Chapitre 5

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Le ciel était sombre, les nuages menaçants, prêts à lâcher leurs gouttes d'eau sur le sol.

Zeik aimait la pluie. Il aimait la fraîcheur et l'humidité qu'elle apportait. Quand il se retrouvait dessous, recevant les gouttes sur son visage, il avait l'impression d'être lavé de tout, de ce qu'il pensait, de ce qu'il avait fait, de ce qu'il voulait. Même si tout revenait quand la pluie partait, que rien n'avait changé, le temps de l'averse il se sentait vide et bien.

Au Japon, il ouvrait toujours ses fenêtres par ce genre de temps, même en hiver. Entendre le son des gouttes qui tombaient sur la ville lui permettait de s'évader. Il aimait ce bruit, cette sensation.

Ce soir-là, malgré ce ciel menaçant, la pluie ne venait pas. Quelques rayons de soleil arrivaient même à percer entre les nuages.

Zeik attendait les gouttes avec impatience, assis sur la terrasse qu'ils avaient, à l'arrière de la maison.

Par la fenêtre de sa chambre à l'étage, juste au-dessus de lui, sa mère passa la tête.

- Zeik rentre, il va pleuvoir.

Il ne la regarda même pas.

- C'est précisément pour cette raison que je suis assis là.

Il ne le vit pas, ni ne l'entendit, il devina le soupir de sa mère.

- Rentre, de toute façon on va manger.

Zeik ne bougea pas. Il était bien, assis adossé à cette maison qu'il n'accepter pas encore, attendant une pluie qui tardait vraiment à venir.

- Zeik !

Il leva enfin les yeux vers elle.

- Qu'est-ce que tu fais dans ma chambre ?

- Je te cherchais. Rentre chéri.

- E e (oui)

Zeik agita sa fourchette dans son assiette. Un plat de ratatouille, tout ce qu'il y avait de plus normal, du moins pour ceux qui connaissaient. Ce mélange de légume qui ne semblait de base pas s'accorder ensemble, réunis dans un même plat. Ce n'était pas mauvais, pas extraordinaire non plus.

Zeik piqua un morceau de courgette, l'observa au bout de sa fourchette. Une goutte de jus tomba sur la nappe blanche et propre.

- Tu n'aimes pas Zeik ?

Il haussa les épaules. Son père se resservait déjà une assiette.

- Moi j'aime beaucoup. C'est toi qui l'as cuisiné ?

- Non, un cadeau de bienvenue de la voisine. Il faudra que je lui rapporte le plat.

Zeik quitta sa fourchette des yeux, pour regarder sa mère. Son morceau de courgette refroidissait.

- Un plat de légume ? Comme cadeau de bienvenue ? J'imagine déjà le genre de voisin.

- Ne soit pas médisant Zeik ! Elle a l'air très gentil. Peut-être qu'elle aime tout simplement cuisiner et qu'elle avait envie de partager.

- Ou alors elle avait un surplus et ne savait pas quoi en faire, du coup elle nous le donne pour s'en débarrasser.

- Qu'elle que soit la raison, c'est gentil de sa part. Tu n'aimes pas ?

Le garçon se décida enfin à manger ce misérable petit morceau de courgette.

- Ce n'est pas mauvais.

Il prit une autre fourchette, sans grande conviction.

- Je n'ai pas faim, c'est tout.

Il regarda le nouveau morceau de légume qu'il avait pris. De l'aubergine, gluant plutôt étrange. Il n'était pas certain d'apprécier.

Son père prit un morceau de pain, sauça son assiette avec. Il n'y restait pas une miette. Au moins, ce voyage et ce changement radical de vie ne lui coupaient pas l'appétit. Ryo Kaîda, une personne qui préférait manger plutôt que lire, facilement qualifiable de peu sportive, voir pas sportive du tout. C'était quelqu'un qui en imposait de par sa corpulence.

A la différence de sa femme, Yuki. Petite et mince, elle mangeait juste ce qui était nécessaire au bon maintien de son corps. Lui, avait toujours trouvé sa mère bien trop maigre, sans jamais le lui avoir vraiment dit...

Les deux exacts opposés.

En les regardants, Zeik se demandait souvent de qui il tenait. Physiquement, il ne ressemblait ni à l'un, ni à l'autre, moralement, cela dépendait des moments. Il s'était déjà demandé s'il n'avait pas été adopté même s'il avait la preuve que non.

- Ta journée ne sait pas bien passée ? Demanda sa mère, inquiète.

Zeik haussa une nouvelle fois les épaules. Il n'avait fait que vivre une journée banale de sa nouvelle vie. Il avait eu un peu de mal à suivre en cours, il s'était sentit perdu, rien en revanche qui aurait pu lui couper l'appétit.

- Ma journée c'est bien passé, ça va. Je n'ai pas parlé à beaucoup de monde, mais ma classe à l'air plutôt sympa.

- Cette fille aussi, elle a l'air sympa.

Sa mère avait un sourire à la fois amusé et malicieux.

- Quelle fille ?

- Ne fait pas l'ignorance. J'ai bien vu que toutes les filles de la classe t'observaient, de loin. Mais il n'y en a qu'une seule avec qui tu restais. Celle avec qui tu es arrivé en retard, soit dit en passant.

- En retard en cours ? Déjà ?

C'était tout ce que son père avait retenu, sans relever le reste.

- Elle... c'est Sâme. C'est elle qui m'a accueilli et fait visiter le lycée, c'est pour ça qu'on était un peu en retard. Elle et son copain.

Zeik avait bien insisté sur le mot « copain », en fixant sa mère.

- Elle a déjà un copain ? C'est bien dommage.

- Dommage ? Pourquoi ?

Yuki Kaîda grignotait son bout de pain comme un enfant, ou plutôt comme un rongeur. Ses expressions faisaient vraiment penser à celle d'un hamster cherchant à être mignon.

- Elle est plutôt mignonne. Vous iriez bien ensemble...

Un jour ils comprendrontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant