des séries américaines qui se passent dans un lycée ?

- Pas vraiment.

- Il va falloir que tu t'y mettes. Ici, ils en ont je pense trop regardé.

Sa remarque ne fit rire que Sâme. Zeik était trop perdu pour comprendre et trouver cela amusant.

- Cela ne me dit toujours pas pourquoi ce lycée est... « Amerika ».

- Ce petit accent japonais est si mignon !

- Sâme ! Tu recommences !

- Oui, désolé. Quoi qu'il en soit, ici, tout le monde qualifie le lycée d'américain car... comment expliquer.

- Dans ses méthodes, ses manières, sa gestion, son apparence. Tout ressemble au système américain ici.

- Je vois. Enfin non, je ne vois pas, mais je comprends... je pense.

- Regarde des séries américaines, vraiment ! Ça t'aidera.

La sonnerie retentit, coupant court à leur conversation.

- Déjà la fin de la pause. Je dois y aller, j'ai sport.

Un dernier baiser, et Mike les quitta.

- Dépêche-toi Zeik. On a anglais, avec la nouvelle prof. Il paraît qu'elle est arrivée aujourd'hui. Depuis la rentrée, on n'a pas eu un seul cours d'anglais. Pénurie de professeur apparemment. Je n'ai pas prononcé un mot d'anglais depuis l'année dernière. Je ne sais pas si je vais être capable de dire quoi que ce soit aujourd'hui.

Sâme rigola. Elle parlait vite, et beaucoup. Elle ne s'arrêtait plus. C'était gentil de sa part, mais trop pour le garçon. Toutefois, dans son discours, un élément avait piqué sa curiosité.

- Attend, tu as dit qu'un nouveau professeur était arrivé aujourd'hui ?

- Oui pourquoi ?

Il ne répondit pas.

- On va vraiment être en retard. Notre cours est à l'autre bout du lycée.

En courant, ils traversèrent le lycée, Zeik suivant de prêt la jeune fille pour ne pas se perdre. Couloirs et escaliers, ils arrivèrent à destination, avec plus de cinq minutes de retard.

- Première journée, troisième heure de cours et déjà en retard ?

Sans même regarder, Zeik reconnu la voix. Face à ce professeur, son japonais ressortit.

- C'est une blague maman ?

- Pas ici, jeune homme. Allez à vos places tous les deux.

Ils s'installèrent à la table de libre.

- Je reprends. Comme je vous disais, je suis madame Kaîda. Je viens du Japon où j'y étais professeur de langues. Ici, je serais simplement votre professeur d'anglais...

Zeik s'affala sur la table et se cacha dans ses bras.

- La chance de ma vie, vraiment...

Un jour ils comprendrontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant