Chapitre 21

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     Le directeur parlait.

Un long discours sur le respect, sur l'attitude à avoir dans un lycée, sur le comportement et sur leurs actes. Il parlait, mais il était seul à s'écoutait.

Les adolescents ne se lâchaient pas du regard. En un sens, leur combat de couloir continuait de manière silencieuse. Mike affichait toujours son sourire moqueur et triomphant. Zeik, lui, s'était fermé au monde extérieur.

Il ne voyait que Mike. Lui et son affreux sourire.

Cela ne le faisait que bouillir d'avantage. A cet instant, il ne savait pas ce qui le retenait de se jeter une nouvelle fois sur lui. La présence seule du directeur certainement.

- Je suis extrêmement déçu par votre attitude, à tous les deux. En partie par vous, monsieur Kaîda.

Zeik ne tourna même pas la tête vers le directeur.

- Depuis votre arrivée, vous sembliez très prometteur. J'ai entendu beaucoup de bien de vous de la part de vos professeurs. Des facilités un peu partout malgré la langue étrangère et un excellent joueur de basket. Je vous ai vu lors du dernier match. Monsieur Hector était fier d'avoir un joueur tel que vous.

Le directeur continuait de parler, toujours à moitié dans le vide. Ce qu'il disait était à la fois élogieux et accusateur. Zeik avait déçu le directeur et certainement d'autre, il ne s'en souciait pas.

- Bien.

Il rassembla des feuilles devant lui sur son bureau, rangea les stylos qui n'étaient pas à leur place. Il joignit ses mains et regarda les deux garçons.

- Je ne pense pas qu'un simple avertissement suffira à vous faire comprendre.

Aucune réponse.

- Est-ce que vous m'écoutez ?

Comme des robots, ils tournèrent tous les deux la tête vers celui qui leur parlait depuis près d'une heure.

- L'exclusion temporaire, pour tous les deux, pendant quatre jours. Et cela prend effet dès demain. Jusqu'à la fin de la semaine donc. J'espère que vous aurez retrouvé votre calme et votre sérieux la semaine prochaine. Vous pouvez y aller.

Zeik mit quelques secondes avant de réaliser qu'il pouvait sortir de ce bureau. Il le comprit seulement lorsqu'il vit Mike ouvrir la porte.

- Monsieur Kaîda ?

Finalement, le directeur le retenait encore un peu.

- Oui ?

- Quel est la raison d'un tel acte ?

Zeik regarda la moquette grise au sol, d'une propreté parfaite.

- Ce n'était qu'une bagarre monsieur.

- Une bagarre qui n'a pas raison d'être dans un établissement scolaire, comme à l'extérieur ! Ce n'est pas la réponse que je souhaite entendre.

- Disons que c'était...

Zeik leva les yeux vers le plafond. Il sentait les larmes lui monter aux yeux. Il ne pouvait pas pleurer, pas ici.

- Une sorte de réponse, ou de défense, face aux rires, aux regards de haines, face aux... murmures.

- Était-ce nécessaire ?

Zeik haussa les épaules.

- La colère nous conduit souvent à faire des actes stupides qu'on ne contrôle pas.

- Il faudra apprendre à les contrôler.

- Vous punissez la violence physique, mais que faites-vous de la morale ? Vous n'avez pas punis pour ce journal, alors qu'il peut blesser autant qu'un coup de poing ! Est-ce que je peux y aller à présent ?

Le directeur eu un moment d'arrêt. Il ne trouva rien à répondre au garçon.

- Allez-y oui, finit-il par dire.

Zeik eu à peine le temps de refermer la porte du bureau derrière lui, que sa mère lui tomba dessus.

Il sentit son regard noir, sa colère, avant même qu'elle ne parle. Elle l'attendait là, les bras croisés, le pied tapant le sol.

- Je peux savoir pourquoi tu n'étais pas présent à mon cours Zeik ?

Le garçon regarda derrière lui, le bureau du directeur. Si sa mère l'attendait ici, devant cette porte, c'était qu'elle n'ignorait pas l'histoire. Il releva les yeux vers sa elle. Il l'observa, se demandant jusqu'où elle était au courant.

- J'étais avec le directeur. Enfin, tu es déjà au courant, vu que tu m'attendais là.

- Tu t'es battu avec Mike. Je l'ai vu sortir du bureau avant toi. C'est Sâme qui m'a dit où tu étais.

Sa mère parlait sur un ton sec. Elle ne se détendait pas.

- En revanche ce qu'elle ne m'a pas dit, c'est la raison de toute cette histoire. Pourquoi tu t'es battu ?

Zeik en avait déjà marre de cette question.

Pourquoi ?

Parce qu'il avait été poussé à bout. Le pire, c'était que sa mère ne semblait même pas savoir pour lui.

- A cause des rires, des murmures, des mots que l'on m'a dits. A cause de la trahison aussi...

- Je ne comprends pas.

- Tu ne les vois pas ? Tu ne les entends pas ? Moi si. Peut-être parce qu'ils ne sont adressés qu'à moi.

- Explique-toi clairement je te prie, Zeik !

Il baissa les yeux. Quelque chose au fond de lui, lui disait, lui criait même, de ne pas lui dire. Toujours pas, elle n'était pas prête. Depuis tout ce temps, cette chose au fond de lui le lui disait. Elle le lui répétait.

Même avec ses parents il devait le garder pour lui.

Pourtant... Pourtant c'était trop tard. Il avait déjà fait une erreur. Tout le monde le savait à présent. Ses parents ? Cela n'allait plus tarder.

- Tu as lu le journal du lycée ? Celui de la semaine dernière ? Moi, je ne l'ai vu que ce matin, en arrivant...

- J'ai beaucoup de travail. Je ne me préoccupe pas de ce genre de chose.

- Même quand ton fils s'y trouve en première page ? Même lorsque c'est lui qui fait les gros titres ?

Yuki Kaîda avala sa salive, son fils le vit clairement. Elle hésitait à parler. Elle hésitait à employer tel ou tel mot. Elle cherchait quoi dire.

- J'y ai peut-être jeté un coup d'œil, rapidement. Mais ce journal n'est là que pour les élèves. Les distraire, une occupation entre les cours. Quelque chose d'amusant à lire, rien de réellement sérieux, ou concret. Celui de la semaine dernière n'était qu'une blague. Une blague sans importance, tu ne dois pas y faire attention. Et c'est exactement pour cette raison que je n'avais pas abordé le sujet à la maison !

Tout en parlant, sa mère semblait gênée. Elle-même n'était pas entièrement convaincue par ce qu'elle disait. Elle ne voulait pas croire ce qu'il y avait dans ce fameux journal.

- Et si ce n'était pas une blague ? Si cet article était vrai ? Comment réagirais-tu ? Comment papa réagirait-il ?

- Zeik, ne racontes pas n'importe quoi. S'il te plaît...

Il soutint le regard de sa mère, durant un court instant, avant de partir.

Il fuyait sa mère.

Un jour ils comprendrontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant