Chapitre 44

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La sonnerie retentit.

Les élèves rentrèrent, les uns après les autres, s'installèrent. Le professeur posa son sac, sortit ses feuilles et tout ce dont il avait besoin.

- On se dépêche de s'installer et en silence !

Un feutre bleu à la main, il se mit à écrire au tableau. Il ne perdait pas une seule minute pour débuter son cours.

Sâme fixait la place de Zeik.

Vide.

Son ami n'était pas allé en cours sans l'attendre, comme elle l'avait espéré. Il était absent et quelque part dans ce lycée... A moins qu'ils soient déjà dehors ? Peu importe, il était absent.

Elle le savait, elle n'aurait jamais dû le laisser seul !

- Zeik, je vais te tuer, se murmura-t-elle.

- Bien, qui vient au tableau corriger les exercices qui étaient à faire ?

Des mains se levèrent. Sâme restait fixée sur cette place vide, à la fois en colère et inquiète pour son ami.

- Tenez, mademoiselle Hullele, au lieu de rêvasser, venez donc au tableau.

D'un geste mécanique, elle se leva, prit le feutre que le professeur lui tendait, alla au tableau. L'exercice qu'il y avait à faire... il n'était qu'un vague souvenir dans sa tête. Elle l'avait fait, la veille. A présent, elle l'avait totalement oubliée.

Elle commença tout de même à écrire des chiffres et formules sur ce tableau qui perdait son blanc d'origine.

Des coups résonnèrent sur la porte, la jeune fille en sursauta. Dans sa tête, elle eut l'impression de faire un bon de trois mètres de haut.

La porte s'ouvrit, laissant apparaître trois garçons.

- Vous êtes en retard jeunes hommes.

- Excusez-nous.

- Allez-vous asseoir, en silence.

Sâme les regarda passer. Théo, Romain, Nicolas. Toujours pas de Zeik. La jeune fille reporta son regard sur sa place qui persistait à rester vide.

Le professeur fit la même chose.

- Mademoiselle Hullele, savez-vous où se trouve votre camarade ?

Elle secoua la tête.

- Non... je suis désolé.

Intérieurement elle s'énerva vraiment. Insultant Zeik de tous les noms qu'elle connaissait. Il lui avait fait une promesse qu'il n'avait pas tenue. Il avait trahi sa confiance. La jeune fille lui en voulait.

Terriblement.

- Je peux allez le chercher si vous voulez.

- Non, vous restez ici.

Il lâcha un soupir, prit son cahier, l'ouvrant à la page qu'il fallait.

- Je vais simplement signaler son absence, ajouta le professeur.

***

Avec difficulté, Zeik se redressa et s'appuya contre le mur. Ce simple effort lui donna l'impression de recevoir un nouveau coup. Son regard était flou, un œil refusait même de s'ouvrir.

Il porta une main à son visage, du sang coulait de son nez et du coin des lèvres. Il avait un goût désagréable et métallique dans la bouche, comme s'il avait bu un verre entier de ce liquide poisseux et rouge.

Il laissa retomber son bras.

Tout son corps n'était plus que douleur.

Ils ne l'avaient pas épargné. Combien de fois avait-il été frappé ?

Cinq, dix, quinze, vingt fois, peu importait. Il ne savait même pas combien exactement ils avaient été sur lui. Trop pour que leur action prenne une quelconque forme de courage.

Il toussa, plusieurs fois, faisant voler quelques gouttes de sang.

Ils avaient frappé, à pas grand-chose près, toutes les parties de son corps. Le ventre, le visage, le dos, le bas ventre, les jambes. Zeik en avait encore le souffle coupé. Malgré le bourdonnement dans ses oreilles, il entendait que sa respiration était sifflante, anormale.

Il ferma les yeux, la tête légèrement en arrière.

Dans ce recoin abandonné du lycée, entre deux blocs de casier, mis là à cause de leur état misérable, Zeik laissa les larmes couler.

Une discussion en privé... A part des insultes, ils n'avaient rien dit. Même pas l'exacte raison de leur acte. Quoique, la raison, il pouvait le deviner aisément. C'était le prix qu'il devait payer pour être trop différent, dans un milieu intolérant.

Certains l'avaient fait simplement pour suivre le reste du groupe, en parfaits moutons qu'ils étaient. D'autre éprouvaient certainement une réelle haine pour ce qu'il était...

Zeik fut plus énervé que triste. Énervé par toute cette haine et cette injustice. C'était un acte d'aucune bravoure, il était juste cruel et gratuit...

Pourquoi ?

Pourquoi ne pouvaient-ils simplement pas l'ignorer ? Faire comme s'il n'existait pas ? Pourquoi toute cette mauvaise attention ? Lui n'en voulait pas...

Il eut une nouvelle crise de toux. Même cela fut pour lui un effort douloureux.

Les yeux fermés, essayant d'oublier tout ce qu'il ressentait, autant physiquement que mentalement, appuyé sur ce mur, il s'endormit presque.       

Un jour ils comprendrontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant