Partie 8

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Point de vue de Maëva

        Je me lève. Comme la veille, il est assez tard. Le soleil entre dans la pièce mais il ne m'empêche pas de frissonner. Je trouve dans le dressing une espèce de robe de chambre beaucoup trop provocante à mon goût mais qui a l'avantage de me réchauffer.

Je me rends ensuite dans le salon. Le petit-déjeuner a déjà été apporté. Je cherche la télécommande de la télévision et l'allume. Je ne la regarde jamais en temps normal, mais je veux savoir si quelqu'un est à ma recherche. Je fais défiler les chaînes pour trouver un journal télévisé. Je mange en écoutant.

      Malheureusement, le journal s'achève sans aucune mention d'une adolescente disparue.
J'éteins la télé et prends ma tête entre mes mains. C'est l'heure de réfléchir à mes options.

        Option numéro 1 : abandonner, admettre que je ne réussirai pas à m'en aller. Je la rejette immédiatement. Je me battrai jusqu'à mon dernier souffle s'il le faut pour regagner ma liberté.

        Option numéro 2 : sortir par la force. Cela me semble plutôt compromis vu les efforts que Damien a mis en œuvre pour me retenir ici. Et je ne suis pas de taille contre lui, à moins de trouver une arme.

        Option numéro 3 : jouer la gentille fille docile pour gagner sa confiance. Un processus long et risqué car il risque de s'apercevoir de mon changement de comportement. Sans compter qu'il requiert une grande proximité avec lui, ce qui est au-dessus de mes forces pour le moment. Ce sera mon plan en dernier recours.

     Il ne me reste donc plus que l'option numéro 4, à savoir glaner le maximum d'informations sur mon ravisseur et ses faiblesses pour pouvoir les exploiter contre lui. Et cela commence par une petite discussion avec Alice.

        Une fois ma décision prise, je vais me doucher. J'enfile ensuite le short et le débardeur les moins affriolants que je trouve et décide d'aller explorer le contenu de la bibliothèque. De près, elle est encore plus imposante et immense que ce que je pensais. En l'ouvrant je me rends compte qu'il y a plusieurs rayons en profondeur et que je ne parviens même pas à atteindre les plus élevés. J'observe les livres de plus près. Il y a une diversité d'ouvrages impressionnante : romans classiques, pièces de théâtre, recueils de poésie, traités de philosophie et historiques, mais aussi ouvrages contemporains, livres de science-fiction...J'attrape un livre au hasard et vais m'allonger dans le canapé avant de me plonger dedans.

       Je m'enfonce rapidement dans l'histoire et perds la notion du temps au fil des pages, aussi suis-je surprise lorsque j'entends Alice entrer.

-Bonjour, Mademoiselle !

Je lui réponds à mi-voix en posant l'ouvrage. Elle laisse le déjeuner sur la table et vient récupérer le plateau du petit-déjeuner avant de faire demi-tour. Je sors finalement de ma torpeur et l'interpelle avant qu'elle ne s'en aille.

-Alice ?

Elle se retourne et m'interroge du regard.

-Hum...je voulais juste savoir si cela faisait longtemps que vous travailliez ici ?

-Depuis toujours Mademoiselle. Et vous pouvez me tutoyer, vous savez, dit-elle en souriant.

-Oh, je vois...Et à qui est cette maison ?

-A la famille de Monsieur, Mademoiselle.

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine.

-Cela veut dire qu'il y a d'autres personnes que lui qui logent ici ?

L'attitude d'Alice change d'un coup. Elle se renferme imperceptiblement et lorsqu'elle me répond sa voix a perdu de sa chaleur.

-Non, Mademoiselle.

Elle se retourne et se dirige vers la sortie. Je sais pertinemment que maintenant qu'elle est devenu méfiante je devrais arrêter de l'interroger, mais c'est plus fort que moi, j'ai besoin de savoir.

-Alice ?

Elle s'arrête.

-Je suis la première fille que Damien enlève ?

J'espère la faire tilter avec ce mot. Lui faire comprendre qu'elle se rend complice d'un acte illégal. Mais cela n'a pas l'air de lui faire plus d'effet que ça.

-Oui, Mademoiselle, répond-elle avant de s'en aller, définitivement cette fois-ci.

Je me tire les cheveux dans un geste colérique. Je suis trop bête, je viens de tout gâcher ! A cause de ma stupide curiosité, il m'a fallu moins de deux minutes pour perdre la confiance d'Alice ! Vu sa rigidité, elle va sûrement répéter mot pour mot cette conversation à Damien. Pas que j'aie quoi que ce soit à me reprocher -je ne lui ai pas demandé d'aide, seulement des informations-, mais la dernière chose dont j'ai besoin est d'une méfiance supplémentaire à mon égard.

Cet incident ainsi que le fait de savoir que je vais bientôt le revoir me mettent d'une humeur massacrante et font passer l'après-midi beaucoup plus vite que ce que je voudrais.

Lorsque la porte s'ouvre de nouveau, je suis persuadée de le voir entrer, mais ma demoiselle de chambre est seule. Elle répond à ma question avant que j'aie eu le temps de la formuler.

-Monsieur s'excuse de ne pas pouvoir dîner avec vous, il a beaucoup de travail. Il ne pourra pas vous voir avant demain soir.

Je lui demande en quoi consiste son travail, mais elle me répond sèchement que je devrai lui demander directement, qu'elle n'a pas le droit d'en parler. Elle compose rapidement le code et sort. Je suis à la fois soulagée et énervée. Soulagée parce que j'ai encore vingt-quatre heures de liberté avant de me confronter de nouveau à mon ravisseur. Enervée à cause de l'attitude d'Alice. Elle ne m'aidera jamais, et cela me met hors de moi. Comment peut-on être aussi insensible ?

Je regarde le plateau qu'elle m'a apporté. Il y a un couteau, mais il est trop peu effilé pour que je blesse qui que ce soit avec. Je suis sûre d'avoir beaucoup plus de force qu'Alice et de pouvoir la maîtriser pour l'amener à me donner le code, mais l'expérience m'a enseigné qu'une arme facilite grandement l'obtention d'informations. Je réfléchis. Ce couteau doit bien pouvoir m'être utile d'une manière ou d'une autre...

Un sourire me monte aux lèvres tandis qu'une idée me traverse l'esprit. Si le couteau ne me sert pas d'arme, il peut bien m'aider à en fabriquer une. J'ai vu dans un reportage sur les prisons qu'avec un peu de persévérance les détenus arrivent à transformer une simple brosse à dents en arme aussi pointue qu'un rasoir. Pourquoi pas moi ?

Je suis ton ombreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant